Les événements récents en Guinée sont une illustration de plus de la déchéance morale de certains hommes qui dirigent l’Afrique…
Pour se maintenir au pouvoir, le général Lansana Conté a donné l’ordre à sa milice tribale appelée « armée » de tirer pour tuer. De tuer des Guinéens qui ne réclamaient qu’une meilleure gestion de leur pays. Sur le pavé, 59 morts ; 59 citoyens tués à bout portant. Pour rien. Ou, du moins, pour garder le pouvoir, pour continuer à détruire le pays le plus riche d’Afrique de l’Ouest en ressources minières et hydrauliques, pour assurer la pérennité de sa mafia de voleurs, d’incompétents et de corrompus.
Le vieux général de Moussaya ou Dubréka (au fait, où est-il né ?) grabataire, impotent et incontinent, continue à narguer son peuple, superbe et méprisant envers les travailleurs, infatué de cet orgueil puéril qui fait la fierté des tyrans. Rongé par la maladie, maintenu en vie par des soins qui coûtent des millions de dollars, réduit à l’état de loque humaine, l’ex-aide de camp de Sékou Touré refuse de se retirer dans la dignité.
Il veut garder le contrôle de ce palais présidentiel cyniquement baptisé Sékoutoureya, un choix révélateur de l’estime qu’il porte à son sinistre prédécesseur. Lansana Conté n’a sa place qu’au gagatorium. Il est devenu une malédiction pour ce peuple qui, décidément, ne connaîtra jamais la paix et la sérénité tant les deux présidents qu’il a connus n’ont leur adresse qu’au musée des horreurs humaines.
Lansana Conté est, hélas, juste une continuation des malheurs de notre continent. Comme Bokassa ou Idi Amin Dada, il est le prototype de ces tirailleurs illettrés formés par l’armée coloniale, ces marmitons incultes et sauvages qui ont profité de la veulerie de certains de leurs compatriotes pour se hisser à la fonction suprême.
Se targuant d’un nationalisme ombrageux qui n’est que pur artifice, ils n’ont de conception des relations humaines que la cruauté et le meurtre. L’animalité caractérielle de ce genre d’individus les conduit à tuer systématiquement tous ceux qu’ils considèrent comme des ennemis, souvent dans l’indifférence générale.
N’est-il pas été évident que la boucherie de Conakry, à part les cercles africains, est restée quasiment confinée à la rubrique des chiens écrasés en Occident ? Peut-être qu’à 59 nègres tués à Conakry, le bilan n’était pas assez dramatique pour provoquer une poussée d’urticaire chez les défenseurs des droits de l’Homme et autres ONG vampires qui vivent des drames de l’Afrique. A 59 morts, pas de quoi déranger la ménagère de Toulouse ou le fermier du Dakota. Les Africains ne deviennent intéressants qu’à partir de mille morts. Et de préférence, quand une vedette de cinéma porno ou un producteur de navet en fait une croisade personnelle.
Qui arrivera à débarrasser les Guinéens de ce régime ? Y aura-t-il un jour des militaires assez courageux et patriotes au camp Samory ou Alpha Yaya pour porter l’estocade finale à ce régime démoniaque qui, tel un cancer avec métastases, détruit la grande Guinée ? Jusqu’à quand laissera-t-on une clique de criminels endurcis terroriser tout un peuple au nom de la sauvegarde d’un pouvoir confisqué par coup d’Etat ?
Aucun Africain honnête ne peut rester indifférent à cette descente aux enfers. C’est le moment ou jamais d’aider la Guinée à renaître. Car, quoi que l’on dise, une guerre civile dans ce pays n’épargnera aucun autre de la sous-région. Il est temps que les Guinéens s’unissent pour mettre fin à la dictature sauvage de Lansana Conté.
Ousmane Sow
(journaliste, Montréal)
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