Pour amener l’Etat à relire le décret fixant le taux de redevance de régulation des marchés et de délégation de marchés publics, le comité syndical de la direction générale des marchés publics (DGMP) a observé une grève de 72 heures (du 29 au 31 janvier 2020). Le même syndicat menace de renouveler le mouvement si le Premier ministre, ministre de l’Economie et des Finances ne leur donne pas satisfaction. Le syndicat de la DGMP se fait utiliser par des cadres de leur structure tapis dans l’ombre et dans le dessein de faire main basse sur cette manne financière venant du secteur privé et qui garantit l’indépendance et la transparence des procédures de passations des marchés publics dans notre pays.
La semaine dernière, le syndicat de la DGMP a déclenché une grève de 72 heures au motif qu’une partie de la redevance de régulation des marchés publics, à l’instar de certains pays de la sous-région, doit être versée à leur structure.
A l’occasion, le syndicat de la DGMP fustigeait le comportement de ses camarades syndicalistes pour leur manque de solidarité voire leur trahison.
Le Secrétaire général du syndicat de la DGMP, monsieur El Moctar Mahamane, n’a simplement pas compris que ceux-ci ne se soient pas associés au mouvement.
La grève des agents de la DGMP est sans doute une des grèves les plus ridicules et les plus humiliantes de l’histoire récente du Mali. Dans la ferveur et l’euphorie des grèves que notre pays connait ces derniers temps, les Maliens verront certainement toutes les couleurs et toutes les formes de grèves.
Habituellement, les syndicats se battent pour l’amélioration de leurs traitements et de leurs conditions de travail, ce qui est tout à fait normal, mais il y a matière à s’interroger sur le combat d’un syndicat pour le partage d’argent.
En somme, un partage mécanique d’une partie de l’argent public comme si le législateur fixait les redevances, non pas sur la base des nécessités, mais sur la base des desideratas ou à la tête du client pour uniquement servir les intérêts individuels des personnes impliquées dans la chaîne de traitement d’un dossier.
Dans les pays cités en exemple par le syndicat, ce n’est pas une répartition systématique de la redevance de régulation, mais un appui de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP) à certaines structures intervenant dans la chaine de la passation des marchés publics telles la DGMP, le Contrôle financier, le trésor public, etc.
Dans ces pays, le scandale de corruption autour de la répartition de ces appuis venant de l’ARMP constitue un véritable goulot d’étranglement au niveau des structures bénéficiaires où les Directeurs des services et leurs complices se font la poche au vu et au su de tous. Tantôt c’est une motivation sélective entre un personnel acquis à la cause du Directeur et du syndicat tantôt, une répartition “vulgaire” au prorata du seul nombre du personnel de la Direction et du syndicat. Bref un véritable tunnel sinon boulevard ouvert de la corruption et de la gabegie dans ces services bénéficiaires. Ce qui explique toutes les tractations dans ces pays pour mettre tout simplement fin à ces appuis voire changer complètement la formule.
Le syndicat de la DGMP, informé justement de ces pratiques mafieuses dans ces pays, veut profiter du brouhaha des revendications syndicales au Mali comme phénomène de mode, pour installer un réseau similaire.
Est-il nécessaire de rappeler que ces redevances de régulations sont historiquement les conséquences de la réforme des marchés publics rendue obligatoire par la persistance des harcèlements et des pratiques hautement frauduleuses de certains cadres et agents de la DGMP de l’époque ?
Ces redevances sont des contributions du secteur privé pour mieux assainir et mieux outiller les procédures de passation des marchés publics contre certains agents prédateurs de la DGMP d’alors, qui, en fait, veulent ressusciter à travers le syndicat dont l’ignorance du phénomène est criarde.
Amadou M. Diarra
(ancien syndicaliste et Inspecteur des Finances)