La démocratie africaine : Sous coupe réglée CEDEAO

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 Au moment où la communauté internationale viole les textes fondamentaux  du Mali en  nous imposant les leurs, des  écrits émanant d’éminentes personnalités maliennes retiennent notre attention.  Les engagements conclus entre la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et le Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDRE) ont un caractère international.  Lorsqu’il y a coup de force, toutes les institutions sont suspendues  pour permettre l’installation de nouvelles institutions pour la période transitoire.

La CEDEAO profite-t-elle de l’ignorance de  notre classe politique  pour illégalement imposer Dioncounda Traoré comme  président de cette transition ?  Certainement oui ! Comme on le dit souvent : «il est facile de contrôler un peuple analphabète». Tel serait le cas de la communauté internationale. Lisez plutôt cet extrait du l’ouvrage du Dr. Mamadou Simaga «Les chants du Kandjo».

 L’adaptation de la démocratie européenne aux spécificités africaines pose la problématique de la nécessaire conservation des cultures africaines face à la nécessaire évolution de la société africaine dans le concert des nations.

L’Afrique a le devoir de changer sa vision d’elle-même et du reste du monde. Comme l’a dit Jean Paul Sartre, il y a eu le monde des anciens et des masques, ce monde n’existe plus. C’est la volonté de s’assumer pleinement qui doit motiver l’Afrique.

Pour cela, comme le dit Daniel Etoungo Manguelle, «L’Afrique doit apprendre à projeter dans le temps et savoir bien gérer les moyens dont elle dispose. L’Afrique ne doit pas comprendre la démocratie comme une des clauses exigées de l’ajustement structurel, servilement calqué sur la démocratie à l’européenne

A l’Afrique seule de définir sa voie démocratique et, partant de l’arbre à palabres, de transporter la sensibilité de l’Afrique dans les hémicycles des Assemblées des députés, tout ceci ayant pour toile de fond, la participation effective de tous, majorité et minorité parlementaires au développement socio- économique et au partage réel du pouvoir entre tous selon un vrai consensus national de multipartisme ou de pluralisme politique.

En Afrique, la place publique pour les jeunes et l’arbre à palabres pour les vieux, expliquent tout, orientent et définissent tout. Pour occuper notre place dans le concert des nations dans le siècle à venir, il nous faudra nécessairement allier et avec harmonie nos valeurs sociétales traditionnelles bien adaptées à une rigueur de gestion économique de nos Etats. Il nous faut d’abord créer la citoyenneté, qui n’est pas seulement la possession d’un passeport, d’une carte d’identité ou d’une nationalité mais un comportement responsable pour soi, pour les autres, pour l’Etat.

Bref, être citoyen en Afrique, c’est arriver à s’assumer pleinement, à se prendre en charge et en ayant une conscience très élevée de l’humain et de l’Etat, mieux, de ses droits et devoirs.

Par la décentralisation, une chance nous est donnée aujourd’hui pour impliquer tout le monde dans la construction nationale et trouver une solution équilibrée et durable à nos problèmes de développement. Mais ceci suppose l’abandon pour les tenants du pouvoir central du secret mépris qui ôte aux élus ou responsables locaux toute volonté propre, tout espoir réel, toute efficacité.

 Pour la bonne marche de nos institutions et la paix sociale, il faut :

1) Que les dirigeants actuels africains cessent de croire que la vérité est dans leurs mains et d’eux seuls.

2) Qu’ils cessent de prendre, comme l’a dit Rabemanajara, pour critère de vérité, la logique de leurs préjugés ou de leurs passions politiciennes, dans la  mesure où l’on peut parler de logique dans un préjugé ou une passion.

3) Qu’il est temps en Afrique pour les politiques de préférer la conscience à la consigne des partis. Ce qui pose le problème de courage en politique. Courage qui manque bien souvent dans nos pays.

4) Que les dirigeants des partis majoritaires abandonnent cette pratique qui consiste à réserver à leurs militants, les projets, les marchés publics et l’avancement dans la carrière administrative ; enfin, comme l’a dit le Prince Michel Poniaowsky, ami et ancien ministre de l’Intérieur du président Valéry Giscard d’Estaing, évitons que nos pays ne deviennent «La République des copains et des coquins». La démocratie est la meilleure voie qui s’offre aujourd’hui à l’Afrique, car dans son essence, elle est la confiance à l’individu et demande une communication réelle entre les gens d’opinions diverses.

Contrairement à ce qui a été écrit sur nos «rois nègres», le pouvoir a toujours été consensuel. Tout était basé sur le consensus dans nos sociétés ou les lois des mœurs ont toujours  primé sur les lois «écrites». Et la première disposition du consensus dans notre pays est d’ordre social. C’est le cousinage de plaisanterie ou «sinenkougnan».

La démocratie ne pourra s’épanouir que dans un cadre où le sens ou l’amour du bien public est réel. Or, le bien public était plus sacré dans notre pays pré colonial ou le pouvoir ne donnait pas droit à l’enrichissement. C’est ainsi qu’en allant s’allier au roi peulh Amadou Barry du Macina, le roi bamanan de Ségou Ali Diarra, a enfoui sous terre le trésor royal pour ne pas emporter ce qui ne lui appartenait pas, ce qui était le bien public.

C’est un vaste défi pour l’Afrique aujourd’hui à relever au moment où nous  assistons partout à un  duel sans merci dans un pré carré, d’oppositions jalouses et pressées de prendre le pouvoir parce que démunies et de majorités arrogantes, méprisantes et intolérantes parce que disposant du trésor.

 Dr. Mamadou F. Simaga, ancien député- maire de Ségou

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