En réalité, ce que nous appelons démocratie n’est qu’un masque destiné à permettre à ceux qui trouvent les moyens de financer une campagne électorale, d’accéder au pouvoir.
Ces moyens sont volés au peuple, sous une forme ou une autre, et on pousse le cynisme jusqu’à demander à ce même peuple de désigner celui qui aura l’honneur de le plumer « légitimement », c’est-à-dire en son nom.
Une fois installés, ils s’empressent d’en faire profiter ceux qui n’ont aucun mérite à être fils de, voisin de, beau-père de, ou commerçant financier d’une campagne devenu conseiller spécial de cette oligarchie kleptocrate exerce une tyrannie par le népotisme pour imposer par la force une organisation destinée à faire du Mali sa propriété privée.
Mais une tyrannie tout en douceur car il ne faut pas, n’est-ce pas, froisser une communauté internationale qui tient au respect de la forme démocratique pour ne pas, à son tour, froisser sa propre opinion publique.
L’essentiel est de pouvoir continuer à se shooter à une Aide qui, sans effort ni talent ou génie particuliers, permet à quelques médiocres de s’engraisser rapidement et injustement en asservissant la population, …, et en bradant les richesses du pays en vue d’assouvir des fantasmes de puissance à la hauteur de l’impuissance de leur médiocrité si terriblement humaine.
Il était une fois un Peuple, un But, une Famille.
Le Keita Ka Klan (KKK) est une organisation de suprématie familiale du Mali. Classée supposément à gauche sur l’échiquier politique malien, c’est une organisation de défense et de lobbying des intérêts familiaux : le KKK prône la suprématie du CLAN (Compagnie des Liquidateurs Associés de la Nation) sur le peuple. Rappelons que le CLAN est une triade composée des fossoyeurs de la République : politiques, douaniers et commerçants.
L’oligarchie : une démocratie sans le peuple
Le KKK est d’abord oligarque, la démocratie n’étant qu’un prétexte pour accéder et formaliser son pouvoir.
L’oligarchie est un système politique dans lequel un petit nombre d’individus ou de familles, une classe sociale restreinte et privilégiée, s’accapare le pouvoir.
Au Mali, ce système oligarchique se perpétue de régime en régime, en dépit des soubresauts politiques qui le secouent de temps à autre. En effet, le Malien accepte son sort de « mouton qui se laisse tondre la laine sur le dos » avec patience parce qu’il nourrit l’espoir fou, un jour, de ramasser les miettes du pouvoir auquel aura accédé un homme de son clan.
Ce n’est ni nouveau, ni spécifique au Mali puisqu’en 1862, Flaubert écrivait dans « Salammbô »[1] : « Bien que la puissance et l’argent se perpétuassent dans les mêmes familles, on tolérait l’oligarchie, parce qu’on avait l’espoir d’y atteindre ». Huit ans plus tard, en 1870, une guerre (franco prussienne) balayait le Second Empire de Napoléon et installait la Troisième République qui sera elle-même emportée par la Seconde Guerre Mondiale.
Méfions-nous des guerres car un jour en haut, le lendemain au cachot, l’Histoire est si imprévisible…
Revenons à nos oligarques nationaux bien prévisibles, eux, en revanche. Il existe deux types d’oligarchie : les oligarchies institutionnelles et les oligarchies de fait. Les oligarchies institutionnelles sont les régimes politiques dont les constitutions et les lois réservent le pouvoir à une minorité de citoyens. Les oligarchies de fait sont les sociétés dont le gouvernement est constitutionnellement et démocratiquement ouvert à tous les citoyens mais où, de fait, le pouvoir est confisqué par une petite partie de ceux-ci. Vous devinez à quelle catégorie appartient notre oligarchie. Puisqu’il faut bien respecter le diktat de la Communauté internationale pour rester sous perfusion de l’Aide, cette drogue internationale qui nous conduit inexorablement vers une néo colonisation de fait, nous avons opté, au Mali, pour une oligarchie de fait. Mais pas n’importe quelle oligarchie : l’oligarchie kleptocrate.
Du grec « kleptos » (voleur) et « kratos » (pouvoir), la kleptocratie désigne un système politique où une ou des personnes à la tête d’un pays, pratiquent à très grande échelle la corruption et la captation des richesses nationales au détriment de la population.
On connaît l’exemple de la famille Trabelsi en Tunisie (encore une histoire de belle-famille), et de la Russie de l’ère Eltsine (une conversion à l’ultra libéralisme soutenue par les institutions internationales et les pays occidentaux, qui entraîna le bradage des actifs publics au profit des amis d’Eltsine).
En Tunisie, la surprise du printemps arabe a contraint la famille Ben Ali – Trabelsi à l’exil.
En Russie, Poutine a contraint les oligarques à ne plus se mêler de politique : ceux qui ne l’ont pas écouté se sont retrouvés en prison tandis que d’autres ont préféré l’exil… Le pouvoir et l’argent ébranlés par ce que personne n’a vu arriver : un peuple éduqué « ras le bolisé » et un homme perçu comme manipulable par ceux qui l’ont porté au pouvoir mais qui s’est révélé encore plus avide de pouvoir qu’eux.
Méfions-nous des hommes car un jour courbés, le lendemain au sommet, l’Histoire est si imprévisible…
Néanmoins, relativisons un peu dans le cas du Mali car nous, Maliens, sommes loin d’être tous suffisamment éduqués pour miser sur une « révolution internet » et nous n’avons plus de sociétés d’Etat à vendre depuis fort longtemps…
Mais reconnaissez quand même que nous sommes très forts: nous utilisons les principes démocratiques prônés par l’Occident pour installer à la barbe du monde et des Maliens un système digne de la Russie d’Eltsine. Nous n’avons plus de sociétés d’Etat à vendre certes, mais nous avons, par exemple, de l’or qui ne brille pas pour tous les Maliens. Et encore, le Mali n’a pas révélé toutes ses richesses… Patience et bientôt les Wade du Sénégal et autres Obiang de Guinée Equatoriale feront figure de petits pilleurs tandis que les Maliens continueront de conjuguer la misère par tous les temps, au présent et au futur.
Il y a 24 siècles, Aristote (384-322 A. J.-C.) écrivait qu’ «Il est aussi dans l’intérêt d’un tyran de garder son peuple pauvre, pour qu’il ne puisse pas se protéger par les armes, et qu’il soit si occupé à ses tâches quotidiennes qu’il n’ait pas le temps pour la rébellion». Rien de bien nouveau sous le soleil.
En réalité, ce que nous appelons démocratie n’est qu’un masque destiné à permettre à ceux qui trouvent les moyens de financer une campagne électorale, d’accéder au pouvoir.
Ces moyens sont volés au peuple, sous une forme ou une autre, et on pousse le cynisme jusqu’à demander à ce même peuple de désigner celui qui aura l’honneur de le plumer « légitimement », c’est-à-dire en son nom. Une fois installés, ils s’empressent d’en faire profiter ceux qui n’ont aucun mérite à être fils de, voisin de, beau-père de, ou commerçant financier d’une campagne devenu conseiller spécial de. cette oligarchie kleptocrate exerce une tyrannie par le népotisme pour imposer par la force une organisation destinée à faire du Mali sa propriété privée. Mais une tyrannie tout en douceur car il ne faut pas, n’est-ce pas, froisser une communauté internationale qui tient au respect de la forme démocratique pour ne pas, à son tour, froisser sa propre opinion publique. L’essentiel est de pouvoir continuer à se shooter à une Aide qui, sans effort ni talent ou génie particuliers, permet à quelques médiocres de s’engraisser rapidement et injustement en asservissant la population, ceux qui ne font pas partie du KKK, et en bradant les richesses du pays en vue d’assouvir des fantasmes de puissance à la hauteur de l’impuissance de leur médiocrité si terriblement humaine.
La démocratie ou les nouveaux oripeaux de la dictature
Vous pensez que la tyrannie et la dictature passent par la violence bruyante du bruit des bottes et des balles ? Les temps ont changé mes amis, les hommes ont appris et affûtent des armes autrement plus insidieuses et efficaces. Chef d’œuvre de la littérature d’anticipation écrit en 1932 par un Aldous Huxley visionnaire, le « Meilleur des mondes » [2] décrit ce que serait la dictature parfaite : la réalité a, encore une fois, dépassé la fiction.
Extraits.
« Pour étouffer par avance toute révolte, il ne faut pas s’y prendre de manière violente. Les méthodes du genre de celles d’Hitler sont dépassées. Il suffit de créer un conditionnement collectif si puissant que l’idée même de révolte ne viendra même plus à l’esprit des hommes. L’idéal serait de formater les individus dès la naissance en limitant leurs aptitudes biologiques innées.
Ensuite, on poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle. Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité et plus sa pensée est bornée à des préoccupations médiocres, moins il peut se révolter. Il faut faire en sorte que l’accès au savoir devienne de plus en plus difficile et élitiste. Que le fossé se creuse entre le peuple et la science, que l’information destinée au grand public soit anesthésiée de tout contenu à caractère subversif. Surtout pas de philosophie. Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser.
On mettra la sexualité au premier rang des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux. En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté.
Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur – qu’il faudra entretenir – sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur. L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est : un veau, et il doit être surveillé comme doit l’être un troupeau. Tout ce qui permet d’endormir sa lucidité est bon socialement, ce qui menacerait de l’éveiller doit être ridiculisé, étouffé, combattu. Toute doctrine mettant en cause le système doit d’abord être désignée comme subversive et terroriste et ceux qui la soutiennent devront ensuite être traités comme tels. On observe cependant, qu’il est très facile de corrompre un individu subversif : il suffit de lui proposer de l’argent et du pouvoir »…
« …La dictature parfaite serait une dictature qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s’évader. Un système d’esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l’amour de leur servitude … ».
Le Nord peut se perdre, le KKK, lui, ne perd pas le Nord
Messieurs les membres du KKK, vous ne pouvez pas, d’un côté, offenser la vertu en pratiquant allègrement le népotisme et, de l’autre, à travers des déclarations enflammées et tonitruantes sur la lutte contre la corruption, inviter vos concitoyens à plus de vertu.
Vous ne pouvez pas, d’un côté, servir grassement votre CLAN au seul mérite qu’il porte votre marque et, de l’autre, chanter le véritable mérite et exhorter votre peuple au travail.
Ils ont été nombreux à croire en vous et espérons qu’ils ne seront pas aussi nombreux à être déçus. Depuis votre sacre international, vous voguez de pays en pays, mais de quand date votre dernière visite à Sabalibougou, Kayes, ou Gao ? Vous rencontrez émirs et souverains, mais de quand date votre dernière rencontre avec le peuple malien ? Vos conseillers ne sont ni les payeurs, ni le peuple. En revanche, celui qui paie et qui peut vous dire ce dont il a besoin, c’est le peuple malien.
Vous voulez savoir pourquoi ce peuple se meurt ?
Juste une petite anecdote : un entrepreneur qui vend un système qui permet d’économiser l’énergie consommée par les climatiseurs et d’augmenter leur durée de vie de façon conséquente, s’en va proposer cette innovation au DAF d’un Ministère. Après avoir patiemment écouté l’entrepreneur, le DAF lui répond : « Mais si nous ne pouvons plus changer les climatiseurs tous les cinq ans, de quoi allons-nous vivre ? ». On ne sait pas ce qui est le plus terrible dans cette réponse : son cynisme ou sa naïveté.
Ce Malien, en volant l’argent destiné aux Maliens, a-t-il conscience d’être directement responsable de la mort d’autres maliens en les empêchant de se soigner, d’aller à l’école, de travailler, de disposer de latrines, de manger ?
Est-ce que le fait que son frère ou son père soit un assassin l’autorise à tuer à son tour, sans se poser de questions ?
A t’-il abandonné toute trace d’humanité pour devenir définitivement le veau sans conscience ni cerveau décrit par Huxley ?
Il vous répondra qu’il n’a pas le choix. Mais si, il a le choix, tout le monde a le choix, y compris celui de ne pas choisir et de subir.
Fonctionnaires, si vous n’êtes pas satisfaits de vos conditions, vous avez au moins deux solutions :
- au lieu d’étouffer la liberté d’entreprendre, créez votre entreprise et réconciliez-vous avec le travail,
- au lieu de racketter plus pauvres que vous, organisez-vous pour réclamer des améliorations et réconciliez-vous avec le courage.
Les retournements inattendus de l’Histoire nous rendent optimistes et avec Aldous Huxley, nous pensons qu’« Il reste encore quelque liberté dans le monde. Peut-être les forces qui la menacent sont-elles trop puissantes pour que l’on puisse leur résister très longtemps. C’est encore et toujours notre devoir de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour nous opposer à elles. »
Bon appétit les KKKs, le peuple malien vous salue de bien bas, là où vous l’enfoncez inexorablement… Vous pouvez nicher sur l’Himalaya, ne croyez pas que cela vous grandisse.
Méfions nous des sommets but d’une vie à atteindre, car chute un jour toujours à craindre: l’Histoire est si imprévisible…
Aida H. Diagne
aidah.diagne@gmail.com