Vas en paix chantre de l’intégrité et de la dignité !
Tous les Hommes sont mortels, mais les morts n’ont pas le même poids. La Nation malienne pleure aujourd’hui l’un de ses dignes fils en la personne de Daniel Amagoin TESSOUGUE
Pour ma part, c’est en avril 2005 que je fis la connaissance de Daniel lors ma formation d’auditeur de justice. Il se distinguait alors par sa modestie et son verbe haut et franc.
Suite à ma démission de la magistrature en 2008, Daniel fut à mes côtés cherchant vaille que vaille à me retenir dans le corps pour disait-il l’intérêt de la magistrature. Souvenez-vous de sa lettre ouverte parue en octobre 2008 où il écrivait : « J’adhère absolument à ton courroux, contre un système qui pense rapetisser tous les cadres, mais je suis profondément contre ta décision d’abandonner le combat pour plus de justice et dans la défense des droits ». Ses louables efforts furent vains ; parce que l’agenda de Dieu est immuable.
A ma nomination en 2012 en qualité de Garde des Sceaux, je lui ai proposé tous les postes de la justice. Il ne manifesta guère de choix. Je le suppliais alors d’accepter le poste de Procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako. Il accepta pour le Mali sollicitant juste de disposer d’une équipe de magistrats techniquement et moralement bons. C’est ainsi que nous avons fait appel à Mohamed Sidda Dicko et Harizo Maiga. Le premier, pour le Mali, quitta la Cour constitutionnelle pour un poste de procureur de la République !
Procureur général, il fit preuve de courage, d’intégrité et d’efficacité. Il se montra surtout loyal à l’endroit de son auditeur et cadet devenu par un accident de l’histoire son ministre de la Justice.
Comme en 2012, lorsqu’un autre accident de l’histoire me porta de nouveau à la tête du ministère de la Justice en avril 2019, je lui ai proposé de nouveau de venir prendre le poste de son choix. La mort dans l’âme, il déclina pour respecter la parole donnée à ses pairs de la Cour de Justice de l’UEMOA de prendre la tête de l’institution.
En 2020, les qualités exceptionnelles de l’homme et son état de service remarquable me fondèrent à solliciter et obtenir du Président Ibrahim Boubacar Keita (paix à son âme) d’élever Daniel directement au grade d’Officier de l’ordre national du mérite. Pour l’histoire, je témoigne qu’il n’a accepté cette distinction que pour le respect dû à son cadet !
J’ai tant à dire sur toi cher aîné mais je voudrais m’arrêter là ; car même mort, ta modestie en prendrait un coup.
Vas en paix mon cher aîné ! Tu nous laisses orphelins de ton courage, de ton génie, de ton intégrité, de ton sens élevé de l’Etat et de l’honneur.
Lamartine avait raison : « L’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive ; il coule et nous passons » !
Ton cadet et disciple qui te tiendra toujours en très haute estime !
Maître Malick COULIBALY,
Ancien ministre de la Justice