Filiales et succursales des groupes financiers au Mali : Quelle organisation pour les activités digitales ?

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Les offres de services financiers : des compagnies d’assurances et des banques sont des services vitaux pour le développement d’une entreprise et d’un pays. Elles sont pour l’économie ce qu’est l’oxygène pour le corps humain. L’une pour recevoir et mobiliser les ressources et financer les activités économiques et l’autre pour gérer, réduire les potentiels risques que les agents économiques rencontrent dans le cadre de leur activité.

 

Malgré la crise multidimensionnelle que traverse notre pays, combinée à un faible niveau de revenus de nos compatriotes et les spécificités de notre société ne favorisant pas une culture des services des assureurs et des banques, le Mali continue de susciter l’intérêt des grands groupes financiers qui s’y installent progressivement en nombre pour certains et d’autres déjà présents, tente de renforcer leur position sur le marché.

Les groupes financiers opèrent ces choix stratégiques grâce à des données statistiques et financières fiables du marché et une volonté d’internationaliser leurs activités. Ces quelques chiffres témoignent de la justesse et la pertinence de leur décision de s’implanter chez nous.

A la lecture croisée du dernier Rapport annuel du Marché de l’Assurance de la Direction nationale du Trésor et la Comptabilité publique (DNTCP) et du dernier Rapport annuel de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bcéao) sur la situation de l’Inclusion financière dans l’Union économique Monétaire Ouest-africaine (Uémoa), on se rend compte qu’au Mali, le marché de l’assurance enregistre une croissance exponentielle au cours des dernières années.

En 2016, les assureurs ont généré 41,2 milliards F CFA de primes contre 34,8 milliards F CFA en 2015, soit une augmentation de 18,4 %.

Les primes émises des sociétés non vie augmentent d’année en année depuis 2017. Elles passent de 36,913 milliards en 2017 à 37,762 milliards en 2018, soit une croissance de 2,30 % pour se situer à 39,657 milliards en 2019, correspondant à un accroissement de 5,02 %.

Les primes émises par les compagnies vie ont augmenté progressivement depuis 2017. Elles sont ressorties à 8,136 milliards en 2017 pour s’établir à 10,389 milliards en 2018, soit une hausse de 27,69 % pour ensuite se situer à 12,655 milliards en 2019 correspondant à une évolution de 21,81 % par rapport à l’année précédente.

Le chiffre d’affaires du marché a plus que doublé en moins de huit ans. Il s’élevait à 20,4 milliards F CFA en 2008 contre 48,2243 milliards F CFA en 2018 et à 52,312 milliards en 2019. Selon le dernier Rapport annuel de la DNTCP.

Ces chiffres continueront d’être de plus en plus intéressants, parce qu’ils attestent en soit déjà une dynamique économique. Les agents économiques sont rétifs à prendre des risques, ce qui entrave l’innovation et freine leurs activités. Les compagnies d’assurance proposent de couvrir ces risques. Les assurés choisissent la certitude d’une petite perte à l’incertitude d’une grosse perte. Plus les agents économiques souscrivent à des services des compagnies d’assurances, plus ils développent leurs activités dans la sérénité. Plus leurs activités économiques s’accroissent, plus ils auront le besoin et la capacité d’acheter les produits des assureurs. C’est un cercle vertueux !

En ce qui concerne les banques, là aussi les perspectives s’annoncent très bonnes comme l’attestent les données sur le Mali du dernier Rapport de la Bcéao sur l’Evolution des Indicateurs de Suivi de l’Inclusion financière dans l’espace Uémoa.

Le taux de bancarisation au Mali est en dessous de la moyenne de l’Uémoa. Notre pays affiche un taux de bancarisation Strict (TBS) de 14,24 % contre 18,03 % et un taux de bancarisation élargi (TBE) de 42,60 % contre 60,11 % au sein de l’Uémoa.

Le Mali affiche un taux global d’utilisation des services financiers (TGUSF) 37,88 % en 2018 et 42,60 % en 2019 soit une progression de +4,72 points de pourcentage. Ainsi, notre pays a désormais un taux de progression de l’Inclusion financière supérieur à celui de la moyenne de l’Uémoa (+4,72 % contre +4,6 %).

Notre pays, avec un Taux global d’Utilisation des Services de Monnaie électronique (TUSME) de 22,97 % est en arrière de la moyenne de l’espace Uémoa qui est de 39,65 %. Néanmoins, le Mali enregistre une progression de 5,51 points de pourcentage, supérieure à la moyenne de l’Uémoa qui est de 5,4 points de pourcentage. Selon le dernier Rapport de la Bcéao.

Ces statistiques financières hybrident à leur tour les données sociales de la Bcéao sur notre pays qui a plus de Vingt (20) millions d’habitants, dont quarante-sept pourcent (47 %) ont moins de quinze ans (15) ans. Et un taux d’alphabétisation de soixante-quinze (75 %), démontre que quelles que soient les fluctuations des indicateurs financiers concernant notre pays, elles démontrent toutes l’attractivité du marché financier malien. Soit en termes de dynamisme quant aux performances, soit aux niches d’opportunités sous-exploitées quant aux retards par rapport à la moyenne de l’Uémoa.

Les données sur l’utilisation du digital au Mali affichent près de 6 millions d’utilisateurs en 2021, avec un taux de pénétration de l’internet de +18,5 % selon Hootsuite.

Une chose est de pouvoir investir un marché, une autre est de pouvoir répondre aux besoins de sa clientèle en la satisfaisant et en la fidélisant afin d’amorcer son développement, d’augmenter son chiffre d’affaires et assurer sa compétitivité sur son cœur de marché.

Le marketing relationnel est l’un des domaines clés pouvant permettre aux organisations d’atteindre ces objectifs.

Le marketing relationnel est une politique visant à établir des relations individualisées et interactives avec les clients, en vue de créer et d’entretenir chez eux des attitudes positives durables à l’égard de l’entreprise ou de la marque.

Cette définition met en évidence deux caractéristiques du marketing relationnel. Nous mentionnons celle qui nous intéresse ici à savoir : l’utilisation des moyens d’actions individualisés et interactifs à la différence des moyens de communications de masse utilisés par d’autre approche.

La mise en place et l’animation d’une telle relation passe forcément aujourd’hui par l’utilisation des outils digitaux.

Assurer sa présence en ligne aujourd’hui n’est plus une innovation incrémentale de différenciation, c’est devenu une politique d’adaptation au jeu concurrentiel pour bénéficier à son tour des avantages liés à l’utilisation croissante des NTICs, comme toute entité ambitieuse.

Les représentations des groupes financiers au Mali peuvent adopter quel type politique digitale et de quelle manière ?

Les entreprises nouvellement en ligne pourront-elles atteindre, voire dépasser celle déjà présentes ? Surtout quand on sait que celles qui accumulent quelques années d’ancienneté bénéficient de ce qu’on appelle ‘’l’avantage du pionnier’’ notamment l’effet d’expérience et la préemption d’un positionnement.

Il est clair que l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie digitale nécessitent des compétences particulières que toutes ces entreprises ne disposent pas forcément.

Faut-il le rappeler, cette tribune ne traite pas de la transformation digitale des filiales et succursales des groupes financiers au Mali. Laquelle transformation consiste à faire passer toute l’entreprise à l’ère du numérique : de son fonctionnement interne (RH, achat, finance, productivité des collaborateurs etc.) comme dans sa relation avec ses publics externes (offres, distributions, communication et service client).

Nous nous limitons à la problématique de la digitalisation du volet marketing dans ces entreprises.

Nous estimons que ces structures doivent impérativement éviter deux postures : l’absence d’une politique digitale pour chaque entité. Et la pratique d’une politique digitale exclusivement centralisée et concentrée, c’est-à-dire la conception d’une stratégie digitale et l’exécution du plan digital par la maison mère des filiales et succursales sans tenir compte des besoins et exigences spécifiques de chaque public auquel s’adressent les représentations des différentes marques. Une telle démarche peut se montrer inefficace voire contre-productive.

Déployer une politique de marketing digital au profit de sa marque nécessite le développement d’un site internet performant pour l’entreprise, appuyée par les différentes pages dédiées sur les médias sociaux, le tout combiné à un logiciel de CRM. Une gestion harmonieuse, une bonne animation, un suivi et une évaluation de ce dispositif permet à toute entreprise d’atteindre ses objectifs de manière efficace et efficiente.

La structure organisationnelle qui nous paraît pertinente pour les filiales et les succursales des groupes financiers présents au Mali, semble être celle qui est à cheval entre l’organisation par Silo et l’organisation centralisée. Il s’agit de celle qui permet une gestion autonome au niveau de chaque société. Elles définissent leur stratégie, allouent leur budget, gèrent leurs équipes et leurs compétences. Tout en tenant en compte de la double exigence : la particularité de son marché et la nécessité du droit de regard de la maison mère.

Cette gestion autonome des activités digitales permet à l’entreprise de s’adapter à son marché et d’atteindre ses objectifs. Bien entendu, l’autonomie ne signifie pas indépendance, la stratégie digitale locale devra s’inspirer autant que ce peut de la stratégie digitale globale. Les quelques décisions majeures qui doivent être prises des fois peuvent être soumises à l’approbation de la maison mère.

De plus, cette dernière pourra toujours garder le privilège du choix d’une même société de conseil en CRM qui appuiera les représentations de la marque. Et une même plateforme technologique pour la gestion des sites internet etc.

Cette position intermédiaire permet à la maison mère de laisser une liberté opérationnelle indispensable à l’efficacité de ses démembrements et maintenir une certaine cohérence et harmonie de sa marque.

Pour vous montrer la pertinence du développement d’une présence en ligne singulière pour chaque société, nous prenons l’exemple des compétitions sportives.

Sachant que rassembler une communauté et la faire vivre fait partie des principaux chantiers d’une politique des réseaux sociaux. Etant donné que le football est le sport roi au Mali et en Côte-d’Ivoire.

Si ces pays se rencontrent lors de la Can, quelle sera la position d’une marque dont la maison mère est à Abidjan et qui a une filiale à Bamako ? Le silence et une mauvaise prise de position peuvent attirer les foudres des internautes qui peuvent éventuellement coûter cher à l’entreprise.

Pour éviter des embarras du genre, chacun peut et doit se tenir au côté de son public cible lors de tel événement.

Le numérique favorise l’émergence des stratégies à double avantage.

La pratique du marketing digital apporte des avantages tellement pertinents qu’aucune entreprise vendant des services et biens de grande consommation ou qui fonde sa compétitivité sur une approche de différenciation de l’offre ne peut s’en passer.

Parmi ses avantages pour ces entreprises, on peut évoquer quelques-uns sans être exhaustif.

 

De l’augmentation des volumes de vente et la rentabilité :

Pour accroître le portefeuille client et le volume de vente, le digital s’avère un outil très puissant, en ce qu’il permet de faire connaître et aimer l’entreprise et ses produits et de développer la demande primaire.

De l’accroissement du panier moyen par client : Il s’agit de la moyenne des achats effectués dans un même point de vente en une visite par un même client. A travers :

La hausse du taux de nourriture de la marque : c’est la part de dépenses qu’un client consacre à une entreprise pour une certaine catégorie de produit.

La méthode up-selling : il consiste à convaincre les clients à acheter un produit plus cher ou plus rentable lors d’un achat. Et de pousser les clients à acheter des suppléments de services et des produits complémentaires.

La méthode cross-selling : il s’agit de convaincre un client qui achète (ou a acheté) le produit A de la marque, d’acheter également les produits B de la même entreprise.

 

De la segmentation et du ciblage des clients :

Si l’utilisation des outils digitaux a apporté une facilité et une pertinence phénoménales dans l’accomplissement d’une tâche, c’est bien aussi dans les missions de segmentation et de ciblage marketing. Il permet de multiplier et de faciliter la collecte, la sauvegarde, le traitement et l’analyse d’un volume important de données clients.

Avec Internet, les représentations des groupes au Mali peuvent cibler leurs clients et leur communauté numérique de façon individualisée sans segmentation préalable, soit en regroupant les internautes en segments ou micro segments auxquels elles peuvent adresser une offre et un message adaptés.

Les techniques de ciblage en ligne permettent aux entreprises de cibler les internautes selon leur profil sociodémographique et leur position géographique.

Il existe aussi le ciblage temporel : l’internaute est ciblé à un certain moment de la journée, ou de la semaine.

Le ciblage contextuel : elles peuvent cibler l’internaute en fonction de ce qu’il recherche sur Google ou d’autres moteurs de recherche ou en fonction du contenu qu’il visionne.

Le ciblage comportemental : elles peuvent cibler les internautes en fonction de son historique de navigation observé dans un passé récent (la consultation d’une page produite, clic sur une bannière) ou son historique d’achat.

 

De la satisfaction au déploiement d’un programme de fidélisation :

Grâce au dispositif digital, les entreprises peuvent entretenir une communication fluide et interactive avec leurs clients, collecter et analyser des données clients afin de prendre en compte efficacement leurs préoccupations.

Ce service client permet de contribuer à la satisfaction clients et d’obtenir une fidélité active.

Le marketing facilite la mise en œuvre d’un programme de fidélisation pour la création d’un courant pour éviter les défections ou la réduction des dépenses des clients.

L’accompagnement des clients par la distribution des récompenses et faciliter le parcours des petits clients à devenir grand.

La création d’une zone de non-retour décourageant toute attrition et réduction de dépenses.

Ce mécanisme permet à la société de jouer sur les composantes attitudinales de la fidélité à savoir le cognitive, affective et la conative.

Le marketing digital bien appliqué permet d’augmenter la valeur perçue de l’offre des filiales et succursales des groupes financiers au Mali et leur fera acquérir un positionnement attractif, crédible et profitable. Ainsi ces entreprises pourront atteindre leurs objectifs de croissance dans de meilleures conditions sur un marché de plus en plus compétitif.

 

Aliou Maïga

Marketeur

E-mail : [email protected]

Tel : +223 73 30 47 72

 

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