Pensons à l’amélioration de notre système électoral !

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Moussa MARA
Moussa Mara

Les élections présidentielles sont derrière nous, certes. Mais n’attendons pas 2023 pour nous pencher de nouveau sur notre système électoral et constater que nous avons raté des occasions de le revoir, de manière dépassionnée et en prenant le temps de travailler en profondeur ! Nous devons éviter ce qui s’est passé en 2018 avec la dernière révision du code électoral. L’idéal est donc de travailler en dehors de toutes contingences, à un moment où les enjeux sont éloignés de l’horizon propice à la tranquillité d’esprit des protagonistes. Les autorités doivent intégrer ce fait.

Nous disposons d’une batterie de références pour conduire un processus satisfaisant de réforme électorale. De nombreux articles ont été publiés pour mettre à nu les insuffisances de notre dispositif. Les observateurs des dernières élections, aussi bien les nationaux que les étrangers ont porté des diagnostics quelques fois très précis, assortis de recommandations d’amélioration. À ce titre, le rapport d’observation de l’Union européenne (UE) résume une bonne partie des insuffisances du système électoral qu’il conviendrait de corriger. Il faut penser à travailler avec ce document important et éviter que cette Institution nous le rappelle à nouveau dans quelques années comme il l’a fait en 2017 au sujet de son rapport sur le scrutin de 2013.

Les principaux sujets à aborder sur le chantier de l’amélioration de notre système électoral sont connus des acteurs politiques et des autorités publiques. Il est, de ce fait,  aisé d’engager le processus en intégrant ces chapitres parmi les éléments clés des termes de références de l’exercice.

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La question des organes impliqués dans le processus électoral est à trancher. Nous devons clarifier le débat sur la structure unique à créer pour piloter le processus électoral. Faut-il une entité au sein du Ministère en charge des élections comme l’UE le préconise ou une structure autonome comme souhaité par certains autres acteurs ?

Le fichier électoral est à actualiser pour intégrer les jeunes majeurs et expurger les cas de décès et autres anomalies relevées par l’audit effectué l’année dernière. Nous devons rendre ce fichier plus dynamique et plus souple dans son management afin que les révisions soient prises en compte rapidement. Il est également souhaitable de revoir la distribution des cartes d’électeur afin de limiter les déperditions en la matière. Les cartes d’électeurs distribuées de manière groupée comme, par exemple, au Nord notamment à travers le chef de fraction pour le compte de l’ensemble des membres de la fraction, doivent faire l’objet d’une plus grande attention. Des dispositifs particuliers peuvent être mis en place afin de s’assurer que cela ne se traduise pas par des abus et des attitudes frauduleuses.

Le cas spécifique des candidatures des sortants aux élections, notamment le scrutin présidentiel, est à gérer et fera sans doute couler beaucoup de salives. Ce dossier est délicat, mais il est absolument incontournable si on veut faire faire un bond qualitatif à notre démocratie. Les exemples de Madagascar (démission deux mois avant l’élection), du Cap-Vert (transfert de pouvoir à un suppléant) ou d’autres pays sont des éclairages qui nous aideront à retenir un dispositif qui égalisera, tant que faire se peut, les chances des sortants avec les autres candidats.

La problématique du second tour de l’élection présidentielle est à traiter, car dans le contexte actuel il n’y a pas de campagne ni d’occasion donnée aux électeurs pour éclairer leur choix. Le rapport de force du premier tour est globalement maintenu comme nous l’avons vu en 1992, en 2002, en 2013 et l’année dernière. Il convient d’allonger au moins d’une semaine le vote du second tour et surtout inscrire les débats entre les candidats comme une étape incontournable du processus.

Le passage à l’heure du numérique doit concerner nos opérations électorales. Nous devons ouvrir la voie au vote électronique et, de manière générale, à l’introduction des technologies ayant fait leurs preuves ailleurs, dans notre système électoral pour améliorer les conforts des électeurs et renforcer la sécurité, la transparence et l’intégrité des opérations.

L’Équité en matière d’accès aux médias doit être mieux assurée avec une plus forte implication de la Haute Autorité de la Communication dont les moyens sont à renforcer. La question de la gestion des réseaux sociaux dans les élections, l’encadrement souhaitable de l’intervention du Gouvernement pour les couper ou en limiter l’accès sont aussi des sujets de préoccupation à traiter.

La place de la Cour Constitutionnelle et les implications de celle-ci sont à baliser. La Cour doit faire preuve de plus de transparence au niveau de ses actions et délibérations. Elle doit mieux justifier ses décisions et disposer de plus de moyens pour que ses relais sur le terrain puissent recueillir de meilleures informations. Elle doit être et paraître indépendante et avoir davantage d’inter relation avec la société civile et les observateurs du scrutin. Aux antipodes de ce que nous avons observé en 2018.

De manière générale, la transparence de nos processus électoraux est à améliorer. Nous devons apprendre à publier les textes, éviter les changements intempestifs et les partager avec tous les acteurs. La publication des résultats bureau de vote par bureau de vote, centre par centre et progressivement, au fur et à mesure de la centralisation, la mise à disposition des rapports d’observation (Commission Electorale Indépendante /CENI et autres) avant l’avis de la Cour constitutionnelle sont quelques pistes à explorer.

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Il faut ouvrir les processus électoraux à la société civile malienne et briser le mur de méfiance entre cette dernière et les autorités. Nous devons créer des occasions d’intervention et de responsabilisation des acteurs de la société civile dans la gestion du processus et dans l’observation des scrutins, y compris sur le plan institutionnel.

La question des modes de scrutins est également cruciale. S’il y a moins de contestation du mode de scrutin présidentiel (majoritaire à deux tours) ou local (proportionnel) ; le mode de choix des élus de représentation parlementaire (députés, futurs sénateurs) est sujet à débats. Il faut aborder ce dossier et accepter des réformes profondes assurant une plus grande légitimité des élus et une meilleure représentation des populations.

Deux défis majeurs sont enfin à relever par notre dispositif électoral sur le sentier de la réforme, à savoir celui de la crédibilité des candidatures et du poids écrasant de l’argent dans nos scrutins. Nous devons avoir le courage de traiter ces deux enjeux. Nous ne devons pas avoir peur d’évoquer la crédibilité indispensable des candidatures en explorant les pistes du niveau minimal d’instruction et d’expérience pour exercer un mandat électif. L’hypothèse d’augmenter la caution financière à payer, celle de l’introduction du parrainage des citoyens en plus de celui des élus sont également des voies empruntées ailleurs à examiner par le Mali.

Personne ne doute plus que la question de l’argent dans le système électoral est un grave danger pour notre démocratie et notre pays. Nous devons encadrer fortement la collecte de ressources, l’engagement des dépenses et le dispositif de comptabilité des campagnes avec comme objectif d’instaurer la transparence, mais aussi d’améliorer l’équité entre les candidats.

Moussa MARA

 www.moussamara.com

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