L’attentat d’Almoustarat revendiqué par Al Mourabitoune en juillet 2014 rappelle que la principale menace terroriste reste incarnée par l’algérien Mokhtar Belmokhtar. Au même titre que l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) a ringardisé Al Qaida en établissant le califat en Irak, Mokhtar Belmokhtar ne cesse de faire de l’ombre à AQMI, et à Abdelmalek Droukdel, son ennemi de toujours. Les archives retrouvées au nord du Mali par différents journalistes depuis 2013 attestent que Belmokhtar dérange au sein de l’ex-GSPC. Une nouvelle information parvenue de Libye pourrait ne pas améliorer ces relations : Belmokhtar serait sur le point d’être nommé Émir du Sahel par l’EIIL. De récentes réunions organisées dans les environs d’Oubari et de Ghat entre des proches de « Mr Malboro » et certains émissaires du Calife Al-Baghdadi visaient à préciser le rôle de Belmokhtar dans la nouvelle organisation terroriste.
Cette redistribution des rôles risque d’avoir d’importantes conséquences dans la constellation jihadiste du Sahel. Au même titre que l’EIIL a fait savoir aux fidèles qu’ils n’avaient d’autres choix que de se soumettre à lui, Belmokhtar devrait logiquement réclamer d’AQMI que le groupe terroriste lui prête allégeance. Autrement dit, la nomination de Belmokhtar pourrait fragiliser durablement AQMI, qui n’est déjà plus que l’ombre de ce qu’elle était depuis la mort d’Abou Zeid. Une source réputée proche d’AQMI au Mali affirme d’ailleurs que l’organisation anticipe cette nomination de Belmokhtar et ne restera pas sans rien faire… La guerre larvée entre AQMI et Belmokhtar devrait donc reprendre de plus belle.
Autre conséquence notable, que deviendront les alliés actuels de Mokhtar Belmokhtar au Mali ? Chez nous, il est désormais de notoriété publique que le cadre d’Al Mourabitoune reçoit un appui logistique et financier des Arabes lemhar de Gao comme Yoro Ould Daha, Cherif Ould Taher ou Rougy, tour à tour membres du MAA pro Bamako, du MUJAO ou d’Al Mourabitoune. Ces mêmes Arabes, guidés par la protection de leurs trafics illicites, n’hésitent d’ailleurs pas a se réclamer de l’État malien au risque de salir l’image du régime du Président IBK accusé en retour de sponsoriser le terrorisme et le narcotrafic au Sahel… L’une des conditions de la nomination de Belmokhtar comme émir de l’organisation terroriste la plus radicale serait qu’il mette un terme à son alliance opportuniste avec ces trafiquants de drogue. Sa nomination étant synonyme d’autonomie financière, le chef terroriste n’aurait donc plus besoin d’eux pour financer son combat et pourrait donc, au nom de l’Islam, se retourner contre eux…
Kassim Arouna