Depuis mars 1991, à Bamako comme dans nos différentes capitales régionales l’homme de la rue croit que la démocratie si chèrement acquise attribue à chaque individu le droit de faire ce qui lui plaît. Or, la démocratie ne donne pas droit à tout. Elle n’est qu’une façade, une vitrine qui enchante aujourd’hui la jeunesse malienne qui oublie souvent (Malheureusement) que l’essentiel de la démocratie se joue dans l’arrière boutique.
Au Mali comme ailleurs en Afrique, il serait temps que les individus se posent les vraies questions pour avoir les bonnes réponses à leurs maux.
Il faut que chacun de nous se pose certaines questions comme : à quoi bon d’instituer une démocratie sur une tradition nourrie de corruption, de trafic, de faveurs et de perte de confiance en l’Etat ?
A quoi bon crier victoire, sans avoir vaincu les tares qui minent notre démocratie et avec elles notre liberté… bref notre développement ?
A mon avis, le développement exige que nous ayons tous confiance en l’Etat et dans ses institutions. La confiance dans le temps n’est qu’un pari sur l’avenir, mais cela n’est possible que lorsque les règles du jeu démocratique sont claires et stables.
Qu’est-ce qui fait le développement dans les pays d’Asie, comme partout dans le monde ?
Une petite minorité d’entrepreneurs privés ou publics qui sont dans des conditions favorables grâce à l’action d’un Etat qui assure la sécurité intérieure et extérieure, construit et entretient les infrastructures nécessaires au développement, arbitre les conflits entre acteurs économiques, selon les règles peu arbitraires.
En d’autres termes, il semble difficile d’instaurer une dynamique de développement sans la reconnaissance de l’Etat par les citoyens. Ce qui, nécessairement passe par l’application du droit.
Imaginez, comment un entrepreneur national ou étranger peut investir dans un pays sans droit commercial, sans fiscalité bien définie, sans institution arbitrale fiable en cas de litige, bref sans stabilité politique ?
On ne peut se contenter de réclamer le droit et la liberté au nom de la démocratie. La liberté n’est pas une rente, c’est une exigence dont le droit est le support idéal. Elle peut être souvent un euphorisant dur sur des corps sociaux nom accoutumés ou affaiblis, elle peut faire des ravages… Regardez chez nos voisins !
Aujourd’hui, au Mali, nul n’ignore que la reconnaissance de l’Etat par toutes les couches sociales et toutes les catégories socioprofessionnelles, est la condition de développement. Par ailleurs, la démocratie c’est bien, mais la reconnaissance de ses droits et ses devoirs, c’est mieux.
Le droit pour vivre dans la démocratie nécessite l’existence d’un Etat fort reconnu par tous les citoyens. Un Etat limité dans ses fonctions certes, mais qui les remplissent sans faillir.
Actuellement, le dialogue et la réconciliation entre les fils du pays, (de Kayes à Kidal) est une nécessité, pour que nous puissions tous vivre dans un pays libre.
Mais, peut-on vraiment réaliser cela sans combiner les trois facteurs que sont : la démocratie, le droit et le développement ?
D. Lassine
Professeur d’Economie France