Sommes-nous dans un état de droit ?

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L’État de droit est un système institutionnel dans lequel la puissance publique est soumise au droit, avec une hiérarchisation des normes juridiques ; ce qui suppose l’égalité des sujets de droit et l’existence de juridictions indépendantes. Les jeunes démocraties africaines se réclament de l’Etat de droit et elles ne  ratent aucune occasion de le faire savoir. Cependant, entre la profession de foi et les actes de tous les jours,  le droit ne trouve pas toujours son compte.

 

La hiérarchie des normes

 

L’existence d’une hiérarchie des normes est la garantie la plus importante de l’État de droit. Au sommet figure la Constitution qui est la norme supérieure. Elle est suivie des accords internationaux, de la loi, puis des règlements. L’architecture est complétée à la base par les décisions administratives et les conventions entre les personnes de droit privé. Le principe de cette hiérarchie est simple : toute norme, toute décision  ne respectant pas une norme supérieure est susceptible d’être attaquée et annulée ou écartée. L’État qui crée le droit est lui-même soumis aux règles juridiques. Une loi contraire à la constitution peut être déférée devant le conseil constitutionnel qui est juge de la constitutionnalité des lois, de même qu’un arrêté ministériel ou une décision préfectorale peuvent être attaqués s’ils sont contraires à une loi. Un tel modèle repose sur la reconnaissance de l’égalité des différents sujets de droit.

 

L’égalité des sujets de droit

 

L’égalité des sujets de droit est la deuxième condition de l’existence d’un État de droit. Les individus (personnes physiques), les  organisations (personnes morales)  peuvent contester l’application d’une norme juridique dès lors que celle-ci n’est pas conforme à une norme supérieure. L’État étant lui-même considéré comme une personne morale, ses décisions sont soumises au respect du principe de légalité à l’instar des autres personnes juridiques. L’action de la puissance publique se trouve ainsi encadrée si bien que les personnes physiques et morales de droit privé peuvent contester les décisions de la puissance publique en lui opposant des normes qu’elle a elle-même édictées. Dans ce cadre, le rôle des juridictions est capital et leur indépendance est une nécessité absolue.

 

L’indépendance de la Justice

 

C’est l’existence de juridictions indépendantes qui confère une portée pratique à l’Etat de droit. Cette existence suppose au premier chef une séparation des pouvoirs et une justice indépendante. En effet, la Justice faisant partie de l’État, seule son indépendance à l’égard des  pouvoirs législatif  et exécutif est en mesure de garantir son impartialité dans l’application des normes de droit. En outre une loi ou une convention internationale, contraires à la Constitution doivent en principe être écartées par le juge et considérées comme non valides. Peut-on parler d’Etat de droit lorsque le droit n’est pas systématiquement dit ? Lorsqu’une fois le droit est dit, la puissance publique n’est pas en mesure de le faire appliquer avec toute la diligence nécessaire? Lorsque l’Etat lui-même sujet de droit peut jouer avec les règles ?

 

 

L’État de droit est d’abord un modèle théorique devenu un thème politique. Il est considéré comme la principale caractéristique des régimes démocratiques. En faisant du droit un instrument privilégié de régulation de l’organisation politique et sociale, il subordonne le principe de légitimité au respect de la légalité. Il justifie ainsi le rôle croissant des juridictions dans les pays qui se réclament de ce modèle. Peut-il exister un point d’achèvement de l’Etat de droit en dehors de la prise de conscience des principaux acteurs et de leur volonté de se plier au droit et à lui seul ?

 

Mahamadou CAMARA

 

camara_m2006@yahoo.fr

 

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