Entre la vie et la mort, il n’y a guère de place pour l’épingle !

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Je suis  effondré. Il avait le sens de l’humain. Il avait une méthode d’approche unique à lui-même. Il avait un sens d’écoute très élevé. Il avait une vision. Il était dynamique et authentique. En termes moins extravagants, C’était un homme exceptionnel.

Mr Sidy Danioko

Depuis le 13  septembre 2012, il n’est de jour  qui ne soit marqué par des messages d’hommage au Professeur Dialla Konaté. L’évènement tragique que nous vivons actuellement, auquel personne n’est préparé, produisit un grand éventail d’émotions comme la colère, le désespoir, l’incompréhension, la tristesse. Le choc passé, nous le vivons différemment, et le souvenir du Professeur Dialla reste en nous. L’avalanche d’hommages sur les différents sites de communication en témoigne. Je m’accorde donc à louer les qualités d’un érudit, d’un visionnaire et d’un prêcheur du Mali meilleur.

Par différents moyens, que ce soit par nos repères rituels, notre foi et nos convictions personnelles,  nous sommes tous en train de chercher un refuge moral afin de trouver un appui  mental. Ceci est légitime eu égard aux relations de taille que chacun de nous a eu  à établir avec ce sommet de la connaissance. Des relations qui nous ont tant servis d’une manière ou d’une autre et que nous avions tant chéries et intériorisées, font de ce grand patriote une partie intégrante de nous-mêmes.

Essayer de transcender la douleur dégénérée de ce départ brutal et très difficile pour ceux qui ont toujours réclamé une justice sociale, un patriotisme aigu, une éducation nourricière de l’excellence, et un  Mali meilleur. Car ceux-ci furent le credo de sa vie. Ainsi, Le vide crée par ce départ est vu comme une amputation de notre moi.

Naturellement, ceux-là qui n’ont pas eu la chance de collaborer avec Pr Dialla poseront multiples questions, comme : Qui est cet homme ? Pourquoi autant d’hommages pour lui ?, Qu’est est ce qui est singulier en lui ? Quelles sont les raisons pour lesquelles ils ne peuvent pas arrêter de parler ce Professeur ?

Essayer de répondre à ces questions serait de fixer des idées sur sa singularité, ses aptitudes et ses perceptions. Avec toute modestie gardée, la réponse à ces questions réside dans son charisme, son honnêteté, sa générosité presque au-delà des forces humaines. Sa soif d’unité ou de fraternité  fut toujours  éprouvée face à n’importe quelle situation.

Quiconque eut le privilège de rencontrer Pr Konaté vous parlera de son franc-parler. Il ne laissa place à aucune critique sous-jacente. Ses remarques provoquèrent toujours une tempête. En effet, J’ai connu le Professeur Dialla Konate à ma troisième année  à la faculté des Sciences et Techniques (FAST) du Mali pendant qu’il dispensait brièvement des cours de LATEX. Sa présence éphémère fut l’objet de grands débats et le foyer de nombreux arguments. Il critiqua tout ce qui atteignit à la dignité du savoir et celle de l’environnement scolaire. Il dénonça le système éducatif malien et sa malaise profonde qui nuit à l’estime de soi des élèves : surcharges des classes, rythmes scolaires controverses, menaces de déscolarisation, production des diplômés non compétitifs sur le marché actuel de l’excellence. .

Dès lors nous entretînmes de bonnes relations à travers lesquelles il ne cessa de me dire de faire très attention quand je critique les dirigeants et les politiciens de notre pays. Car, selon lui j’étais si jeune et fragile. Je m’accorde donc ce privilège à souligner qu’il fut conscient des incertitudes et dangers qui pourraient baliser sur son chemin. Hélas, il choisit le Mali à sa vie et à son travail. Aujourd’hui, ceci me permet donc de lui accorder mon humble respect quand il réitéra  que « nous avons tous un crédit moral envers le Mali […], quoiqu’il nous prendra, nous devons payer ce qu’on doit à ce pays ». Il ne cessa ni de prêcher une distribution uniforme des fruits de la démocratie, ni de prôner la justice entre tous les citoyens maliens.  

Assurément, les souvenirs de ceux qui nous sont chers se reposent sur quelque chose de réel. Les miens se fléchissent sur des débats féconds, bien que souvent houleux et contradictoires, que j’ai eus avec le Professeur. Ceux-ci se portaient sur les différents fléaux qui ne cessent de ronger notre nation, comme la corruption, le vol, la mauvaise gouvernance, l’indifférence de nos leaders face au déclin de nos valeurs sociétales et dans la formation des neo-analphabetes, pour ne citer que ceux-ci. Le professeur s’est toujours imposé non pas par les attributs de son diplôme, mais par la clarté de ses idées, la cohérence dans ses analyses,  et la rationalité derrière ses explications. A maestro, il refusa tout  ce qui n’est pas en accord avec le questionnement Socratique et le raisonnement scientifique.

Ce valeureux homme vient de nous quitter pour de bon, mais en nous laissant un héritage patriotique immense. Ici et ailleurs, ceci servira de semences pour la future vie patriotique de ses enfants (jeunes maliens), les enfants de ses enfants, le malien tout court.

Pr Dialla, je vous laisse du bout de mes doigts mais pas du fond cœur .Pendant que vous effectuiez l’infini voyage que vous veniez d’entreprendre, surtout, comprenez que vous aviez gagné votre combat. Les flammes de votre âme se bruleront toujours et à l’indéfini sous nos cheveux. Votre esprit fécondera pour l’éternité. Des jalons patriotiques que vous aviez déposés germeront de plus forts sentiments de patriotisme. Ces nobles sentiments manifesteront la fierté  d’avoir des penchants pour la défense des droits fondamentaux comme le droit d’être un être, et le droit de jouir a son être.

Vous aviez bien marqué votre passage!  Vivre n’est pas de vivre pour toute l’éternité, mais c’est d’être fini. C’est de parcourir la vie, mais en laissant des traces qui resteront indélébiles et incruster dans l’histoire et dans la mémoire des semblables que vous aviez laissés  derrière vous. C’est d’accepter de venir et ne pas refuser de partir. Vivre c’est de déposer des marques qui ne s’effaceront jamais à coups de vent. Vivre, c’est de mourir sans mourir, c’est de s’apprêter pour l’appel divin qui ne sera jamais la bienvenue par le plus grand des hospitaliers. C’est de partir tout en restant. C’est comme cela que les grands hommes se font distinguer. C’est cela la signature des grands hommes.

Que c’est douloureux de ne plus voir un grand patriote parmi nous .Que c’est déconcertant de voir un être qui vibre pour les causes de la justice sociale ! Que c’est désespérant de voir le combattant de la  souveraineté du peuple, de la légitimité de l’Etat, et de la dignité du citoyen malien nous tourner le dos pour un voyage sans fin ! Mais, nous ne ferons qu’accepter la perte de notre père, oncle, frère, ami, cousin, enseignant, conseiller,….. Car la mort est le commun des mortels. Car, un jour c’est l’heure de la mort.

Aujourd’hui plus que jamais l’érudit malien a tant besoin de nos prières. Prions que l’engagement de ses idées ne meurt pas avec lui. Prions que ses contributions de poids  ne s’éteignent pas pendant quelques heures. Prions que ses prêches pour notre pays soient exhaussés. Prions que sa passion pour le bien être de ses concitoyens soit source d’idées salvatrices  pour les plus vulnérables et les plus assoiffés.

Nos prières ne doivent pas être d’un seul instant nous devons y être fidèles. Faute de cette fidélité, nous trahirons non seulement les aspirations et les luttes du défunt, mais aussi nous serons enclin à une complicité qui s’installerait dans nos cœurs. Un tel acte serait si grave, si contraire au bien et à la justice sociale.

Votre franc-parler les dérangeait. Bien vrai que vous soyez parti, il résonnera toujours dans les coins les plus éloignés  tant que certains continueront  de faire des victimes, des mécontents, des déçus,…. Bon Voyage mon Professeur, Votre détermination sera perpétuée. Certains vivront heureux de vos actes. Ceci fut votre désir. Un homme sans désir ne peut se réclamer le bonheur !

Une contribution de Sidy Danioko

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