La question n’est pas simple et requiert beaucoup de recul. Pourtant c’est à cet exercice difficile que va s’essayer l’acteur politique doublé du praticien du Droit que nous sommes, bien sûr avec toute l’humilité nécessaire et sans fausse modestie non plus. L’heure étant à la refondation du pays, processus dans lequel il s’avère indispensable d’entendre le maximum de nos concitoyens.
Cela dit, pour répondre à notre question, disons qu’un seul article de presse ne suffirait pas pour parler de tous les enseignements issus des dernières législatives. Voilà pourquoi nous nous contenterons d’en recenser quelques uns.
Ainsi, sur le plan organisationnel, on peut se réjouir du bon niveau d’organisation du scrutin. Et l’introduction de la biométrie a considérablement baissé le niveau de la fraude.
Cependant, des interrogations demeurent sur d’autres volets. Notamment le choix des agents électoraux (Présidents et assesseurs). Ce choix est-il effectivement libre de toute considération partisane ? Nous pensons sincèrement que non.
Mais il y a pire à savoir l’achat des consciences et la corruption. Deux phénomènes qui sont en train de prendre des proportions inquiétantes. Ils ne favorisent pas l’élection d’hommes de valeur. Il en va de même pour certaines pratiques. Celles-là même qui consistent à raser des rues avec des bulldozers, à offrir des bus comme corbillards au vu et au su de tout le monde, construction de bornes fontaines, de puits, équipements des centres de santé en panneaux solaires.
Questions : N’est-il pas possible de prévoir un dispositif permettant de disqualifier des candidats qui se rendront coupables de telles pratiques ? Le débat reste ouvert.
L’organisation du transport des militants n’est-elle pas le canal adéquat pour des consignes de vote ? Le couronnement de tout cela étant la distribution des espèces sonnantes et trébuchantes à bord des bus (1000, 2000, 3000 voire 5000FCFA).
Le taux de participation
Au centre de toutes les préoccupations, le taux de participation mérite cependant d’être relativisé à cause de l’inscription automatique ; car tous ceux qui sont inscrits ne veulent pas forcément voter. Pour autant des corrections sont à apporter. Pour ce faire, certaines mesures peuvent être envisagées. Il s’agit tout d’abord d’accroître la formation du citoyen.
En ce sens que les citoyens sont en général plus regardants sur leurs droits que sur leurs devoirs. Pour s’en convaincre, en passant dans une rue, si on tombe sur un trou on dit : «que fait le Maire ? » Celui qui pointe un doigt accusateur sur l’élu municipal ne se pose jamais la question «est-ce que j’ai une seule fois payé la TDRL (taxe de développement régionale et locale) ? »
Il s’agit aussi de revoir le système électoral, certes le scrutin majoritaire est gage de stabilité, du moins nous-a-t-on enseigné ! Mais il est en retour impitoyable et injuste voire coûteux. Regardez par exemple, le score de celui qui est élu avec 50,15% ; et de celui qui échoue avec 49,85% !
Le scrutin proportionnel a l’avantage d’intéresser plusieurs listes d’où un engouement pour le vote, presque partout dans la sous-région, c’est le scrutin proportionnel qui est appliqué. Pourtant des majorités confortables sortent des urnes.
Autre point non moins dramatique à souligner : la nature de la plupart des alliances qui interpelle plus d’un citoyen. Parce qu’on ne peut pas comprendre certaines alliances qui déconcertent les électeurs : Duel ADEMA-RPM à Kayes/ Liste commune ADEMA-RPM à Kati/ Liste URD-RPM à Ténenkou. Le scrutin proportionnel permet d’éviter des alliances d’une telle nature.
Que dire de la CENI ?
A notre avis, la meilleure CENI c’est les délégués des listes en compétition, quand on est candidat on se donne les moyens de se faire représenter, d’ailleurs le processus électoral est contradictoire du début à la fin : révision des listes, jour du scrutin, dépouillement…etc.
Loin de nous l’idée de banaliser la mission de cette institution. Mais, à notre avis, une loi électorale bien révisée permet de se passer de la CENI ; d’envisager, par exemple, le couplage des élections afin d’en minimiser le coût, la création de circonscriptions électorales différentes de circonscriptions administratives.
En somme, il faut aller à une relecture de la loi électorale pour favoriser l’émergence des hommes de valeur. Ainsi seulement la fortune ne fera plus la légitimité mais plutôt le discours, le projet politique dont est porteur le candidat.
Maître Alfousseyni KANTE,
Huissier de Justice
Coordination FARE/ An ka wuli
de la Commune IV
Hamdallaye ACI 2000
Rue 432 Porte 928
Bamako/MALI