Les critères primordiaux de choix du futur président de la République : La probité, la rigueur et la compétence

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Au regard de l’état de délabrement de notre pays sur tous les plans, nous avons le devoir d’élire un président de la République intègre, propre, au dessus de tout soupçon ; un président capable de monter sur l’arbre de la transparence et «de jeter la pierre».

En faisant abstraction du régime autocratique de Moussa Traoré, le Mali des vingt dernières années de démocratie multipartite offre le spectacle désolant suivant:
1)                  Diagnostic sommaire de la décadence d’un Etat :
–                     Le vain sacrifice des martyrs :
L’avènement de la démocratie au Mali s’est opéré dans un bain de sang avec des centaines de martyrs tombés sous les balles d’un régime répressif. Le peuple s’était légitimement laissé bercer dans une espérance de changement imminent, hélas, mal lui en a pris, il a été vite confronté – après une transition circonscrite dans une durée (de 14 mois) respectée par le désormais ex-soldat de la démocratie – à une violente contestation postélectorale ; deux Premiers ministres furent grillés (Younoussi Touré et Abdoulaye S. Sow).
Un troisième (Ibrahim B. Keïta) dur à cuire, a pu apporter une certaine stabilité sociopolitique en embastillant tous azimuts les contestataires d’alors (leaders politiques et estudiantins), à la suite de l’une des élections présidentielles les plus contestées de l’histoire contemporaine du Mali, confiée à une Commission électorale nationale indépendante (Ceni) dont le budget a défrayé la chronique, en son temps (environ 17 milliards de Fcfa).
Il faut rappeler que l’Aeem a joué un rôle historique dans l’avènement de la démocratie dans notre pays.
–                     La décrépitude de l’école malienne :
Depuis qu’elle a siégé au sein du Conseil transitoire pour le salut du peuple (Ctsp) pendant la transition (1991 à 1992), à tort ou à raison, l’Association des élèves et étudiants du Mali (Aeem) n’a cessé d’être instrumentalisée par différents acteurs politiques, à travers des bourses d’étude à l’étranger octroyées à certains de ses leaders, et l’affectation, sans coup férir, de postes à d’autres, au sein de l’administration publique ; la majorité silencieuse des élèves et étudiants était ainsi sacrifiée sur l’autel de la violence et de la médiocrité au sein des établissements scolaires.
Cette pratique du nivellement par le bas n’a cessé de faire des émules parmi les étudiants qui ont fini par intégrer la conviction selon laquelle le moyen le plus sûr de décrocher un poste de «chargé de mission» ou de fonctionnaire tout court est de jouer à l’activiste au sein de l’Aeem.
C’est dans ces conditions que l’école malienne a été mise en lambeau ; du coup, tous les moyens s’avèrent bons pour s’aliéner les faveurs de cette association.
Au même moment, l’école a été assassinée par l’introduction généralisée de l’achat des sujets d’examens, des notes d’examens, des notes de soutenances avec comme point d’orgue l’achat systématique des diplômes à tous les niveaux d’enseignement.
Ces pratiques ne pouvaient que déteindre, principalement,  sur la qualité des ressources humaines au niveau de la Fonction publique.
–                     L’achat des concours de la Fonction publique comme fonds de commerce rentable:
La déliquescence de notre Etat est due, en partie, à la multiplication des fonctionnaires fantoches ayant acheté le concours d’entrée à la Fonction publique en espèces sonnantes et trébuchantes, avec comme conséquence, en plus du manque criard de niveau, la volonté inébranlable de ces fonctionnaires atypiques de rentabiliser leurs investissements (retour sur investissement) par la concussion, le racket et la corruption rampante.
Ni l’armée ni la justice n’ont échappé à cette pratique, à travers des promotions et grades à coup de séminaires – au regard du nombre de généraux maliens -, à l’exclusion des faits d’armes sur le terrain.
La santé a été reléguée au second plan en transformant les hôpitaux publics en mouroirs, malgré l’engagement de quelques médecins animés de conscience professionnelle ; les médecins promoteurs de cliniques privées sont plutôt préoccupés par les chiffres d’affaires qu’ils y réalisent.
–                     Le Mali installé à demeure dans une corruption endémique :
Depuis un certain temps, notre pays connaît un niveau de corruption inégalé avec son corollaire de redistribution injuste et inique des revenus du pays, terreau naturel des grognes sociales, de la délinquance juvénile et de la grande criminalité.
A côté de ce fléau, la perte de valeurs – caractérisée, entre autres, par l’allégeance, la courtisanerie, la malhonnêteté, la cupidité – a érigé ces vices, dans notre pays, en seuls critères de récompense au détriment du mérite et de l’effort.
Le phénomène des coteries a connu une ampleur sans précédent autour des rejetons du prince du jour qui ne boudent pas leur plaisir à faire et défaire les carrières. De guerre lasse, la quasi-totalité de nos cadres sont passés à la trappe ; les quelques rares intègres et courageux résistant à l’appel du pied du souverain et à la compromission étaient tout simplement réduits à la misère, étouffés par la politique de la terre brûlée.
Dans la même foulée, le secret pour conserver ou préserver les hauts postes de responsabilité était de lécher les bottes du souverain et/ou celles de son épouse ou en brillant par le degré d’allégeance affiché avec zèle.
Ces conduites humiliantes et déshonorantes ont achevé de convaincre une bonne partie de la jeunesse à emprunter le raccourci du parrainage et du clientélisme aboutissant à la chienlit.
–                     La tempête du 22 mars 2012, fruit du vent semé par les gouvernants, pendant au moins vingt ans :
Il convient de noter que les évènements de mars 2012 ne sont que la conséquence d’une gestion calamiteuse du pays pendant au moins vingt ans ; ce putsch, à la suite d’une mutinerie, s’est imposé à une génération délibérément sacrifiée – pour créer une situation d’indispensabilité – au profit d’une précédente génération n’ayant jamais voulu passer le relais à ses cadets, dans le cadre d’une alternance générationnelle paisible.
Ces cadets dont on était presque sûr qu’ils étaient incapables de construire – puisque détournés du chemin de l’effort et de la quête de l’excellence – ont, en revanche, surpris par leur capacité inattendue de destruction et de nuisance en chassant ceux qui les toisaient.
C’est dans un tel contexte qu’une transition atypique fut ouverte sur fond d’un triumvirat très agité et très préjudiciable autour de combats fratricides d’intérêts individuels sordides ; la patrie affaissée, chacun voulait se payer sur la bête.
Dans nos précédentes contributions, nous avons estimé que pour conjurer un tel cafouillage politico-institutionnel, seule la mise en place (au plus tard fin juillet 2013) d’autorités légitimes et légales s’imposerait ; nous nous réjouissons donc de la décision définitive – déclaration péremptoire du Premier ministre dans ce sens, à la suite du Président de la République par intérim – de respecter l’échéance arrêtée par nos autorités.
Pour revenir à nos moutons, à savoir les critères de choix du futur président de la République, posons-nous les questions utiles suivantes :
Qui sont les futurs candidats pour l’élection présidentielle de juillet 2013 ?
Lesquels d’entre eux ont participé à la cette gestion calamiteuse du pays ci-dessus décrite ?
Quel est leur niveau de responsabilité dans cette gestion désastreuse ?
Quel rôle ont-ils joué pendant les vingt dernières années dans leur domaine de compétences respectives ?
Qu’ont-ils fait pour dénoncer et dégager leur responsabilité vis-vis du président de la République dont le règne fut émaillé de ces dérives ?
En leur laissant l’entière responsabilité d’apporter des réponses véridiques, honnêtes, rassurantes et satisfaisantes à ces questions – ATT de son exil doré se fera un malin plaisir à veiller en objecteur de conscience, et n’hésitera pas à rabattre le caquet à ceux des candidats qui seraient tentés de falsifier l’histoire récente de notre pays -, nous nous faisons le devoir d’indiquer, à l’intention du peuple, quelques critères objectifs devant prévaloir au choix du futur président de la République du Mali.
2)                  A quelle étoile accrocher le bateau Mali ?
Pour coller à l’actualité, il est vrai que la désignation, par l’ancienne majorité parlementaire (Adema), d’un « jeune » candidat de 46 ans au détriment de vieux briscards et autres faucons peut être révélatrice de la volonté du peuple – test grandeur nature, l’Adema se prétendant le plus grand parti du pays – d’opter pour le renouveau politique, en choisissant de nouvelles figures politiques.
Curieusement, c’est une commission ad hoc composée en majorité de membres de l’âge des barons de l’Adema qui a conclu à la mise à l’écart systématique – comme candidat – de ces derniers.
Cependant, l’arbre ne devrait aucunement cacher la forêt, le critère de l’âge ne saurait être suffisant, dans la mesure où certains jeunes formatés par les régimes précédents sont pires que les prédateurs décriés leur ayant servi de mentor.
Avant d’évoquer les critères primordiaux dans le choix de notre futur Président, nous nous posons la seule question qui vaille, à savoir si le candidat de l’Adema pouvait monter sur l’arbre de la transparence !
–                     L’indispensable critère de la probité :
Selon le dictionnaire «Le petit Larousse», la probité désigne le caractère d’une personne probe ; observation rigoureusement des principes de la justice et de la morale.
Au regard de l’état de délabrement de notre pays sur tous les plans, nous avons le devoir d’élire un président de la République intègre, propre, au dessus de tout soupçon ; un président capable de monter sur l’arbre de la transparence et «de jeter la pierre».
A cet effet, nous partageons l’adage de chez nous selon lequel «les pintades suivent celles qui les guident» ; le meilleur moyen d’éduquer un peuple est de lui trouver un leader modèle, exemplaire, et capable d’imposer les principes éthiques à tous ; l’arrivée du Président Alpha O. Konaré en 1992 sous l’étiquette du «communiste dur et intègre» a effrayé plus d’un prédateur à l’époque.
Avec la détermination du peuple malien, dénicher un candidat de l’espoir ne saurait être au dessus de nos moyens.
–                     La rigueur pour un Etat fort :
En plus de la probité, le futur président du Mali devrait être rigoureux pour sortir le pays de l’actuelle fragilité et précarité institutionnelle ; pour ce faire, l’arrivée d’un homme à poigne, à caractère trempé est indispensable.
–                     La nécessaire compétence :
Les deux premiers critères trouveront leur complément naturel dans la compétence du futur président du Mali car seul un leader compétent éprouve le besoin de collaborer avec les plus méritants, à l’inverse d’un incompétent qui se complaira parmi les médiocres et autres larbins «l’homme qu’il faut à la place qu’il faut».
Pour que ces critères puissent prévaloir, l’engagement des citoyens nous paraît incontournable.
3)                  L’obligation pour tous les Maliens épris de changement de s’engager, afin d’imposer une autre façon de faire la politique :
La politique n’aurait jamais dû être autre chose que cette noble et exaltante mission de dire ce que l’on fait, et faire ce que l’on dit, dans le sens de l’amélioration des conditions de vie de ses concitoyens – par la recherche de solutions aux maux de la société et la pratique d’une bonne gouvernance -,  contrairement à ce que l’on fait souvent croire au peuple.
Certains hommes politiques des vingt dernières années de notre expérience démocratique ont trahi et outragé le peuple en concevant, et en mettant en œuvre une politique fondée sur le mensonge, la malice, la roublardise – à titre d’exemple, la tenue de réunions politiques séquentielles jusqu’à des heures indues (3 heures du matin) pour mieux asseoir des complots lors de certaines prises de décision -, etc.
Ainsi, le peuple a-t-il été abusé et désabusé d’où sa désaffection et son acrimonie pour le «politiki môgô : le politicien et non le politique !».
C’est donc le moment où jamais pour les citoyens, tous les citoyens de s’impliquer et de participer au choix, ne serait-ce que, du futur Président de la République ; en le faisant, ils accompliront leur devoir historique vis-à-vis du Mali, particulièrement, vis-à-vis des générations à venir.
L’histoire jugera à la fois ceux qui ont mis notre pays dans un tel état de délabrement, et surtout ceux qui pouvant améliorer la situation par leurs votes – en choisissant un président de la République probe incarnant le changement – utiles et indispensables, s’y sont abstenus.
La démocratie est le meilleur mode de gouvernance en cela qu’elle permet au peuple souverain de participer à la gestion de la cité à travers ses représentants dont le choix lui incombe, lui revient de droit ; peut-il y renoncer et se plaindre après ?
Après nous être indignés, à la suite de Stéphane Hessel, Engageons-nous, notre salut et l’avenir du Mali en dépendent.
Et si d’aventure, nous doutions de notre influence pour changer les choses, méditons cette maxime du Dalaï lama : «Si vous avez l’impression d’être trop petit pour pouvoir changer quelque chose, essayez donc de dormir avec un moustique et vous verrez lequel des deux empêche l’autre de dormir».
Dieu bénisse le Mali !
Aguibou BOUARE
Conseiller Juridique
Tél. 66 91 80 70

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