Pour dire la vérité, la déclaration de l’ancien président du Sénégal, Me A Wade, est irresponsable, démesurée et absolument condamnable. Mais voici, presque tout le monde se tait ou se cache derrière son petit doigt. Même ces victimes d’hier qui le connaissaient pourtant bien pour avoir subi ses foudres semblent tout oublier. Vraiment, le Sénégal est le pays des paradoxes, des scandales… comme je le disais ici [1]. Alors, Me Wade déclare publiquement et sans ambages à la face du monde qu’il vient au Sénégal pour empêcher la tenue de l’élection présidentielle. Et pour le seul motif, à cause de l’absence de son fils, recalé, parmi les candidats en lice. Mais, Me Wade allait-il observer la même position si Karim était admis comme candidat ? Absolument non ! Et, cela est sûr pour tous ceux qui connaissent l’homme, si toutefois, la mauvaise foi et l’hypocrisie sont mises de côté. L’attitude de Me Wade montre encore à suffisance que ce dernier n’a aucun respect pour le peuple sénégalais et pour lui, son fils vaut plus que tous les Sénégalais réunis. Me Wade, en fait,ne vit que pour son fils et, c’est cela uniquement qui commande aujourd’hui tous ses faits et gestes. Il est complètement obnubilé et tenaillé par ce rêve fou de faire de son fils le président de la République du Sénégal, au prix même, à défaut de brûler le Sénégal. Et, à y regarder de près, il me semble que certains Sénégalais sont vraiment amnésiques sinon ce sont des pluies de condamnations qui devaient tomber. Le silence assourdissant de ceux qui furent prompts à appeler au calme et à condamner les va-t-en-guerre est trouble. Est-ce parce qu’il s’agit de Me Wade, leur « ami » ? Mais les Sénégalais ont-ils déjà oublié que le président A. Wade préparait minutieusement la dévolution du pouvoir à son fils ? Et, en l’absence de la prudence de certains Sénégalais patriotes, cette machination allait passer. Mais, fort heureusement, elle a capoté grâce à la vive et prompte réaction patriotique du peuple sénégalais debout, le 23 juin 2011, pour dire catégoriquement, non.
Mais Me Wade dans son for intérieur, il prend sérieusement les Sénégalais pour des amnésiques, des demeurés ou ses obligés pour ne pas dire ses esclaves. Car, la déclaration faite hier 05/02/2019 est une provocation ni plus ni moins de tous les Sénégalais épris de paix pour leur pays, sans exception. Parce que, ce qu’il reproche en substance à Macky Sall, n’est en vérité que la leçon qu’il a apprise auprès de lui et applique textuellement et mécaniquement.Et pour preuve, Me Wade n’avait-il pas confié à son fils Karim, qui n’a jamais auparavant occupé un emploi dans l’Administration sénégalaise et le plus minime poste de responsabilité qu’il soit, quatre ministères parmi les plus importants du gouvernement ? Me Wade n’avait-il pas aussi déclaré aux Sénégalais et à la Coalition alternance 2000 que, c’est lui qui était élu et personne d’autre et, à ce titre, il fera ce que bon lui semblerait. Ne disait-il pas également que : « ses promesses n’engageaient que ceux qui y croyaient ? » Et qui a dit aussi, s’adressant aux Sénégalais pour se renier : « bu féke ma ko waxoon, kon nag waxeet. » Une expression devenue populaire et que bon nombre de nos politiciens et, des dirigeants imitent parmi lesquels, son successeur, Macky Sall. Mais qui, en outre, a créé cette loi de la vice-présidence au Sénégal qui est encore en vigueur, parce que non abrogée ? « LOI CONSTITUTIONNELLE n° 2009-22 du 19 juin 2009 » Et les Sénégalais ne doivent pas non plus oublier aussi, la loi Ezzan avec son effet rétroactif que Me Wade avait arbitrairement et d’autorité imposée. Le Président sénégalais Abdoulaye Wade a promulgué jeudi 17 février la loi Ezzan relative à l’amnistie politique. Ce texte offre l’impunité à tous les crimes politiques commis entre 1993 et 2004 en relation avec les élections. Qui avait dit qu’il venait au pouvoir et comptait y rester pour cinquante ans ? C’est toujours Abdoulaye Wade.
Enfin, tout ce que le président Wade a fait voir et endurer au peuple sénégalais pendant ses douze ans de pouvoir est encore frais dans certaines mémoires. Et, c’est ce qui lui a valu d’être remercié de manière propre et nette et devait suffire comme une raison valable pour ne plus prendre au sérieux ses dires. Ainsi, objectivement, je pensais en toute logique qu’avec tous ces dégâts dont il est auteur et notamment les faits si graves, comme le pillage, la corruption, l’impunité, la gestion solitaire et royaliste du pouvoir, l’intention de fonder une dynastie au Sénégal, etc. que sa parole ne devait plus être tenue en compte par les Sénégalais, parce que ne valant même plus un kopeck. Au total, tout ce qu’il reproche aujourd’hui à Macky Sall, il a été le premier à le pratiquer dans des proportions plus grandes. Et, c’est justement pour n’avoir pas rompu avec ces pratiques-là que beaucoup de Sénégalais sont déçus par le président Macky Sall. Car, il s’était justement engagé publiquement à opérer cette rupture indispensable que réclamaient les 65% des Sénégalais qui avaient renvoyé Me Wade du pouvoir, à cause de sa gestion cahoteuse et patrimoniale. Mais en fin de compte, de rupture, il n’en est rien. Cela peut se comprendre dans une certaine mesure, car, les deux hommes proviennent tous de la même source libérale avec, comme seule arme et seul bagage le populisme trompeur. C’est cela la triste vérité à retenir par les Sénégalais et les électeurs.
C’est dommage que le président Macky Sall ait une faiblesse ou une peur bleue de Me Wade au point qu’il ne lui a, jusque-là, pas appliqué la loi malgré toutes ses fautes et bavures. Et certainement, c’est pourquoi Me Wade agit de la sorte, comme un souverain roi dans un pays conquis, nommé le Sénégal. Est-ce un deal entre un père et son fils adoptif ou bien, un retour d’ascenseur de Macky Sall à son bienfaiteur Me Wade pour services rendus ? Ou bien, est-ce la confirmation de ce que je disais dans une de mes contributions, à savoir les retrouvailles de la famille libérale[2], car sur les cinq candidats en lice, les trois se réclament du libéralisme. Donc, les Sénégalais doivent bien prendre leur garde pour ne pas être victimes d’un piège cousu de fil blanc par les libéraux toutes tendances confondues ou les dindons de la farce. Tout cela pour dire quoi, que la vigilance, des Sénégalais, doit être de rigueur pour éviter encore de tomber sur une erreur fatale de choix du mauvais candidat populiste.
Le silence des candidats à la présidentielle sur la déclaration de Me Wade est très inquiétant et cache un opportunisme voilé injustifiable ou de l’hypocrisie politicienne. C’est comme si chacun d’eux hésitait à condamner sa déclaration cependant irresponsable, à tous égards, simplement de peur de perdre, éventuellement le bénéfice du soutien de Me Wade. Alors que ce dernier menace de provoquer des troubles voire un chaos, dans le pays, dont les conséquences sont imprévisibles, par sa décision de vouloir empêcher à tout prix, l’élection présidentielle d’avoir lieu, parce que son fils n’est pas de la partie. En clair, Me Wade compte troubler leur pays. Ce pays qu’ils veulent diriger demain. C’est lamentable de la part d’un ancien président de la République de son pays. Par conséquent, si les candidats sont vraiment honnêtes avec eux-mêmes et dignes à diriger le Sénégal pour tous et où tous les citoyens sont égaux et sur le même pied d’égalité, ils ont l’obligation de se prononcer clairement sur la question devant le peuple sénégalais, aujourd’hui et maintenant afin que nul n’en ignore. A défaut d’une telle attitude responsable, les Sénégalais sont en droit de croire qu’il y anguille sous roche. Autrement dit, de l’hypocrisie qui ne dit pas son nom,opportunément, pour être uniquement élu. Si tel est le cas, l’on comprendra alors que, c’est seulement le pouvoir qui intéresserait les candidats et non un Sénégal qui doit vivre dans la tranquillité et la paix sociale et, ou la loi doit s’appliquer à tous sans exception donc, Me Wade y compris. Mais au fond, l’on peut se demander, pour qui finalement se prend Me Wade pour défier la loi et à la limite, le peuple sénégalais à cause uniquement de son fils ? Cela dit, je pense que ce ne serait pas trop demander que d’exiger des cinq candidats de se prononcer sur cette déclaration et son auteur en donnant une position nette et claire. Absolument pas !Et ils seraient tous bien naïfs, de croire qu’ils représentaient aux yeux de Me Wade une importance quelconque devant son fils.
Ceci étant, pour éviter un précédent d’impunité à l’avenir dans notre pays, il faut mettre fin à l’escalade de ce vieux pyromane. Le président Macky Sall a mis en prison des Sénégalais pour des déclarations moins graves et moins incendiaires que celle de Me Wade. Je donne en exemple le cas de Barthélemy Diaz qui avait appelé à descendre dans la rue pour libérer Khalifa Sall. Ce qui avait valu dès sa sortie des studios de Dakaractu d’être arrêté pour menace et trouble à l’ordre public. Il y a là, naturellement deux poids et deux mesures dans l’application de la loi.
Oui, il faut le dire tout net. Si réellement, le chef de l’État est bien à la hauteur des fonctions et des responsabilités qu’il assume dans un État souverain et de droit où la loi est pour tous, l’avion qui transporte Me Wade ne devrait pas recevoir l’autorisation d’atterrissage à l’aérodrome. Et ce serait à juste raison pour sa déclaration qui est une véritable déclaration de guerre bien plus qu’une menace ou un trouble à l’ordre public. Mais, j’ai bien peur que le président Macky Sall n’ait pas cette hauteur de vue. Ensuite, comme nous sommes au Sénégal, dans un État où des privilégiés bénéficient d’impunité totale quelle que puisse être la gravité de leurs fautes, s’ils ont la protection du président de la République rien ne leur arrivera. Hé bien oui, ce sont de telles conduites invraisemblables qui se passent dans notre Sénégal. Un Sénégal, orphelin de dirigeants justes et honnêtes, courageux et respectueux des citoyens et de la loi pour le conduire vers un devenir meilleur.
Par conséquent, que personne ne s’étonne ou s’émeut demain de voir des troubles se produire. Car, nous sommes tous avertis à l’avance et le pouvoir en premier, celui-là qui doit garantir l’ordre et la sécurité de tous les Sénégalais. Si un vrai État, de droit, était à la place du nôtre, il aurait pris en amont pour prévenir, des dispositions adaptées pour écarter tout danger contre son peuple aux fins de lui assurer la paix et la tranquillité. Mais, hélas, au Sénégal le pouvoir ne s’attaque qu’aux faibles, qu’aux pauvres et démunis sans défense. Comme pour dire que nous sommes dans un système de classes et que celui-ci agit effectivement par solidarité de classe, ce qui nous renvoie encore et toujours dans la lutte des classes.
En tout cas, demain, il fera jour.
À bon entendeur salut !
Le 6/02/2019
Mandiaye Gaye
Mandiaye15@gmail.com