La nouvelle loi fondamentale entre légitimité, légalité et efficacité (2è partie)

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TROISIEME PARTIE : Efficacité

Si d’une part, dans le préambule de la nouvelle constitution on conserve la référence à l’avènement de la démocratie pluraliste, aux droits de l’homme, à la forme républicaine et la laïcité de l’Etat, à l’unité nationale, à la réalisation de l’unité africaine, aux règlements pacifiques de différends, de l’autre, de véritables progrès ont été enregistrés par l’adoption de nouvelles dispositions en référence aux valeurs ancestrales depuis les grands empires, aux pères de l’indépendance et aux idéaux des martyrs de l’indépendance, à la crise multidimensionnelle dont la lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite en ligne de mire, à la sécurité et à la défense, indispensables à l’existence d’un Etat souverain, à la valorisation du patrimoine culturel et à la préservation des ressources naturelles du territoire pour les générations présentes et futures, aux idéaux de la refondation portés par le peuple malien lors des ANR, aux personnes vivant avec handicap et à lutter contre toutes les formes de violence.

Ainsi, voici un arsenal de dispositions qui rejoignent le préambule désormais partie intégrante de la constitution, pour renforcer le Mali dans le futur.

Titre premier

Sur le plan dimensionnel le titre premier qui consacre les droits et devoirs du citoyen, les traite désormais en deux chapitres et 29 articles.

– Selon le chapitre premier (droits et libertés), l’assurance désormais de la protection de l’enfant contre le trafic de personne et les infractions assimilées et contre l’enrôlement dans les groupes extrémistes violents a une valeur constitutionnelle (article 3) tout comme le droit reconnu à toute personne à un jugement dans un délai raisonnable (article 7).

– Le mariage et la famille qui constituent également une grande sensibilité sociale, connaissent désormais une portée juridique précise dans l’article 9.

NB : si la constitution du 25 février 1992 a préféré le silence sur le mariage, son article 11 dont la teneur suit : « tout ce qui n’est pas interdit par la loi, ne peut être empêché et nul ne peut être contraint de faire ce qu’elle n’ordonne pas ».

Ainsi, avec l’article 9 de la nouvelle constitution, le mariage entre personne de même sexe ou entre personne et animal sont hors de question, précision de taille.

– Pour ce qui concerne les devoirs en chapitre II, le sens du devoir interpelle tous les citoyens d’au moins 18 ans à une mobilisation aux côtés des forces armées pour la défense de la patrie (article 24).

– Dans l’article 29 ; conscience, loyauté et probité doivent désormais accompagner tout citoyen investi d’un mandat public ou chargé d’un emploi public ou d’une mission de service public dans l’accomplissement de ces activités.

On passe au titre II qui connait également beaucoup d’évolutions.

Titre II : Ce titre est désormais traité en deux chapitres et 13 articles.

Chapitre I : De l’Etat :

Ce chapitre renforce l’Etat du Mali par l’ajout du caractère unitaire en son article 30. Le Mali est désormais fondamentalement protégé contre toute velléité de scission sécessionniste ou fédérative.

Cet article donne toujours l’opportunité à tout lieu du territoire de bénéficier du statut de capitale.

Son dernier alinéa impose le respect de la république par la prévision d’une punition contre tout usage illégal et toute profanation des attributs de la République.

Autre considération majeure est que dans l’article 31 même si le français est maintenu comme langue de travail, d’autres langues peuvent être sollicitées à ce même sujet et toutes les langues nationales ont désormais un caractère officiel.

Dans l’article 32 la sensibilité qui accompagne la laïcité dont l’objectif est de promouvoir et de conforter le vivre ensemble fondé sur la tolérance, le dialogue, la compréhension mutuelle, ainsi que la garantie de toutes les religions, les croyances, la liberté de conscience et le libre exercice des cultes dans le respect de la loi est désormais atténuée l’ajout de la phase suivante : « la laïcité ne s’oppose pas à la religion et aux croyances ». Cette phrase constitue une marge qui retient toute osmose de décisions politicopubliques pouvant porter atteinte à la religion et aux croyances.

Nous pouvons souhaiter la bienvenue à l’article 34 qui est une garantie juridique au plan interne tout comme au plan international par sa teneur qui suit: l’action publique est guidée par les principes fondés sur le respect de la souveraineté de l’Etat, des choix souverains du peuple et la défense des intérêts.

Il est désormais clair dans la constitution en en son article 35 qu’aucune autorité publique ne peut utiliser l’influence dont elle bénéficie émanant des pouvoirs à travers la constitution ou la loi pour commettre un détournement de ressources ou de biens publics à son profit ou à celui des détenteurs du pouvoir, des membres de leurs famille, d’organismes ou de toutes autres personnes par favoritisme, corruption, concussion, ou autres moyens.

Enfin ce premier chapitre qui traite de l’État connait une diminution du nombre d’institutions de la République qui étaient au nombre de 8, par la suppression de la haute cour de justice et du haut conseil des collectivités territoriales, le rajout de la cour des comptes émanant de la directive n° 01/2009/CM/UEMOA portant code de transparence dans la question des finances publiques au sein l’UEMOA. Il y’a également un changement majeur au niveau de la 3e institution (pouvoir législatif représenté) désormais par le parlement scindé en deux chambres: l’Assemblée Nationale et le Senat.

Quant au chapitre II, celui qui traite la souveraineté, dans l’article 38, en plus du caractère universel, égal et secret, le suffrage peut être direct c’est-à-dire un système électoral où tous les citoyens peuvent voter directement pour un cas candidat à l’élection ou indirect, qui contrairement au suffrage direct est un suffrage dans lequel les élus sont désignés par un corps intermédiaire dont les membres ont eux-mêmes été élus.

La souveraineté de l’Etat se voit une fois de plus renforcée dans l’article 41 par son exercice sur l’ensemble du territoire national, à l’article 42 par le droit qu’il dispose désormais sur les richesses et ressources naturelles situées sur le territoire malien.

NB : l’exploitation de ces richesses doit impérativement respectée les règles de protection de l’environnement dans l’intérêt des générations présentes et futures

Titre III : Du pouvoir exécutif

Chapitre I : Du Président de la république

La première institution à travers la nouvelle constitution, connait désormais un encadrement juridique conséquent quant à ses compétences et l’étendue de son pouvoir.

Ainsi à travers l’alinéa 1 dont la teneur suit : « en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats de président de la République ».

Ensuite, ne posséder aucune autre nationalité, en dehors de celle du Mali à la date de dépôt de candidature.

Une précision de taille est manifeste dans deuxième alinéa de l’art 46 ; il s’agit du caractère explicite de la limite d’âge qui est désormais de 75 ans.

Un rajout important à la prestation de serment du président est, je cite ” En cas de violation de ce serment, que le peuple me retire sa confiance et que je subisse la rigueur de la loi. ” Voici un exigeant instrument juridique qui sert de pression sur le président de la République dans l’exercice de son mandat.

. Si la question de présentation de la démission du premier ministre pouvait être un obstacle pour le président de mettre fin aux fonctions du premier ministre, l’article 57 responsabilise désormais le président de la République vis-à-vis de la situation.

. La haute trahison pouvant être objet de destitution du président de la république est désormais clairement définie dans l’art 73 comme suit : « Il y a haute trahison lorsque le Président de la république viole son serment ».

Chapitre III : L’administration

Tout un chapitre est désormais dédié à l’administration qui affiche les grands principes dont l’adaptation des activités administratives aux besoins the la collectivité nationale et des usagers dans la transparence et le respect des droits de l’homme et de la démocratie; le respect des principe fondamentaux du service public comprenant la légalité, l’égalité, l’impartialité, la neutralité et la continuité; à l’Etat de veiller à inscrire le recrutement des agents de l’administration dans le cadre de procédures transparentes qui assurent l’égalité de chance pour tous, et à faire reposer le déroulement de leur carrière sur des critères de compétence et de professionnalisme, de veiller également à offrir aux agents de l’administration les conditions de travail, de rémunération et de sécurité nécessaires au bon accomplissement de leur mission.

Les autorités administratives indépendantes retrouvent leur part dans un nouveau chapitre (IV) par le biais de la médiation dans le cadre de l’organisation et la gestion des élections, et la protection des libertés et droits individuels.

Chapitre V : Les forces armées de défense et de sécurité.

Les forces armées et de sécurité en plus de leur rôle régalien de défense de l’intégrité du territoire national, de protection des personnes et de leurs biens, du maintien de l’ordre et de l’exécution des lois, participent désormais aux actions de développement économique, social, culturel et de protection de l’environnement du pays.

Elles sont républicaines, apolitiques, au-service de la nation et soumises aux autorités politiques.

L’Etat veille désormais à ce que les forces armées et de sécurité disposent en permanence, de capacités en ressource humaines et en moyens matériels nécessaires pour accomplir leurs missions. La planification de ces ressources et moyens s’opère à travers les lois de programmation.

Titre IV : Du pouvoir législatif

Chapitre I : Des dispositions générales

Le grand constat est là : stop désormais à la prostitution politique par le constat comme démission de toute transhumance politique d’un parti à un autre ou d’une organisation à une autre (article 106).

La discipline est désormais de rigueur dans l’article 110 quant à l’adoption de peines visant à obliger le député et le Sénateur à participer aux travaux de commission et des séances plénières.

L’article 113, lui se rapporte au président de l’assemblée nationale et celui du Senat qui peuvent faire l’objet d’une procédure de destitution pour manquement au devoir de leur charge.

Titre V : Du pouvoir judiciaire

Chapitre I : Des dispositions générales

. Un espace juridique d’activité est désormais réservé aux modes alternatifs et traditionnels de règlements des différends dans l’art 129

. La justice est rendue au nom du peuple dit l’art 131

Il affiche également un principe général de la loi à savoir son impartialité dans son application pour élaborer les décisions de justice et s’accompagne de sanctions administratives pour tout manquement par rapport au temps dans les délais prévus par les lois (art 133). Sanctions disciplinaires, ou même poursuites judiciaires s’invitent pour tout manquement de la part du juge à ses devoirs d’indépendance, d’impartialité et de probité qui constitue une faute professionnelle

Pour ce qui concerne la Cour constitutionnelle, au chapitre III un changement majeur affecte d’une part le mandat par sa limitation à un seul par rapport à celui du 25 février 1992 qui accordait un renouvellement une fois ; et d’autre part, le choix des membres dont :

– 2 par le président de la république,

– 1 par le président de l’assemblée Nationale

– 1 par le président du sénat

– 2 par le Conseil supérieur de la de la magistrature

– 2 enseignants chercheurs de droit public désignés par un collège constitué par les recteurs des universités publiques de droit,

– 1 par l’ordre des avocats.

Article 153

Toute disposition législative portant atteinte aux droits et Libertés garantis par la Constitution même à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, soutenu par un justiciable peut faire objet de saisine de la cour constitutionnel sur renvoi de la cour suprême.

Ainsi, la juridiction sursoit à statuer dès que l’exception d’inconstitutionnalité est transmise, jusqu’à réception de la décision de la cour constitutionnel.

Chapitre IV : La cour des comptes

Voici une toute nouvelle institution qui fait son apparition, étant une directive de l’UEMOA, la directive n°01/2009/CM/UEMOA.

Elle est la juridiction supérieure des finances publiques, et l’institution supérieure de contrôle des finances publiques. Elle a des attributions juridictionnelles, de contrôle et de consultation (Art 156).

Elle reçoit les déclarations de biens des assujettis visés aux art 56, c’est-à-dire le Président de la République, 79 (les membres du gouvernement), et 102 (les membres du parlement: Députés et Sénateurs)”…

A suivre

Moussa Natié Diarra

Première promotion master

Faculté de droit public (FDPU)

 

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