La médaille de reconnaissance décernée au président ATT, la non prolongation du mandat de celui-ci, les chantiers et la corruption au Mali, l’affaire du Fonds mondial et tant d’autres sujets de préoccupation ont été abordés par notre compatriote qui étudie en Russie.
Après cinquante années d’indépendance, les peuples d’Afrique noire se rendent compte que le chemin parcouru n’est pas exhaustif. La lueur d’espoir qui avait surgi grâce aux mouvements de décolonisation avait fini par disparaître avec l’arrivée des militaires un peu partout à la tête de nos jeunes États. Beaucoup de pionniers de première heure furent arrêtés, incarcérés ou même tués pour les idéaux qu’ils nourrissaient. Ce fut en quelque sorte une décapitation de l’intelligentsia africaine noire, si nous considérons qu’à l’époque, le taux d’alphabétisation était presque nul sur le continent.
Il s’en est suivi un long règne dictatorial des hommes en uniforme. Malgré nos richesses naturelles exploitées çà et là, nos pays n’ont pu accéder à des conditions de vie meilleures. Bien au contraire, la pauvreté, les maladies et la misère sont devenues un phénomène très répandu tandis que la couche dirigeante menait un mode de vie à l’occidentale. Des milliards de nos francs ont disparu sans laisser la moindre trace, sans aucune enquête. Ainsi, nos dirigeants ont contribué à nourrir l’économie des pays occidentaux qui leur accordaient leur soutien et fermaient les yeux sur une gestion catastrophique en matière de droit de l’homme, de liberté d’expression et d’opinion.
La déconfiture du communisme et la chute de l’URSS ont provoqué une tornade qui a balayé assez de régimes dictatoriaux sur le continent, même si de nos jours, certains «dinosaures» réussissent, pour le moment, à tenir encore la tête hors de l’eau. Au Mali, en 1991, la jeunesse est descendue dans les rues. À présent, les pays de l’Afrique du nord sont aux prises avec des présidents qui détiennent la honteuse palme d’or de la dictature et du règne éternel. Enfin, la démocratie gagne du terrain, même si elle trébuche encore.
Le cas du Mali
Dans beaucoup de pays, des reformes constitutionnelles ont été engagées dans le but d’instaurer le multipartisme et de limiter les mandats présidentiels à deux. Force est de le dire, le Mali est devenu un exemple dans la sous région. Nous avons, enfin, le plaisir de voir nos chefs d’État à la retraite sur notre sol. Contrairement à certains qui tentent de modifier la Constitution de leur pays en vue de briguer un troisième mandat ou de se maintenir dans leurs fauteuils à l’aide d’élection truquée, nos présidents Maliens ont fait preuve, jusque là, du respect du fameux article 30. Malgré les appels intempestifs pour la prolongation de son deuxième mandat, Amadou Toumani Touré vient de mettre fin à toutes les spéculations sur le sujet, en déclarant qu’il partirait de Koulouba le 08 juin 2012! Sur ce plan, notre pays est en train de prendre peu à peu de l’avance.
Aujourd’hui, un bref survol de la situation qui prévaut au Mali permet de constater qu’un changement réel a été amorcé. De nombreux projets d’envergure nationale sont déjà réalisés ou sont en cours. Les retards de salaires sont devenus rares. Néanmoins, vingt ans après l’avènement de la démocratie au Mali, un malaise persiste au sein de la société. Il fait la préoccupation générale des citoyens, surtout des jeunes qui s’interrogent à juste titre sur l’avenir. Il s’agit de la corruption. Elle a gagné toutes les institutions républicaines à un niveau tel, qu’elle est devenue la gangrène, l’épidémie qui décime toutes les qualités morales chez le Malien!
Dans un pays pauvre qu’est le nôtre, les grosses cylindrées, les villas cossues, les quarante huit nouveaux milliardaires qui ne sont autres, dans leur grande majorité, que des fonctionnaires d’Etat; tout cela peut être aperçu comme une insulte et un mépris à l’adresse de ceux qui ont donné leur vie en mars 1991 pour le changement. C’étaient de simples jeunes, appelés à vivre, des vies en fleur qui aspiraient au meilleur qui soit, mais fauchées par balles et dont les parents ne constatent aucune amélioration de leur statut social. Ces derniers continuent de vivre, silencieusement et stoïquement leur chagrin sous le regard hautain de ceux-là qui jouissent des fruits du sang versé.
Avec la flambée des prix des denrées de première nécessité, le chômage massif, le Mali expose sa jeune démocratie à un scénario à la «tunisienne», si le gouvernement ne songe à éradiquer la corruption et le népotisme. Le 05 février 2011 au stade Omnisports Modibo Kéita, un groupe d’opérateurs privés a eu l’idée de gratifier le Président de la République, SEM ATT d’une médaille d’or dont le poids fait ni plus ni moins un kilo! L’initiative reste à saluer en dépit de l’étonnement presque général et des interrogations qu’elle a suscitées tant au Mali qu’au sein de sa diaspora. ATT s’investit beaucoup, d’autres diraient même qu’il se sacrifie. En effet, l’homme est patriote, il aime son pays et ne ménage pas ses efforts. Il veut comme on le dit, laisser quelque chose derrière lui, en souvenir de sa présidence. Il respecte l’individu, sa liberté et il est tolérant. Si chaque président faisait autant ou plus d’ailleurs, nous pourrions parler de progrès.
Hélas ! Sa tolérance, son refus d’«humilier des chefs de famille» ont conduit à une corruption qui a pris des ampleurs olympiques! Déjà, il en va de la réputation du pays. Tandis que nos honorables «chefs de famille» se la coulent très douce et ne craignent aucune humiliation, c’est la nation entière qui se trouve humiliée quand les experts du Fonds mondial ont exigé le départ du Ministre de la santé. Autrement dit, pour manque de confiance et d’intégrité morale. Pour un détournement de l’argent destiné à des malades.
En somme, le rapport du BVG fait ressortir un manque à gagner de plusieurs milliards de francs au cours des dernières années. De l’argent volé à tous les niveaux, presque au vu et au su de tous, sans que punition s’en suive! À l’extérieur du Mali, la diaspora malienne essuie, parfois, des rires sarcastiques quand elle tente de convaincre des hommes d’affaires à partir investir au pays. Si nous voulons plus de progrès avec notre démocratie exemplaire, nous sommes tenus de mener une lutte sans merci contre ce fléau. Tous les cas suspects d’enrichissement illicite doivent faire l’objet d’une investigation au peigne fin, afin que les coupables soient connus du peuple et punis conformément à nos Lois.
Dans l’avenir, je voudrais lancer un appel à nos opérateurs économiques privés de songer à créer, en association avec leurs collègues d’autres pays, trois prix, à l’instar du Nobel. Un prix africain Nelson Mandela de la paix, à décerner au président qui aura le plus lutté contre les guerres en Afrique; un prix africain Modibo Kéita de l’intégration et de l’unité africaine, à attribuer à celui qui aura le plus milité pour l’union et l’unité; un prix africain de bonne gouvernance (respect de la démocratie, de la transparence, des droits de l’homme, de la liberté de presse, d’opinion, de confession et d’association, progrès socio-économiques, culturels et sportifs de lutte contre la corruption et le népotisme.)
Ces prix doivent être décernés annuellement. Le fonds peut être crée sur cotisation des opérateurs, des hommes politiques, d’associations ou sur dons des volontaires de tous ceux qui se soucient de la démocratie, du progrès, de la lutte contre la corruption et contre les fléaux qui rongent notre chère Patrie, l’Afrique. Que nous le prouvent, ceux qui en ont la volonté.
En même temps, nous devons prévoir trois anti-prix africains (anti-Nobel) qui seront attribués aux présidents occupant les dernières places dans la lutte pour la paix, l’unité et la bonne gouvernance. La valeur de ces anti-prix doit se résumer à un simple certificat. Avec un tel «cadeau», on verra ce qu’ils trouveront à nous dire lors des élections.
Kénédugu fama
Depuis la Fédération de Russie
N.B : le titre, le surtitre et le chapeau sont de la rédaction
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