Groupes armés terroristes : des candidats au dialogue ?

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Comment sortir de la crise sécuritaire au Mali ? Six ans après l’intervention française pour stopper l’expansion des djihadistes, et ce, malgré les nombreuses victoires de Barkhane et de la Minusma, le chemin vers la paix est encore long. Preuve en est la dernière attaque spectaculaire le 20 janvier dernier contre le camp de la Minusma à Aguelhok, qualifiée de « sans précédent » par les autorités militaires. Malgré d’indéniables succès des forces de sécurité maliennes qui ne cessent de monter en puissance, les terroristes multiplient les attaques et le retour à la paix s’enlise. La fin du conflit pourrait-elle passer par l’établissement d’un terrain d’entente avec certains GAT moins radicaux?

Nombreux acteurs de la sphère politique estiment qu’il est temps de changer d’approche pour ramener la paix au Mali. Comme le soulignait déjà l’organisation indépendante International Crisis Group dans un rapport de 2016 « l’Etat est contesté mais pas complètement rejeté ». Trois ans plus tard, rien n’a changé. Les critiques sont même de plus en plus nombreuses et la confiance de moins en moins partagée. Les élites politiques maliennes sont mises aujourd’hui devant leur pleine responsabilité et leur échec. Afin que le Mali soit au rendez-vous avec l’histoire, les stratégies déployées au Sahel devraient maintenant laisser place à une solution partagée définie dans un dialogue plus élargi tout en restant dans l’application de l’APR.

Faut-il dialoguer avec les groupes terroristes maliens ? C’est un sujet embarrassant et pourtant, suite au rapport de la conférence d’entente nationale du 02 avril 2017, une recommandation y est inscrite, celle de « promouvoir une culture de paix et de dialogue avec tous les fils de la nation, y compris avec des islamistes maliens dans la mesure où leurs préoccupations n’entament pas l’unité nationale et les fondements de la République ». Cela signifie que le gouvernement malien et les mouvements signataires de l’APR (CMA et plateforme) cessent leurs rivalités ou de se stigmatiser et s’attellent ensemble à restaurer la sécurité.

C’est un vrai dilemme que d’imaginer négocier avec un ennemi qui a recours à des actions terroristes. Mais certains groupes armés terroristes sont perçus, dans certains villages, comme les garants de leur sécurité que l’Etat n’a plus été capable d’assurer faute d’occuper fermement le terrain contre ces GAT. Concrètement, prenons le cas d’Iyad Ag Ghaly, chef du JNIM, et touareg Ifoghas. Avant sa bascule dans la sphère djihadiste, il était une figure centrale de la rébellion touareg contre le pouvoir central dans les années 90. Il a signé d’ailleurs un accord de paix avec Bamako qui conduisit, le 26 mars 1996, à la dissolution de son Mouvement Populaire de l’Azawad (MPA), au cours d’une cérémonie symbolique où 3000 armes furent brûlées à Tombouctou. Mais Iyad, certainement par ambition personnelle, a repris les armes et s’est opposé aux accords d’Alger. On peut légitimement penser qu’à l’image du « Iyad des années 90 », certains de ses lieutenants du JNIM ainsi que les leaders d’autres katiba, hisba ou GAT malien, souhaitent davantage trouver un consensus qui mène à la paix en formulant notamment des revendications claires et acceptables à l’image de leurs frères GAS. Si Iyad est un irréductible, tous les leaders GAT ne le sont pas. Certains ont manifesté publiquement leurs désaccords sur les exactions menées sur les populations ou sur les assassinats façon djihadiste très loin de ressembler à la façon dont notre culture traite ses différends intercommunautaires.

Négocier avec les terroristes semble être une idée tabou mais loin d’être nouvelle. Elle avait notamment été abordée lors de la Conférence d’entente nationale tenue en avril 2017 à Bamako. Au terme des discussions, les 300 participants (porte-paroles du gouvernement, de l’opposition, des groupes armés, société civile) avaient prôné l’organisation de rencontres pour savoir ce que les djihadistes voulaient vraiment. Deux ans plus tard, l’idée est toujours d’actualité. Au-delà du problème moral, nous devons nous poser des questions pragmatiques : « dialoguer avec les terroristes maliens ouverts à la négociation apporterait-il plus de sécurité à la population ?».

Issa Bâ

@issaba170

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