Les maliens s’indignent et réclament une nouvelle République du Mali : « O Mali d’aujourd’hui, O Mali de demain… »

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Il faut que beaucoup de choses se passent pour qu’un pays comme le Mali soit à la une de tous les médias internationaux ! Je m’exprime à travers cette note pour répondre à l’appel du Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP) et en ma qualité de jeune chercheur socio anthropologue malien. Le  mardi 18 Aout 2020 ou Tarataw la tarata, comme il a été nommé par certains en jubilant, fut le résultat de l’indignation des citoyens et des officiers militaires maliens qui se sont levés contre la mauvaise gouvernance et le manque de justice sociale qui minait le régime d’Ibrahim Boubacar Kéita. Ce déficit de gouvernance sévissait de facto bien avant l’élection démocratique de ce dernier parce que son prédécesseur a été frappé par la même indignation. Le coup d’État de 2012 contre le régime du président Amadou Toumani Touré avait déjà été le résultat des mêmes symptômes déjà évoqués plus haut.

Alors la question qui intrigue face à cette situation est : qu’a-t-elle apporté cette démocratie qui fut instaurée en 1992 ? Si la démocratie est communément définie comme le gouvernement par le peuple, on ne peut que saluer l’indignation du peuple malien contre les phénomènes sociaux qu’il dénonce. Je salue la diligence du M5 RFP pour le rassemblement, en son sein, d’une multitude de mouvements sociaux de base, d’associations et coordinations d’associations,  et de certains membres de la classe politique malienne.

La vacance du pouvoir obtenue grâce aux officiers militaires du CNSP et confirmée par le président sortant lui-même, il faut maintenant l’assumer et surtout de relever le défi que l’on s’est nous même lancé.

Est-ce que les civiles indignés savaient que les officiers militaires s’indignaient également ? Cette interrogation apparait ici à juste titre pour la simple raison qu’elle est la base de comment la nouvelle république du Mali sera constituée. De mon humble point de vue de jeune chercheur malien et socio anthropologue, j’observe que l’entrée de jeux des officiers militaires, bien qu’appréciée par les maliens dans leur grande majorité, est arrivée à l’insu de tous ceux qui se sont mobilisés depuis juin 2020.  C’est à dire qu’il n’y a pas eu la moindre coordination avec l’opposition civile mobilisée. On pourrait bien expliquer que les opérations militaires soient caractérisées par les secrets militaires. Cependant, vue la démarche et l’approche adoptées par le CNSP, il va sans dire que la confiance mutuelle devrait être établie pour la confection participative de cette nouvelle république.

„Joli tɛ suma nɛ kan“ dit-on au Mali !  Si une plaie ne peut guérir, tant qu’il y a du pus, un mea culpa de tous les maliens est donc indispensable pour mieux avancer. Il est plus facile de critiquer l’autre. Ce qui est évident, est que le malien (dirigeant et dirigé) doit accepter de travailler pour construire son pays. La vérité, justice et réconciliation constituent un processus impératif et préalable de consolidation de la paix et aux fondements d’un nouveau contrat social représentatif au Mali. Avec des Maliens travailleurs, intègres, responsables, exemplaires et transparents le Mali peut se relever et redevenir l’exemple en Afrique.

En ce moment, le CNSP négocie avec les citoyens afin de façonner la transition politique. Pour se faire, la proposition du dialogue inclusif national par le Comité National pour le Salut du Peuple est une opportunité idoine à saisir. C’est cette opportunité qui a été ratée depuis 2012 et avec la multiplicité des dimensions de la crise (djihadisme, rébellion, manifestations et mutineries entre autres) et l’affluence des forces internationales «au secours » du Mali, les maliens se sont noyés dans un verre d’eau. Ce qui a conduit, je l’ai dit en 2012 à Berlin lors de la discussion des experts à laquelle j’ai eu l’honneur de participer, à la somalisation[1] de toute la région de l’Afrique de l’Ouest. La déstabilisation structurelle du Mali, qui est géographiquement au cœur de cette région, déstabilise toute l’Afrique de l’ouest.

Il serait souhaitable de se concentrer sur une approche autarcique, unificatrice et autosuffisante pour la refondation de la république du Mali. La concertation de la communauté internationale ne devrait pas primer sur la concertation nationale. Au Burkina Faso voisin en 2014 la chute de Blaise Compaoré et la transition politique ont été obtenue dans les négociations entre Burkinabè. Il faut que le malien s’émancipe en ayant  confiance en soi et se mettant au travail de rigueur.  Cela demande une bonne éducation dans les familles. Nous aimons dire que nous descendons d’un peuple fier doté d’un passé glorieux et d’une civilisation ancienne des grands empires. En socio anthropologue malien, j’en suis bien conscient. Mais est ce qu’il suffit de le dire ? L’embargo de la CEDEAO et de l’OIF doivent plutôt pousser les maliens à travailler et à compter d’abord sur eux-mêmes.

Je souhaite que le Mali soit un pays qui fasse confiance à ces fils et filles. Je rappelle qu’il y a plein de maliens intègres et compétents tant au Mali qu’à la diaspora. La nouvelle république devrait appeler tous les maliens à œuvrer pour la servir. Évidemment, elle doit au préalable prendre des mesures légales et justes avec eux. Des mesures qui les rassurent et leur offrent de bonnes conditions de travail. Selon le fameux slogan : ‘mettre l’Homme qu’il faut à la place qu’il faut’ ils et elles doivent être recrutés sur les critères de compétences et de mérite pour forger et développer l’excellence.

Que Dieu nous assiste à refonder un Mali uni et prospère!

Dr. Lamine Doumbia

Socio anthropologue

Chargés de recherches postdoctorales

Institut Historique Allemand (IHA)

Centre de Recherches sur les Politiques Sociales (CREPOS)

E-Mail : fakoly.doumbia@gmail.com

Tel.: 00221 776117321

Auteur de l’ouvrage : Doumbia, Lamine (2018) : Une sécurisation foncière urbaine dans l’impasse – exemple de Bamako, Mali, Cologne : Rüdiger Köppe Verlag.

[1] https://www.dw.com/en/mali-if-mali-becomes-another-somalia-the-entire-region-will-be-affected/a-16151455

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3 COMMENTAIRES

  1. Ma Propositions

    – Un Président de Transition consensuel ;
    – Un Gouvernement de Transition de taille réduite (25 membres au plus conformément au DNI) dirigé par un Premier ministre consensuel ;

    Le Président de la Transition doit être jeune (30 à 45 ans), il doit être une personnalité disposant d’une expérience confirmée dans la gestion d’État (connaissance avérée du fonctionnement de l’Administration d’État et des relations internationales). Il doit être une personnalité jouissant d’une bonne moralité et d’une respectabilité établie.
    De préférence, le Président de la Transition doit être un civil, afin de donner un signal fort quant à l’engagement du CNSP à assurer une transition civile et corriger l’image de notre pays vis-à-vis de l’extérieur.

    Le Premier ministre, Chef de Gouvernement doit être aussi choisi selon les mêmes critères que le Président de la République.

    Les Départements ministériels du Gouvernement de transition en charge des questions de défense et de sécurité, des questions liées aux réformes politiques et institutionnelles devraient être priorisés dans l’allocation des ressources et faire l’objet d’un suivi étroit.

    La transition ne doit pas excéder douze (12) mois, en mettant le focus sur les réformes, indispensables à la tenue d’élections générales crédibles et transparentes. Lesdites élections consacreront la fin de la transition. Le peuple doit accompagner le gouvernement pour la bonne marche de la transition au Mali.

    Billy Traore

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