Dans la vie de chaque enfant, il y a un moment où il découvre son pays et sa patrie. C’est ainsi que nous apprenions dès notre naissance que nous sommes Maliens et que notre patrie est le Mali.
La patrie est le pays que l’on aime mieux que tous les autres, voilà la Patrie. Elle ressemble à une maison paternelle très agrandie. On ne peut naturellement pas demander à un petit enfant d’aimer sa grande patrie; il ne sait pas ce que c’est. Il l’aimera au fur et à mesure qu’il la découvrira.
Auparavant, il aime ses petites patries: de sa maison, son amitié gagne ensuite son village, le pays dont ses yeux peuvent chaque jour faire le tour. L’école lui montre en images et sur les cartes la figure du Mali; elle lui en raconte l’histoire; elle lui apprend le nom et l’œuvre des grands empereurs du Mali. Le Mali devient pour lui une sorte de personne qu’il connait de mieux en mieux.
Les voyages lui mettront sous les yeux l’étendue de ses régions, leur variété, leur richesse, leur beauté. Et s’il va à l’étranger, c’est là qu’il sentira combien son pays lui manque; à chaque pas qui l’en rapprochera, son plaisir et son émotion grandiront. Il a donc une petite et une grande patrie. Le «chez nous», c’est aussi bien la maison et le pays natal comme le Mali. L’amitié que l’on a pour l’une ne nuit pas à l’autre, au contraire. Cette amitié s’appelle le patriotisme.
Le patriotisme: Tous les hommes aiment leur patrie, mais beaucoup ne le savent pas. Ils ne le sentent que si elle leur manque, que si elle est menacée. Ainsi, les enfants découvrent qu’ils aiment leur maman quand elle n’est plus là ou quand elle peut leur manquer !
Le patriotisme se forme lentement dans le cœur et il annonce sa présence de bien des façons: plaisir d’entendre les «anciens», raconter leurs souvenirs, de lire l’histoire de nos grands hommes; tristesse en présence des malheurs du Mali, de ses erreurs aussi; fierté heureuse quand on l’admire, fierté blessée quand on le critique, inquiétude quand il se sent en danger: tout cela, c’est du patriotisme. Quand on aime son pays, on lui veut du bien, on veut son bien. Il ne servirait de rien de crier «Vive le Mali», de chanter l’hymne national et d’agiter des petits drapeaux, si on devait en rester là. La Patrie a le droit de dire comme la maman: «Si tu m’aimes, obéis-moi, aide-moi».
Le patriote n’attend donc pas que le Mali soit en danger pour le servir et le défendre. C’est d’abord, on pourrait dire surtout pendant la paix que se montre l’amour de la patrie. Pour les écoliers, c’est fort simple. Il s’agit de bien faire tout ce qu’ils ont à faire: s’instruire à l’école, prendre des habitudes de travail de discipline, de réflexion; s’entraîner à l’effort courageux; respecter les camarades et les aider. Tout cela, qui est le monotone devoir quotidien aussi nécessaire que le pain quotidien ! Donnera insensiblement des jeunes garçons, des jeunes filles sérieux et sensibles, puis des hommes et des femmes sur qui le Mali pourra compter.
Ils obéiront aux lois de leur pays; ils savent que désobéir et récriminer est aussi mauvais dans un pays que dans une famille. Ils travailleront, car ils savent que la force totale est faite du travail de chacun. Ils seront bons pour leurs concitoyens, car un pays, où les gens heureux sont durs pour les malheureux est difficile à aimer. Ils seront justes et accueillants pour les étrangers: ils ne se laisseront pas gagner par ce mélange de haine, de défiance et de mépris qu’on appelle le chauvinisme. Respectueux des autres nations, ils n’en auront que plus de force pour exiger que les autres nations respectent le Mali.
Fatou CISSÉ