Le peuple malien et la Transition : La confiance à sens unique ?

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Le peuple malien n’a de cesse,  depuis quelques mois, exprimé haut et fort son soutien à la Transition. Partout où l’homme providentiel Assimi Goita s’est rendu, la population a été au rendez-vous pour le soutenir et le féliciter. La montée en puissance de l’armée malienne vient conforter la position du Chef de l’État. Sa légitimité ne fait plus de doute. Les maliens ont donc confiance en leur nouveau Chef. Mais on peut se demander, toutefois, si cette confiance n’est pas à sens unique. L’équipe en place montre moins d’empressement à organiser le retour de l’ordre constitutionnel. Elle affirme mettre le retour à l’ordre constitutionnel dans ses priorités mais l’échec des négociations avec la CEDEAO fait douter les démocrates.

En effet, depuis quelques mois,  nous assistons à un bras de fer entre la CEDEAO et les autorités de Transition pour la détermination d’un chronogramme électoral.. Si l’insécurité grandissante était le motif le plus avancé pour retarder l’organisation des élections, certains discours ont pu insister sur la nécessité d’éviter que le pays ne retombe entre les mains des politiciens véreux. Il y aurait donc une méfiance à l’égard du modèle démocratique du choix des gouvernants parce que justement les élections ont toujours été contestées pour fraudes ou achats de voix.

En prétextant qu’il n’est pas conseillé d’organiser des élections à un moment critique,  parce qu’on se méfie du retour des politiciens véreux, c’est un peu une remise en cause de la capacité des maliens à faire un choix éclairé. C’est également une méfiance à l’égard des partis politiques, jugés inaptes à faire preuve de « fair-play ». Ils sont considérés comme étant les instigateurs de troubles  électoraux alors qu’ils devraient être des pédagogues et soutenir la perspective de concertations apaisées. Leur incapacité à propulser une dynamique favorable à une démocratie pluraliste sans violence et sans corruption fait douter de leur aptitude à gouverner dans la transparence.

Mais ces partis politiques représentent le peuple. Et c’est ce peuple qui vote et qui soutient les contestations. Si sa maturité politique et démocratique peut  être remise en cause alors la transition fait bien de se méfier. Elle ne peut toutefois pas avouer sa méfiance à l’égard de ceux qui font sa force. Ce serait suicidaire. Mais à l’évidence,  on sait que le problème vient des électeurs. Et, à moins de modifier le système électoral en privilégiant le modèle américain (avec les grands électeurs) et d’accélérer l’éducation politique de la masse, ce problème récurrent survivra à la Transition. Elle n’est donc pas en mesure, avec le peu de temps dont elle dispose, de renverser les logiques de la démocratie malienne.

C’est donc le moment de questionner cette ambition démesurée de changer, en si peu de temps, un système entretenu pendant plus de 30 ans. Il faut donc faire confiance au peuple en lui permettant à  nouveau de saisir sa chance de sortir des crises multidimensionnelles. On ne peut continuer à le materner. Il doit s’assumer et suivre la voie ouverte par cette Transition. S’il est vrai que les peuples d’Afrique ont expérimenté la démocratie bien avant les autres, et bien,  il n’y a pas de raison de douter de notre capacité à revivre cette cohésion sociale. Aussi, les maliens qui redoutent la politique sont aussi ceux qui doutent de leur propre aptitude à arbitrer le jeu de la démocratie. S’ils sont majoritaires, alors ce peuple n’a pas encore sa maturité politique et démocratique. Mais cela peut s’expliquer par le fort taux d’analphabétisme et le manque cruel de patriotes engagés.

L’heure du changement est arrivée …Nous avons le choix, entre changer et continuer à nous mentir…Nous avons passé les  trente (30) dernières années à rejeter nos erreurs sur les autres…alors que le mal-être national a sa source au Mali.

Dr DOUGOUNÉ Moussa

Professeur d’enseignement Supérieur

Consultant Formateur auprès des entreprises et des banques

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