«Le 21 mars 2012, l’Etat s’est effondré comme un château de cartes à la suite du coup d’Etat dont un simple capitaine avait pris la tête. La «communauté internationale» s’est émue, au bout de quelques mois, la France est intervenue, les institutions régionales et internationales ainsi que plusieurs pays africains ou européens se sont manifestés, et finalement des élections présidentielle et législatives ont été organisées dès 2013. La démocratie au sens ou l’entend la «communauté internationale», était rétablie ! Mais où en est-on aujourd’hui ? L’Etat s’est-il reconstruit ? Comment fonctionne-t-il ?».
On peut comparer la Nation à une famille. Il suffit de naître pour appartenir à l’une et à l’autre. On n’imagine pas qu’on aurait pu appartenir à une autre ; si malheureux que soient notre pays et notre famille, nous ne voudrions pas en changer ; tout ce qui les touche nous touche ; nous sommes curieux de leur passé et nous les voulons heureux maintenant et dans l’avenir. Tout cela naturellement, et d’autant plus que nous les connaissons mieux. Tous les hommes doivent aimer leur patrie, mais beaucoup ne le savent pas. Ils ne le sentent que si elle leur manque, que si elle est menacée. Ainsi les enfants découvrent qu’ils aiment leur maman quand elle n’est plus là ou quand elle peut leur manquer !
Le pays que l’on aime mieux que tous les autres, voilà la Patrie. Elle ressemble à une maison paternelle très agrandie. On ne peut naturellement pas demander à un petit enfant d’aimer sa grande patrie : il ne sait pas ce que c’est. Il l’aimera au fur et à mesure qu’il la découvrira.
Auparavant, il aime ses petites patries : de sa maison, son amitié gagne ensuite son village, le pays dont ses yeux peuvent chaque jour faire le tour. L’école lui montre en images et sur les cartes la figure du Mali elle lui en raconte l’histoire ; elle lui apprend le nom et l’œuvre des grands empereurs du Mandé, des grands Maliens. Le Mali devient pour lui une sorte de personne qu’il connaît de mieux en mieux.
Les voyages lui mettront sous les yeux l’étendue de ses localités, leur variété, leur richesse, leur beauté. Et s’il va à l’étranger, c’est là qu’il sentira combien son pays lui manque ; à chaque pas qui l’en rapprochera, son plaisir et son émotion grandiront. Il a donc une petite et une grande patrie. Le «chez nous», c’est aussi bien la maison et le pays natal. L’amitié que l’on a pour l’une ne nuit pas à l’autre, au contraire. Cette amitié s’appelle le patriotisme.
Le patriotisme se forme lentement dans le cœur et il annonce sa présence de bien de façons : plaisir d’entendre les «anciens» raconter leurs souvenirs, de lire l’histoire de nos grands hommes ; tristesse en présence des malheurs du pays, de ses erreurs aussi ; fierté heureuse quand on l’admire, fierté blessée quand on la critique ; inquiétude quand on la sent en danger ; tout cela, c’est du patriotisme.
Quand on aime son pays, on lui veut du bien, on veut son bien. Il ne servirait de rien de crier «Vive le Mali !», de chanter l’hymne de notre pays (A ton appel Mali) et d’agiter des petits drapeaux, si on devait en rester là. La Patrie a le droit de dire comme la maman : «Si tu m’aimes, obéis-moi, aides-moi». Le patriote n’attend donc pas que son pays soit en danger pour le servir et le défendre. On pourrait dire surtout que c’est pendant la guerre que se montre l’amour de la Patrie.
Mais hélas ! L’argent aurait ôté le patriotisme du cœur des Maliens. Lorsque le patriotisme disparait chez le peuple, le gouvernement fait ce qui lui plait. Force est de reconnaître que le peuple doit avant tout demander à l’Etat la paix, celle du dedans et celle du dehors. L’Etat doit assurer la paix entre les Maliens, protéger les honnêtes gens contre les voleurs et les violents, dire qui a droit quand survient un désaccord. Voilà pourquoi il y a des gendarmes et des juges, une police et une justice. Il doit être prêt à défendre le Mali contre l’attaque d’une autre nation. Cela explique l’existence d’une force militaire : armée, marine, aviation.
Quand la patrie est en danger, lorsque l’unité de la patrie est menacée, lorsque les chefs font des erreurs, le silence devient lâcheté, dixit le sage de «Sous l’orage».
Seydou TOURE, Enseignant