Le vote du projet de loi électorale a suscité beaucoup de polémiques inutiles. La version envoyée par le gouvernement a été passée au crible pour en déceler toutes les imperfections. Le toilettage entrepris a, semble-t-il, remis en question l’unité que l’on croyait exister entre le gouvernement et le CNT. Mais y a-t-il réellement matière à polémique ? Le CNT n’a-t-il pas simplement joué le rôle et exercé les prérogatives naturelles que les textes lui confèrent ?
En vérité cette polémique n’a pas lieu d’être. C’est un faux débat. En effet, il aurait été plus grave de voir le CNT abondé dans le sens du gouvernement en l’adoptant le projet tel qu’il lui a été présenté. Si le texte, qui présentait un certain nombre d’incohérences, a été revu et amélioré par le CNT, c’est la démocratie qui gagne. Au lieu d’y voir le signe d’une indépendance et un équilibre entre les pouvoirs, certains y ont vu une occasion de semer le trouble pour tenter de déstabiliser la Transition. Les fervents soutiens du PM, le M5 suggère une relecture du texte adopté à une écrasante majorité. Mais la dictature de la rue, une fraction du peuple, ne saurait avoir cours indéfiniment. Le M5 n’a aucune légitimité pour exiger qu’un texte, adopté après consultation de toutes les forces vives du pays, soit re-amendé pour des questions de convenance personnelle et partisane.
Par ailleurs, c’est l’occasion pour le président ASSIMI et son gouvernement de montrer que le CNT a bien été institué dans l’intérêt de tous les maliens, tous bords politiques confondus et qu’il dispose de prérogatives nécessaires pour exercer ses missions, notamment celles relatives au contrôle de l’action gouvernementale et du vote des lois. Le président donnera ainsi l’assurance aux maliens que la transition, en dépit de cette apparence de concentration des pouvoirs, n’obéit pas moins aux principes élémentaires d’une démocratie pluraliste. Il prouvera, en promulguant cette loi, son attachement au respect du principe de la séparation des pouvoirs et de l’équilibre recherché par la Charte de la Transition.
Enfin, pourquoi perdre du temps en essayant de relire un texte qui risque d’être soumis à d’autres amendements ? À en croire le vice-président du CNT plus de 200 amendements avaient été proposés mais finalement 92 ont été retenus. En renvoyant ce texte au CNT, le PM prend le risque de méconnaître son projet après une seconde délibération du CNT. Par ailleurs, si les 92 amendements apportés ne constituent pas un vote de désaveu du PM, la perspective d’une relecture pourrait créer une vraie crise entre le gouvernement et le CNT. Le M5, qui a été largement remercié (primature offerte sur un plateau, des logements sociaux….) ne saurait troubler la bonne marche de cette Transition dont les organes sont déjà sur la sellette et font face à d’énormes pressions.
Cette loi électorale, quoiqu’imparfaite, ne demeure pas moins le fruit d’une concertation élargie. Il faudra s’en contenter pour l’heure et œuvrer pour le retour rapide de l’ordre constitutionnel.
Dr DOUGOUNÉ Moussa
Professeur d’enseignement Supérieur
Consultant Formateur