Malivaleurs : Ecrire notre ancêtre

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Ismaél Samba Traoré

Beaucoup de gens ont déjà posé les questions suivantes à des proches :

Qui étaient mes grands-parents ? Arrière-grands-parents ? D’où venaient-ils avant de s’établir ici ? Comment s’est déroulée leur vie ? Quelle est l’histoire plus globale de mes familles paternelle et maternelle, de mon campement,  de mon village, de mon quartier ?

Dans une société malienne caractérisée par la rupture de la chaîne de transmission du savoir traditionnel, très peu de jeunes ou d’adultes peuvent répondre à ces questions.

 

Le Mouvement lance une compétition en direction des écoles pour les juniors, des universités et de l’ensemble de la société pour les séniors. L’opération invite les personnes intéressées à entreprendre des investigations dans leurs familles et leurs milieux et à présenter leurs résultats sous forme écrite, de taille variable.

Les meilleures contributions seront appréciées par un jury composé de chercheurs. Les contributions primées seront accompagnées par des chercheurs et écrivains expérimentés pour approfondir la recherche et l’écriture. Des docu fictions pourraient être réalisés.

 

Le Mali se trouve à la tête de la plus importante bibliothèque précoloniale d’Afrique au sud du Sahara, à travers ce qu’il est convenu d’appeler « les manuscrits de Tombouctou ». En dépit de ce patrimoine, les maliens nés au cours des soixante dernières années ne se sont pas distingués comme chercheurs et écrivains capables de documenter leur société.

La période coloniale a déployé des administrateurs-chercheurs qui ont construit le schéma de l’ethnologie et l’historiographie coloniales et produit de nombreux ouvrages, dont certains mériteraient d’être remis en question. La même période coloniale a formaté des hommes de culture comme Moussa Travélé, Amadou Ampathé Bâ, Fili Dabo Sissoko, Seydou Badian Kouyaté, Bakary Kamian, Youssouf Tata Cissé, Yambo Ouologuem, Massa Makan Diabaté, etc. Depuis, très peu de figures marquantes ont émergé. Nos sociétés, nos traditions, notre histoire contemporaine n’ont pas fait l’objet d’une documentation continue.

 

Il est admis que cette société malienne est de plus en plus caractérisée par quelques carences, perceptibles à travers trois constats.

Premier constat, la génération produite par l’école coloniale n’a pas beaucoup écrit : ni sur les évènements politiques, ni sur la société. Tout un pan de l’histoire contemporaine attend d’être documenté. Il existe par exemple peu ou pas de biographies d’acteurs célèbres qui ont joué des rôles de premier plan et dont le récit de vie permet de lire la trame de l’histoire contemporaine.

Deuxième constat, après les travaux remarquables de l’école ethnologique coloniale et de ses continuateurs (l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, les écoles anglo-saxonnes et américaines) les universitaires maliens n’ont pas publié de travaux en nombre significatif. La bibliographie malienne se ressent d’un grand vide sur les problèmes contemporains, à la différence des autres pays africains où les universitaires ont beaucoup produit. Même Kurukanfuga qui fait débat aujourd’hui est inspiré par des chercheurs et écrivains guinéens (Tamsir Niane) sénégalais (Cheick Hamidou Kane) etc.

Troisième constat, les groupes statutaires qui ont assuré la transmission des savoirs depuis plusieurs siècles achèvent de se décomposer. Les cadres familiaux, cultuels et institutionnels de transmission s’effritent. Les écoles de tradition orales disparaissent. Toutes choses qui font dire aux historiens maliens et africains qu’il y’a une rupture irrémédiable dans la chaîne de transmission.

 

L’opération Ecrire notre ancêtre vise à documenter et écrire l’histoire sociale des 50 ou 100 dernières années, en réponse à toutes les contraintes décrites. Ce faisant, l’opération va faire un maillage complet qui rende compte de la diversité qui est la réalité de l’école, du quartier, du village, de la commune…du Mali de toujours. En se donnant comme objectifs de documenter la diversité sociale et ethno culturelle, nous entendons susciter de manière participative des écrit sur le Mali contemporain, écrits qui vont appuyer la lecture-écriture à l’école et dans la communauté.

Ce faisant nous aiderons les maliens à connaitre leur passé récent et à cultiver la tolérance dans la diversité. La lecture pourrait connaître un regain d’intérêt à travers des sujets qui passionnent les lectorats.

 

Le Mouvement Malivaleurs est né en Janvier 2009. C’est un regroupement de consultants, chercheurs et écrivains, de collectifs de jeunes, collectifs de médiateurs, associations qui opèrent pour tenter de faire du Mali un pays apaisé où des valeurs comme la démocratie, la laïcité, le respect des institutions, le respect du bien public, le respect de l’autre, la tolérance inspirent la gouvernance et le comportement du citoyen.

Par Ismaila Samba Traoré, Président du Mouvement Malivaleurs

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