Préparatifs des élections générales de 2012 : Ces cinq piliers solides de la politique malienne

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Nous sommes exactement à dix mois des élections présidentielles d’avril 2012. Mieux vaut évoquer le caractère exceptionnel de ces futures consultations maintenant que d’attendre janvier  2012 pour le faire. Ces mouvements électoraux, sans précédent,  qui s’annoncent, pleins d’intensité émotionnelle, imposent aux partis politiques des alliances, fusions ou regroupements. Dès qu’ils seront  plongés dans l’atmosphère de cette émotion, les partis en retard par rapport à ces repositionnements, ne pourront plus influer sur les " taux de change " du marché politique malien.

n marché plein de cafouillages et d’embouteillages des acteurs politiques plus ou moins considérables. Les valeurs de ces acteurs dépendent essentiellement des connotations nationales, régionales, municipales, communales, parentales et amicales des partis qu’ils représentent. Il y a plus de 120 partis qui prétendent vouloir améliorés les conditions de vies des maliens. Ces hommes et femmes ont-ils besoin de ce nombre pléthorique de projets de société pour se développer ? Il faut répondre catégoriquement : Non !  Car on peut certes approuver le multipartisme mais aussi accepter logiquement de désavouer son anarchisme qui provoque la stagnation ou la régression de la démocratie.

En quoi donc les élections de 2012 se démarqueront fondamentalement des précédentes multipartistes.

En 1992, début de la démocratie multipartiste, la vingtaine de candidats à la présidentielle et leurs partis étaient en grande partie des novices politiques plus guidés par l’émotion que par la raison. Cette situation causa une chienlit politique décennale.

En 2002, bien que le président sortant ne pouvait plus se représenter constitutionnellement, le candidat indépendant, favoris et favorisé par de grosses tournures évènementielles, s’est fait élire, sans coups férir, à la magistrature suprême du pays. Il a rempilé en 2007, sans surprise, pour son deuxième et dernier mandat qui tire à sa fin dans quelques mois.

Oui, les élections présidentielles de 2012 auront, comme jamais auparavant, des éclats et des échos fondamentalement et formellement au Mali. Non seulement elles marquent la vingtième année d’une pratique démocratique pluraliste mais aussi mettent sur un pied d’égalité les coureurs qui seront prêts à escalader la colline du pouvoir de Koulouba.

Il faudra souligner que ce déséquilibre des partis en première ligne a été occasionné par la naissance du PDES, parti pour le Développent Économique et la Solidarité.

Ces cinq piliers de la politique malienne       

Tout comme la religion musulmane, la maison politique malienne, selon sa configuration actuelle, se tient sur cinq principaux piliers. Certains seront surpris en constatant que nous ayons exclu l’ADEMA détenant pourtant le plus grand nombre de députés, 53 représentants du peuple, à l’Assemblée Nationale. Ce nombre considérable d’élus nationaux, municipaux et communaux de ce parti n’a été possible, en grande partie, que grâce à l’allégeance de l’ADEMA aux idéaux du président ATT. En refusant de présenter un candidat contre ce président indépendant en 2007, l’ADEMA de Dioncounda Traoré espérait ainsi conserver la sympathie de nombreux partisans de la politique consensuelle de ATT pour espérer occuper le fauteuil présidentiel.

Nous écrivions, en juin dernier, que " …contrairement aux discours et incantations prononcés urbi et orbi, l’ADEMA n’est pas un parti au sens strict du terme. Il s’agit plutôt d’un rassemblement hétéroclite d’anciens marxisants, de socialo-communistes à idéologie variable, de nostalgiques gagnés par le péché de la révision, d’anciens caciques de l’UDPM pour lesquels le centralisme démocratique reste une ambition du Grand Soir et de jeunes ambitieux à la recherche de raccourcis pour un grignotage plus rapide du fromage national." Nous croyons que l’ADEMA est une grande cour où l’anarchisme et l’égocentrisme font incessamment fléchir la hiérarchie et la démocratie. Quant à l’URD, deuxième force politique à l’issue des présidentielles des 2002, il s’est  aussi auto-flagellé en ne présentant pas de candidat aux dernières présidentielles.

En plus, son chauffeur titulaire s’est expatrié en abandonnant le véhicule de l’URD dont le moteur s’est beaucoup rouillé. Tardivement retourné au bercail, ce chauffeur pourra-t-il avoir le temps nécessaire d’huiler et de roder l’URD pour lui redonner sa puissance d’antan? Ces deux formations politiques qui ont prôné leur attachement effectif à la politique présidentielle d’ATT se sont vu surplombées par le Parti pour le Développement Économique et la Solidarité, PDES, de Hamed Diane Séméga qui a su prouver son enracinement au Projet de Développement Économique et Social (PDES) du même  président en exercice.

Lors des récentes élections partielles, le PDES, par sa force qui forge, s’est imposé en obtenant le plus grand nombre d’élus au total dans ces trois circonscriptions : une majorité absolue de 16 Conseillers sur 21 à Bourem, la 3ème place à Sandaré (Nioro) et la quatrième devant l’URD dans la Commune IV de Bamako.   

Tout comme l’US-RDA (Parti de Modibo Keita premier président du Mali) qui, par indiscipline, n’a pas su saisir sa bonne occasion de revenir au pouvoir en 1992, l’ADEMA par son mimétisme se mettrait à la touche du terrain politique en 2012. C’est pourquoi ce "parti"  ne peut être placé parmi ces cinq piliers de la politique malienne susceptibles d’occuper le pouvoir l’année prochaine: Le RPM, le parti SADI, le PARENA, la CODEM, et surtout le PDES dont la naissance, le 17 juillet dernier, fut un coup de théâtre sur la scène politique. Il a profondément ébranlé tous les partis surtout ceux qui se réclamaient de l’ADP, le camp présidentiel.

Le RPM : De 2002 à maintenant, sa puissance mobilisatrice s’est certes atténuée mais le parti, bien expérimenté, peut encore compter sur le prestige et la sagacité de son président, IBK, pour décupler sa force dans les prochains mois.

Le parti SADI : Pouvant être considéré comme le poing serré de l’opposition malienne, ce parti qui s’est écarté du gouvernement actuel pourrait s’appuyer sur la verve et le verbe de son futur candidat officialisé, Oumar Mariko, pour obtenir beaucoup plus de voix en 2012.

Le PARENA : Capable de faire des compromis sans compromission, le parti du bélier blanc, par des coups de cornes bien ciblés pour frapper l’adversaire là où ça fait mal, pourra, avec la pugnacité de son président, Tiéblé Dramé, réaliser de bonnes   surprises.

La CODEM : Elle est une jeune formation qui domine totalement dans la plus grande région électorale : Sikasso. D’où, elle continue à se répandre vers d’autres localités du pays. Créée il y a 3 ans, son influence, intimement liée à celle de son président, Housseini Amion Guindo est grandissante.

Le PDES : Un des dernier-nés des partis nationaux, le PDES est l’enfant terrible de la politique malienne qui dérange tout. Désormais incontournable pour les rendez-vous électoraux de 2012, ce parti, sous la houlette de son pragmatique président, Hamed Diane Séméga, a fauché l’herbe sous les pieds de l’ADEMA et de l’URD sur le terrain de la revendication des œuvres du président indépendant ATT. Afin de disposer de périodes adéquates de réchauffement et d’entrainement pour la houleuse compétition d’avril 2012, ces cinq partis doivent désigner leurs candidats au cours de ce troisième trimestre de l’année, d’ici la fin du mois de septembre.

Le dernier trimestre devant être consacré au processus de mobilisation et de sensibilisation des populations par des prises de contact directes  avec des militants à la base dans toutes les régions du pays. Ce trimestre est aussi et surtout le moment propice à la négociation pour nouer des alliances et fusions afin d’éviter des déchéances.

L’année 2012 doit être considérée par les partis politiques comme un tournant décisif conduisant à la réduction de leur effectif : de la centaine à la dizaine. Ainsi, il y aura une aération de l’espace politique et une importante diminution des coûts qu’imposent ces partis, surtout en période électorale, à un pays pauvre comme le Mali. 

Lancine DIAWARA

 Ecrivain et consultant    en communication.    

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