Etre ou ne pas être Charlie

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Abdourahamane Ben Mamata TOURE

Depuis ces actes infrahumains, de  nombreux musulmans ont manifesté leur indignation nécessaire et salutaire (en France et dans le monde, avec le mouvement  « je suis Charlie »). Au delà de cette dénonciation indispensable, il est nécessaire d’aller plus en profondeur, et entrer dans une autocritique de la liberté au lieu de rester focalisé sur la religion comme civilisation dans ce moment de transition cruciale de sa longue histoire. Pour le meilleur de la liberté.

Dans un esprit de fraternité entre humanistes athées,  croyants de bonne volonté, c’est avec joie que nous pouvons partager ces quelques réflexions pour, découvrir un autre visage de la liberté, et peut-être prendre nous aussi quelque chose de cette sagesse qui consiste à vouloir se réformer pour être plus fidèle à notre liberté.

Les caricatures provocatrices, soulèvent une vive émotion chez les Musulmans, et bien au-delà. En effet,  le satyre ne met pas en scène un fait anodin de la foi Musulmane, mais l’un de ses événements fondateurs.

Face aux manifestations et aux violentes polémiques suscitées par ces acciacatures, les auteurs invoquent la liberté de création. Mais la liberté de création n’est pas un droit absolu et entre en conflit avec d’autres droits fondamentaux de la personnalité, notamment le droit au respect des croyances.

Le prolongement de la liberté de conscience est le droit pour chacun d’être protégé contre les atteintes à ses convictions religieuses ou philosophiques. Ce droit est consacré par les grands textes (article 10 de la Déclaration des droits de l’homme : “Nul ne doit être inquiété pour ses opinions mêmes religieuses” ; l’article 1er de la Constitution Française du 4 octobre 1958  a surtout élevé le respect des croyances au rang de principe constitutionnel en énonçant : “La France assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances.” Ce droit à la protection du sentiment religieux est aussi affirmé par les textes internationaux, notamment l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Sur le fondement de ces textes, le juge a consacré le droit au respect des croyances. Le point de départ de cette jurisprudence a pour origine la fameuse affaire de l’affiche “Ave Maria” représentant, d’une manière provocatrice, une jeune femme fixée sur une croix, pieds et poings retenus par des cordes. Dans une décision désormais célèbre, le juge des référés a jugé que le droit au respect des croyances devait être garanti dans une société protectrice des droits de l’homme : la représentation du symbole de la croix dans un lieu public constituant un acte d’intrusion agressive et gratuite dans le tréfonds intime des croyances.

Cette décision a fait jurisprudence et a été reprise dans plusieurs affaires. Aujourd’hui, la Cour de cassation a jugé que le droit au respect des croyances s’articule naturellement avec les dispositions spéciales de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse qui visent la diffamation et l’injure à raison de la religion.

Ce rappel du droit positif français nous paraît nécessaire au moment où est invoqué, à tort et à travers, un prétendu délit de blasphème. La référence à cette notion n’est pas neutre car elle renvoie le droit légitime des Musulmans à un combat archaïque et d’un autre âge. Le principe de laïcité postule le pluralisme des valeurs. Le blasphème est une offense au divin ; il n’a aucun fondement légal et n’existe pas dans une société laïque. Seul, le droit au respect des croyances, droit fondamental de la personnalité, reconnu par les grands textes et par le juge peut être revendiqué.

Ce droit au respect des croyances est d’égale valeur à celui de la liberté de création. Alors, cette liberté de création ne vaut que par l’usage que l’on en fait car le principe qui la fonde est le même qui la borne. Lorsque la liberté dans son usage ne crèe que  division, offense outrage, nous pouvons affirmer que cette liberté est une mauvaise liberté, elle doit tenir compte et intégrer  la sensibilité de l’autre en ne l’heurtant pas. C’est ce qu’on appelle les limites naturelles de la liberté, au delà nous tombons dans l’intégrisme de la liberté qui est aussi funeste que le terrorisme. L’une des explications possibles de la radicalisation se trouve dans l’agitation d’un état psychologique néfaste par offense au symbole de tous les musulmans. En s’attaquant à Mahomet, on ne s’attaque pas au terrorisme mais à l’Islam car Mahomet n’est pas le symbole du terrorisme mais des Musulmans.

Alors dans un élan de réhabilitation de l’athéisme, certains esprits libres, fiers d’être du pays de la liberté nous invitent à revisiter   pêle-mêle : Rabelais pour son irrévérence et son humanisme, Diderot pour sa “lettre sur les aveugles …”, Léo Ferré pour son “ni Dieu, ni maître”, Stéphane Hessel pour son “indignez-vous”, Zola pour son “j’accuse” et beaucoup d’autres. L’unanimisme généralisée du « Je suis Charlie » doit nous amener à nous demander ce qu’est « être Charlie » ?

Est ce qu’être Charlie,  c’est cautionner la normalisation de l’offense ?
Si tel est le cas je ne suis pas Charlie, cependant rien ne peut justifier l’acte des terroristes.

Abdourahamane Ben Mamata TOURE

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4 COMMENTAIRES

  1. LE TOUT NOUVEAU PRODUIT IMPORT, DEPUIS L’OCCIDENT : » JE SUIS CHARLIE »/ »JE NE SUIS PAS CHARLIE » , A EU BEAUCOUP DE PRENEURS.
    DES PRÉSIDENTS DES » REPUBLICA BANANA », EN PASSANT PAR LES « INTELLIGENTIA », AUX SIMPLES SUJETS DES « PLANTACIONE » ; FAISANT OUBLIER Á TOUS ET Á CHACUN LES DANGERS DE MORT QUI GETENT LES BASSES COURS DE LA FRANCE.
    …..
    RIRES… LA FRANCE MANIPULE SA BASSE-COUR, TOUT COMME PAVLOV SON CH-I-EN, SELON
    LE PRINCIPE DES RÉFLEXES CONDITIONNÉS…. RIRES ET ENCORE RIRES

    RIRES Á L’ INFIN … LE NEGRE !!

  2. This article is an interesting analogy of the fallacies of inconsistency displayed by the French jurisprudence on the questions related to freedom of speech.

    I like to congratulate the writer of this article on his impressive understanding of the law as it relate to the nature of free speech, versus offensive speech.

  3. N’TJI DIARRA DIT:

    MOI, JE SUIS BAMBARA, BAMBARA DE SÉGOUKORO.
    J’ ADORE ET RESPECTE MES BOLI, MES DJO ET MES KOROTÉ.
    JE BOIS LE DOLO, LA BIERE DE MIL.
    LA NOTION DE « CHARLIE HEBDO » M’ ÉCHAPPE COMPLETEMENT ET JE VIE BIEN SANS ELLE….
    JE PENSE ET ME DOIS RESPECTER L’HÉRITAGE BAMBARA DE MES AIEULS BAMBARA.
    EN SOMME, JE NE SUIS PAS UN PROSTITUÉ CULTUREL, RÉLIGIEUX, ÉCONOMIQUE,….
    JE SUIS CE QUE JE SUIS, JE REFUSE D’ ETRE CE QU’ ON VEUT QUE JE SOIS.

    IBK AURAIT EU PLUS RAISON DE SE PENDRE, SAUTER DE L’ AVION, BOIRE UN VERRE DE JOHNY WALKER AVEC UN COMPRIMÉ DE CIAN, …. .
    MÉPRISER LES MORTS QUI SONT LES SIENS, LES MILITAIRES MORTS POUR LE MALI DONT IL EST PRÉSIDENT…
    L’ INSULTE D’ IBK ENVERS LA RÉPUBLIQUE DU MALI EST IMPARDONNABLE.
    IBK A VIOLÉ PAS SEULEMENT SON SERMENT DE PRISE DE POUVOIR, MAIS LA CONSTITUTION DE LA RÉPUBLIQUE DU MALI.

    • @Jahman.Kayaman ……………………………cet article est parfaitement bien écrit et logique . Celui qui l’a écrit a une grande ouverture d’esprit ,mais comment faire comprendre certaines choses à des ignorants obtus et analphabètes ??????
      IBK n’est pas ma tasse de thé , mais pour une fois il est venu défiler à Paris pour montrer la reconnaissance du Mali à la France pour son intervention en janvier 2013 qui a permis à bon nombre d’entre vous de garder leurs mains pour écrire des co..nneries !!!!
      12 morts chez Charlie Hebdo contre 11 soldats français au Mali pour vous défendre ,ne l’oubliez pas 👿 👿 👿 👿 👿 👿 👿

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