La question mérite d’être posée, vu leur renoncement à l’option sociale de leur fonction : un sacerdoce. Non seulement ils ont fait table rase de ce qui caractérisait l’enseignant, un combattant pour le triomphe d’une éducation sociale et culturelle progressive, mais ils ont perdu toute considération. Or notre Mali, tout le monde le sait, est tombé dans une décrépitude éducative et culturelle depuis le coup d’Etat militaire de 1968.
Avec la réforme de 1992, on a pensé que les choses changeront littéralement en ce qui concerne l’éducation. Dès la nomination de Monsieur Mamadou Lamine Traoré, comme ministre de l’éducation, un cadre considéré progressiste et démocrate, j’ai signalé au président Amadou Toumani Touré que j’ai écrit trois brochures de morale et d’instruction civique pour les classes de 7ème, 8ème et 9ème années. Le président m’a invité à les soumettre à l’appréciation du professeur d’enseignement rattaché au cabinet de son secrétaire général, lequel professeur les a favorablement appréciés. Le secrétaire général de la présidence les a transmis au ministre de l’éducation qui a répondu disposer de livres de morale en provenance des Etats-Unis. Je signale que j’ai pris connaissance des brochures en question qui ne sont nullement comparables aux miennes.
Le président a décidé de m’apporter une aide pour me permettre de faire imprimer mes livres. Le numéro de mon compte bancaire m’a été demandé et transmis, mais jusqu’à l’heure où je trace ces lignes, mon aide n’est pas encore tombée entre mes mains.
A la suite de la nomination du présent ministre de l’éducation, j’ai appris qu’il y aura des changements profonds dans le redressement du niveau de l’éducation scolaire. J’ai cru devoir profiter de ce renouveau pour soumettre à l’appréciation de monsieur le ministre mes brochures.
Voici la réponse réservée à ma demande : « j’accuse réception de votre lettre datée du 07 Mai 2011. Je tiens à vous informer que notre nouvelle politique de manuel scolaire et de matériel didactique prône la privatisation de la chaîne du livre, par conséquent la validation de tout manuel scolaire pour nos écoles, doit nous être soumise par une maison d’édition nationale. J’ai toujours pensé que c’est une commission nationale d’enseignants qui a décidé de la valeur des livres et des programmes.
Suite aux conclusions de l’analyse de mes services compétents, j’ai le regret de vous signifier qu’au regard des observations sur le contenu desdits ouvrages (observations que j’ignore jusqu’ici) leur utilisation ne peut être autorisée dans nos écoles car ils ne correspondent ni au programme classique, ni au niveau curriculum de l’enseignement fondamental.
Tout en saluant votre souci de contribuer à l’amélioration de la qualité des apprentissages scolaires pour la production d’ouvrages pédagogiques, en application des nouvelles dispositions de la nouvelle politique nationale du manuel scolaire, je vous prie d’accepter, monsieur le directeur mes sentiments de franche collaboration ».
Je suis tout disponible à cette collaboration que je ne vois point venir.
Voilà comment nos cadets encouragent les heureuses initiatives de leurs aînés.
NB : je fais remarquer à ceux qui ont eu la mission d’examiner mes brochures :
1) qu’il est interdit à un lecteur de surcharger les documents soumis à son examen ;
2) que s’il a des observations à faire, il les porte sur un papier joint au document. C’est un comportement de correction, courtoisie et de considération à ne pas violer.
Sididié Oumar Traoré
Professeur d’enseignement secondaire général en retraite
Membre de la commission de réforme 1960-1962