Et si l’Afrique réclamait ses quelques 3 600 milliards de francs CFA qui sommeillent au sein du Trésor public français ?

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Le débat sur le franc CFA taraude plus d’un sur le continent africain. Si certains sollicitent de revoir le contrat avec la France, d’autres revendiquent tout simplement d’oblitérer cette monnaie à l’échelle africaine. Dans ce contexte de vicissitude grandissante, le président français Emmanuel MACRON s’est exprimé sur le sujet en disant ceci : “…Si on se sent pas heureux dans la zone franc, on la quitte et on crée sa propre monnaie comme l’on fait la Mauritanie et le Madagascar…”, ce dernier a donc été clair, ce qui devrait être suffisant pour éveiller les consciences de nos chefs d’Etat, du moins qu’ils aient le courage de réclamer les quelques milliards de dollars de devises qui sommeillent au niveau du Trésor public français.

En 1945, la zone franc a été créée. La France a signé un accord monétaire avec certains pays africains en l’occurrence les anciens colonies françaises. Cet accord portait sur la couverture pour environ 20% de l’émission monétaire des pays africains utilisant le franc CFA. Concrètement, les pays africains déposaient 100% de leurs richesses auprès du Trésor Public français en 1945, puis 50% dans les années 1990. De nos jours, grâce aux richesses cumulées au sein du Trésor public français, les pays africains peuvent assurer aisément leur émission monétaire sans l’intervention de la France pour assurer la parité entre le franc CFA et l’euro. Mais, il se pose avant tout le problème du fameux compte d’opération. Car faut-il le rappeler, les banques centrales sont tenues de verser pour le compte du Trésor public français la moitié de leurs avoirs extérieurs. Autrement dit, les les devises cumulées par les Etats africains financent l’Etat français en contrepartie de son gage. Une fois la monnaie scripturale entre les mains du Trésor français, personne n’est dubitatif sur le fait que cette transaction se retranscrira en financement des grands enjeux français tels que  l’éducation, la santé, la sécurité, entre autres. Il ne saurait en être autrement, puisque en acquiesçant l’accord asymétrique régissant le franc CFA, les pays africains ont indirectement abdiqué en prêtant au Trésor public Français la moitié de leurs avoirs extérieurs contre une rémunération dérisoire. A titre d’exemple, la BEAC (Banque des Etats d’Afrique Centrale) a perçu en 2015 environ 21,2 milliards de franc CFA d’intérêts en provenance du Trésor public français contre près de 3 281 milliards déposés dans le fameux compte d’opération pour un taux de rendement moyen à 0,6%.

La constat est donc sidérant, ce qui devrait pousser à éveiller la conscience du citoyen lambda. Il est grand temps que l’Afrique réclame ses milliards de dollars auprès du Trésor public français afin de financer son économie. Une fois en possession de ces fonds, nous pourront à mieux d’anticiper efficacement l’équilibre entre la politique économique et la politique monétaire. Puisque, il convient de rappeler qu’une grande majorité des pays africains sont dans une économie de marché, à l’instar du prix des biens de consommation de première nécessité. Dans ce contexte, l’offre et la demande fixent le cours de la monnaie. Ainsi, un pays compétitif sur le plan économique aura tendance à exporter davantage et donc à générer des rentrées significatives de devises. Par conséquent, plus le pays est compétitif et plus la demande d’échange desdites devises en monnaie locale augmente. il s’ensuit que le cours de la monnaie locale s’apprécie. A contrario, l’effet inverse se produit pour une économie avec un piètre niveau de compétitivité, permettant ainsi une dépréciation de la monnaie locale. Cette configuration de baisser la parité permet de booster les exportations. Par exemple, nous observons depuis quelques années une chute continue du cours du pétrole à l’échèle mondiale et particulièrement en Afrique. Cette dégradation est nuisible à l’économie de certains pays comme le Congo, le Tchad ou encore le Gabon. En effet, ces pays ont une structure économique déséquilibrée où un seul secteur tire la croissance notamment le pétrole. Le Franc CFA étant arrimé à l’euro avec une parité fixe, ces pays ne pourront donc pas procéder à une dévaluation de ce dernier pour relancer leurs exportations. A contrario, certains pays comme le Nigeria ou le Ghana pourront jouer sur leurs monnaies à moyen terme afin de doper leurs exportations.

Cependant, pour récupérer les milliards de dollars auprès du Trésor public français, les Etats concernés doivent s’unir et à l’unanimité pour faire valoir leur droit. Pour commencer, ils pourraient demander le transfert de 10% de leurs réserves internationales immédiatement sur le compte d’un Fonds Monétaire crée par la communauté économique africaine au niveau régional. Le Président de la République française a ouvert la possibilité de reforme en renvoyant l’initiative aux décideurs africains. A nous d’agir, de nous organiser et d’emprunter une ferme volonté politique pour réclamer au moins nos devises afin de mieux financer notre économique. Outre les décideurs politiques, les acteurs de la société civile et la presse doivent s’impliquer davantage pour animer le débat sur la monnaie et le financement de l’économie. il faut susciter le débat pour soutenir les investissements publics par l’utilisation des réserves de change, plus de débats économiques pour privilégier la création de richesse et non la lutte contre l’inflation, plus de suivi des programmes des candidats mettant la problématique monétaire au coeur de leur stratégie et du développement du continent.

Amadou SY

amadouusyy@gmail.com

www.amadousy.fr

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8 COMMENTAIRES

  1. Mr Sy vous n’avez pas du tout traduit ce que Macaroni, pardon, Macron a dit à ses sous préfets.
    Il a dit: CELUI QUI QUITTE LE FRANC CFA JE LUI CASSE LES COUILLES.

  2. Monsieur Sy regardes l’attitude d’IBK a l’egard de Macorn, est-ce que tu penses qu’IBK veut etre libre de la France? L’esclavage mental est le plus viscieux et dangereux de tous les esclavages et nos dirigents en Afrique de l’Ouest sont mentallement colonises, des esclaves mentaux. Pourquoi General Moussa Traore, chef d’Etat jamais ete elu democratiquement nous a fait faire marche arriere en rejetant notre Franc Malien? Tu sais qu’IBK est pire quand a son amour pour la Mere Patrie. La jeunesse actuelle est le produit des ces esclaves mentaux et pire ces jeunes apprennent tres trop la corruption et le gaspillage du denier publique sont des normes car c’est ce qu’ils observent en longeur de journee a Koulouba comme a Bamako, Mopti, Kayes, Sikasso, Segou, etc. Il ne faut une autre generation de dirigents pas ceux qui sont sortis des Ecoles Francaises.

  3. Bonjour, Joe
    Merci Mr SY pour cet article qui fait beaucoup jaser depuis cette déclaration de ce blanchon Macron.
    Comme Joe je sais pas quels sont les véritables enjeux de cette politique monétaire pour les pays membres? La quitter serait il bénéfique pour ces membres? si oui comment ?
    Sinon 6 milliards d Euro n est vraiment rien pour la France.

  4. Ah 3600 milliards CFA …moins de 6 milliards Euro la FRANCE n’a rien a foutre de cette somme médiocre….. nos propres voleurs de despotes pillent 100x plus que ça. Au moins la FRANCE reconnait que c’est notre argent et ne s’y cache pas. Même si on remet tout cet argent demain, après demain nos voleurs vont le piller sans qu’on y ait le moindre détail! De vrais états comme l’Érythrée, L’Éthiopie, la Tanzanie etc.. n’ont pas ce probleme de despotisme du négro-inconscient (qui ne vise que son son ventre et son confort personnel)! Nos pays “franco-fous” ont appris a être esclaves dociles…donc qui est fou pour remettre a ses esclaves “leur argent” alors qu’ ils (les esclaves) sont eux-mêmes une propriété!? Ça doit continuer de cette façon avec cette affaire de Franc dans nos pays jusqu’à ce que la nature suive son cours en terme de famine et de désastres socio-économiques provoqués …pour que nous sentions enfin la vraie douleur avant d’apprendre a défendre nos ressources et nos intérêts comme les autres pays serieux!

  5. Mr Sy, bravo! Je crains que vous ne soyez entendu par les responsables africains. Des dirigeants comme Gbagbo l’avaient crié haut et fort, sans jamais trouver de soutien parmi ses pairs africains. Personnellement je comprends pas assez l’analyse en tant que citoyen lambda. Mais, ce qui est du cas du Mali particulièrement, je pense que le retour vers le CFA en 1983 ou 84 a beaucoup joué en défaveur du Mali au plan économique. Feu Modibo ayant créé le franc malien et posé les bases de solides coopérations entre le Mali, l’ URSS (ou la Russie) et la Chine, à mon avis, nous n’aurions pas dû accuser un pareil retard de croissance à ce jour. Car, comme vous le soutenez en plus de ce qui dort dans le trésor français, la chute des cours des matières premières, les faiblesses des états africains etc, les dirigeants africains doivent saisir cette opportunité qui leur est soumise par Macron. Nous africains des pays CFA, c’est le moment ou jamais de nous débarrasser de cette monaie “porte-malheur”.

    • Exactement cher JOE, il appartient au peuple africain de prendre conscience pour retrouver sa souveraineté monétaire. La jeunesse doit jouer un rôle important pour y arriver et il est temps qu’elle “se bouge” !

      • Malheureusement la jeunesse africaine francophone n’a pas été formée ni formatée pour relever ces défis et faire face aux enjeux économiques du siècle présent…… La jeunesse est majoritairement focalisée sur la recherche du gain quotidien et ne se projette guère sur son avenir……. A l’heure actuelle on a donc plus besoin de leaders forts et lucides qui pourraient recentrer et fédérer les efforts des jeunes vers une libération économique et culturelle.

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