90% de ces manuscrits traitent de Droit Islamique, Traditions du Prophète (S.A.W, Hadiths), Coran et Sciences coraniques, Théologie, Mystique, Histoire, Logique, Grammaire, Divination, Astronomie, Astrologie, Mathématiques, Chimie, Optique, Musique, Poésie, Philologie, Philosophie, Médicine.
II y a des ouvrages fondamentaux, mais aussi des commentaires, des résumés par plusieurs auteurs africains, la vie du Prophète et ses commentaires, la Théologie et ses commentaires. Le Mukhtasir de Khalil et la Rissala de Abi Zayad al Kairouani, Ie Droit Islamique, Ie Sahih de AlBukhari et de Muslim, Hadiths du Prophète sont commentés, résumés, versifiés par des savants de Tombouctou, Djenné, Oualata, Chingueti et d’autres savants africains.
25% des manuscrits sont des consultations juridiques de savants africains, des poèmes en arabe et dans. les langues africaines sonrhaï, tamashek, peul, bambara transcrites en caractères arabes; des actes de mariage, des résolutions de conflit, politique, divorce, vol, actes de commerce, actes de vente d’esclaves, de sel, d’or, correspondances entre souverains, savants, commençants; échanges avec d’autres contrées (Mauritanie, Algérie, Maroc, Tunisie, Lybie, Niger, Nigeria, Sénégal).
L’Université de Sankoré à Tombouctou
Sankoré est une contraction du mot composé songhay «San» (maître) et «Korey» (blanc). Au XVème siècle, Ie grand nombre de lettrés arabes Lemtouna Sanahajiens, anciens refugiés qui avaient fui Sonni Ali Ber, se transportaient à Tombouctou après la ruine de Birou.
IIs s’installèrent au nord du quartier de Badjindé et fondèrent Ie quartier de Birounthie-Kounda. Ils y bâtirent, aux frais d’une grande dame anonyme de la tribu des Laglal, la mosquée de Sankoré en 1433, qui finalement donna son nom au quartier. Les familles pieuses et lettrées des Aqît vivant autour de cette mosquée s’adonnèrent les unes uniquement au culte, au service de Dieu·et de la mosquée. Les autres pratiquaient la justice et fournissaient des magistrats ou Cadis. Un grand nombre se consacrait à l’enseignement.
Les unes et les autres cultivaient les lettres, écrivaient des livres et Tombouctou avait la spécialité du commerce des manuscrits. Tous ces Docteurs devenaient des bibliophiles, des véritables «amants» des livres, recherchant avec passion les œuvres qui leur manquaient. La langue arabe devenait la langue de culture et de communication.
Dès lors, Tombouctou devint un foyer de culture islamique, animé aussi bien par des noirs Soudanais que par des Arabo berbères. Elle ne cessait d’attirer lettrés, étudiants et tous les hommes en quête de savoir. Elle devint finalement un foyer de création et d’inspiration, Ie cadre rayonnant d’une intense vie religieuse, de nombreuses activités scientifiques et l’héritière d’une longue tradition culturelle islamique. Elle fut remplie d’étudiants soudanais, gens de l’Ouest, pleins d’ardeur pour la science et pour la vertu.
La ville offrait déjà un cadre idéal pour l’éclosion d’une université. Elle groupait au niveau de ses principaux quartiers plus de 180 écoles coraniques, totalisant plus de 25.000 étudiants. Dès le début du XIVème siècle, (selon le Tarikh El-Fettach) des Ulémas, jurisconsultes, professeurs, Conseillers politiques, écrivains, historiens, géographes et grammairiens enseignaient tour à tour dans les trois principales mosquées de Djingareï-ber, Sidi Yahia et Sankoré.
L’ensemble de ces écoles, élèves et étudiants, les professeurs, les mosquées, dont Sankoré et l’ensemble des centres d’études et d’enseignement constituent l’Université de Tombouctou, qui a été l’influence entre les grands Centres intellectuel comme Fez, Marrakech, Quaïrouan, d’une part, et Tombouctou d’autre part. Les relations spirituelles avec Ie Maghreb se manifestaient sous plusieurs autres aspects: la prédominance du rite Malékite, les mêmes manuels de jurisprudence, utilisés à Tombouctou comme à Tlemcen et à Fez (Ie Moukhtayar de Khalil et les autres livres de prédication sont les mêmes ici et là).
De même, “l’Etat” Songhai, successeur de “l’Etat” du Mali, adopta un caractère islamique dans sa méthode administrative et dans l’intérêt qu’il porta aux connaissances religieuses. La langue arabe était presque devenue la langue officielle, ou, du moins, l’arabe avait donné une forme écrite aux langues africaines. L’histoire de l’Afrique occidentale fut écrite pour la première fois en arabe par un savant de Tombouctou, Mahmoud Kaati, auteur du Tarikh EI-Fettach, écrit en 1520.
A toutes les époques de son histoire, Tombouctou se signala par la variété des disciplines enseignées par les savants et des livres vendus en abondance par les marchands. On y trouvait d’importantes bibliothèques, composées de livres venus de tous les pays entretenant des relations commerciales et intellectuelles avec la ville. II s’y développa aussi une solide tradition d’enseignement de la langue arabe et de la religion musulmane.
Des marabouts, nombreux et réputés, prirent coutume de se livrer, non seulement à l’enseignement du Coran, mais, entre autres, aux débats théologiques fréquents, aux lectures publiques et aux prêches religieux. Le développement de l’instruction permit à de nombreux lettrés de rédiger des manuscrits sur des sujets variés.
Il est donc permis de penser qu’une partie importante du passé historique de l’Afrique, et même d’autres parties du monde musulman, se trouve sans aucun doute dans les archives de Tombouctou.
Moctar Sidi Yahia, Consultant,
Directeur Bibliothèque AI-Wangary