Hold-up de la constitution par son gardien : -le président de la République –

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La constitution étant la norme juridique à la fois suprême et fondamentale de l’ordre juridique interne d’un Etat doit naturellement s’adapter aux besoins et les défis du peuple qu’elle régit.

La nôtre, en date du 25 Février 1992 précise les règles du jeu institutionnel dans le cadre étatique et a prévu au besoin sa propre modalité de révision en son titre XVI intitulé « De la Révision » qui définit les conditions et procédures en la matière.

C’est ainsi que l’article 118 alinéa 1 dispose que « l’initiative de la révision de la constitution appartient concurremment au Président de la République et aux Députés » ;

Et l‘alinéa 2 du même article vise les autorités y habilitées, disposant clairement que « le projet ou la proposition de révision doit être voté par l’Assemblée Nationale à la majorité des deux tiers de ses membres. La révision n’est définitive qu’après avoir été approuvée par référendum ».

Tout pouvoir constituant dérivé c’est-à-dire chargé de réviser la constitution est, par essence, limité, c’est pourquoi quoique dépositaires de cette faculté importante de l’initiative de révision de notre loi fondamentale, ni le Président de la République ni les Députés ne peuvent l’engager ou le poursuivre en présence de certaines circonstances composant les limites édictées par la constitution.

 

Ces limitations qu’elle (constitution) émet au pouvoir des constituants visent deux catégories que sont : la limitation matérielle et celle temporelle.

La limitation matérielle interdit de toucher à la forme républicaine, à la laïcité de l’Etat ainsi que le multipartisme sont des éléments insusceptibles de révision-voire article 118 alinéa 4.

En clair, aucune révision ne peu ne modifier ou transformer la République du Mali en une monarchie, de même en une religion d’Etat ou d’instaurer un parti unique.

Le projet de révision en cours de notre constitution initié par le Président de la République est manifestement anticonstitutionnel.    

Cette inconstitutionnalité du projet de réforme dénote de l’évidence fondée sur des raisons issues de la limitation temporelle. Certes, l’exercice peut paraitre technique et complexe à bien des égards mais reste tout de même perceptible et logique.

La limitation temporelle est une période durant laquelle la constitution ne peut être révisée. Ainsi l’alinéa 3 de l’article 118 dispose que « aucune procédure de la révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire ».

Au Mali, l’atteinte à l’intégrité n’étant à démontrer par des faits du cas Kidal qui demeure à présent sous l’occupation des groupes armes.

L’espèce d’inconstitutionnalité est d’avantage illustrée par une notion classique du droit constitutionnel qui consiste à faire respecter la hiérarchie des normes. Affirmer cette suprematie revient à placer le texte constitutionnel au sommet de la hiérarchie des règles de droit. Ceci dit tout simplement que les normes inferieures doivent respecter les normes supérieures. Pour être effective une telle supériorité doit être vérifiée et les atteintes qui pourraient lui être portées sanctionnées par le contrôle de la constitutionalité des lois.

Par conséquent, les autres normes quelque soit leur nature ou catégorie se doivent de se plier autrement dit, se conformer à la constitution et non inversement.

Ainsi, on ne peut juridiquement réviser la constitution du Mali pour l’adapter à l’accord pour la paix et la réconciliation nationale et cela constituera une violation de notre loi fondamentale.

Autant que l’accord pour la paix et la réconciliation ne peut contenir une disposition contraire à la constitution qu’il ne peut autant servir de repère ou instrument en tant que chose politique pour réviser notre loi fondamentale.

Insister à engager ou à poursuivre ce projet de révision au mépris de tout ce précède et surtout par la Première Institution de la République – le gardien de la constitution constitue purement et simplement un Hold-up organisé qui mérite d’être rejeté à tout prix par la sentence populaire.   

 

Nouhoun KEITA

  • Master Professionnel en Droit des Affaires ;
  • Master Of Sciences en Marketing et Intelligence d’Affaires.

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1 commentaire

  1. Le chef de l’Etat est le garant de la constitution et, à mon avis, toute oeuvre humaine est imparfaite et d’ailleurs de 1992 où cette constitution a été faite à maintenant beaucoup de réalités ont changé dans la vie du pays et l’on doit s’y conformer si adéquation doit être.

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