Le mercredi 11 novembre, l’ambassade de France au Mali a enfin rétabli Me Boubacar Sidibé dans tous ses droits, en lui remettant officiellement son insigne décoratif d’Officier de la Légion d’Honneur.
Mais pourquoi attendre jusqu’à 41 ans pour remettre à quelqu’un qui a été honoré par l’Etat français (alors qu’il était le président de la Cour Suprême du Mali) son insigne de la médaille de la Légion d’Honneur ? Me Boubacar Sidibé explique de la façon la plus humble que : « c’est à la suite d’un simple quiproquo entre l’ambassadeur de l’époque et moi que tout cela est arrivé. De même peu de temps après, la maladie dont je souffrais m’avait aussi contraint d’être urgemment évacué en Allemagne Démocratique d’alors pour y subir une complexe opération chirurgicale. Grâce à laquelle je m’en suis heureusement bien tiré ». C’est ainsi que depuis 1974, n’ayant jamais réclamé son insigne, la distinction de Me Boubacar Sidibé était restée cloîtrée dans les placards.
Mais fort heureusement l’ambassadeur actuel, par sa clairvoyance, a corrigé cette anomalie administrative. Car, Me Boubacar Sidibé a finalement reçu une notification de Giles Huberson qu’il sera décoré le mercredi 11 novembre 2015 dans les locaux de l’ambassade de France, en même temps que plusieurs personnalités maliennes et étrangères. Et la promesse fut bien tenue lors d’une cérémonie sans medias mais auréolée de la fanfare militaire et des hymnes du Mali et de la France. Puisque chaque personnalité a effectivement reçu, dignement et avec tous les honneurs, ce jour-ci sa décoration, près du monument aux morts, des mains de l’ambassadeur de France au Mali. Et Me Sidibé a occupé les premières loges.
En recevant son insigne, en guise de remerciements, Me Sidibé a dit ceci : « Comme la France est une nation qui ne confond pas le mérite et le comportement, Excellence Giles Huberson, transmettez-moi aux autorités françaises et au peuple français, l’expression de ma profonde gratitude ».
Qui est Me Boubacar Sidibé ?
Me Boubacar Sidibé est un magistrat chevronné hors pair et de classe exceptionnelle à la retraite qui a presque gravi tous les échelons du corps de la justice de l’époque coloniale à l’indépendance du Mali, pour finalement occuper le fauteuil de ministre de la Justice et Garde des Sceaux. C’est lui qui a eu la lourde tâche mais l’honneur « d’africaniser l’administration judiciaire » au Soudan français (ancien nom du Mali). A ce titre, il dirigeait une équipe qui avait la responsabilité de former les magistrats coloniaux de l’Hexagone qui venaient servir dans notre pays. Mais il n’était pas un simple magistrat. Car, il était aussi très engagé pour l’émancipation de son peuple et la défense des intérêts de sa corporation. Ce faisant, il fut entre l’époque coloniale et le début de l’indépendance, le Secrétaire général du Syndicat national de la magistrature.
Me Boubacar Sidibé, qui est aujourd’hui nonagénaire, est donc l’ancien ministre de la Justice et Garde de Sceaux de la république du Mali de 1979 à 1982. Avant d’être à la tête de ce Département, il a été le premier Directeur National de l’Administration judiciaire. Il fut président de la Cour Suprême, c’est l’époque où il obtint d’ailleurs sa distinction de médaillé d’Officier de la Légion d’Honneur. C’est Me Boubacar Sidibé qui fut aussi le premier président de la Cour d’Appel du Mali (en guise de reconnaissance pour immortaliser ses faits d’armes, la première salle d’audience de cette cour porte aujourd’hui son nom). De 1959 à l’indépendance, il fut le premier Juge de Paix noir de Nioro du Sahel. Mais auparavant, il était Greffier en Chef. Au regard donc de curriculum très condensé et non exhaustif, il va s’en dire que, patriarche qu’il est désormais devenu, Me Sidibé, dont le Tout le Puissant a donné plusieurs enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants, a eu une vie professionnelle, associative et militante pleine. Puisse Dieu accorder encore longue vie à vous Patriarche, afin que la nouvelle génération puisse profiter de votre riche expérience !
Gaoussou Madani Traoré