L’ère de la tyrannie de la vox populi numérique !

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Avec la démocratisation de l’internet, la politisation des réseaux sociaux, il sera de plus en plus difficile de diriger les Etats. Pas parce que nos gouvernants sont si mauvais ou immatures que leurs prédécesseurs, mais simplement parce que les peuples deviennent de plus en plus exigeants, car ils sont davantage instruits, intelligents et hyper-informés sur les faits et gestes de leurs dirigeants.

Internet bouleverse irréversiblement les rapports entre le pouvoir et le citoyen, entre l’élu et l’électeur. Il instaure son système de gouvernance et de justice sans avoir besoin de législateurs pour en édicter les règles. Son triomphe est tel que les Etats eux-mêmes se sont numérisés avec leurs sociétés et leurs politiques de gouvernance.

Les dirigeants, qui ont pris conscience de ces changements, prennent soin de gouverner d’abord le pays sur les réseaux sociaux avant de passer à la pratique. Ils ont compris que le temps numérique va plus vite que le temps réel. Tous les Etats connectés ont désormais deux présidents, deux gouvernements, deux parlements en face de deux citoyennetés : physique et virtuelle !

De toutes ces expressions dichotomiques, c’est le parlement qui a tendance à devenir entièrement virtuel. Il n’est pas exclu que dans un proche avenir, des Assemblées virtuelles remplacent définitivement les parlements classiques tels qu’on les connaît aujourd’hui, histoire de gagner du temps ou surtout de confirmer l’évidence de la transportation de la gestion des affaires publiques sur le téléphone portable.

Cette mutation s’opère d’elle-même avec pour conséquence directe la tyrannie de la démocratie numérique sur l’expression populaire émanant de la vie réelle. Ce qui aboutira forcément à la marginalisation des habitants des zones non-connectées et des citoyens exemplaires ayant décidé de se mettre en marge de l’évolution normale des choses.

Le premier inconvénient de cette numérisation de l’État sera l’éclosion des micros-Etats dans l’Etat dirigés par des influenceurs et des affirmations populistes en bas desquelles les opinions contradictoires seront traquées, harcelées et réduites peu à peu au silence. A terme, l’outil qui devait servir à l’épanouissement de toutes les libertés conduira à l’avènement d’une nouvelle forme de dictature que tous et toutes vont combattre au quotidien en vain. Alors, l’unique solution possible pour certains Etats serait de déconnecter leurs sociétés pour retourner à l’époque du face-à-face.

Puis, on y reviendra un jour, car l’histoire est une répétition sans fin.

Dr Aboubacar Abdoulwahidou MAIGA

Enseignant-chercheur à L’ULSHB.

 

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