Pourquoi les gouvernements «made in Konaré» n’ont jamais songé depuis ces temps à établir des fichiers biométriques, gages d’une élection sérieuse dans la forme? Est-ce parce que le Mali avait toujours su garder une habitude du pouvoir socialiste non soviétique, qui consiste à manipuler le peuple selon le bon vouloir de ceux qui détiennent le pouvoir.
Les résultats du premier tour de l’élection présidentielle de l’année 2002 seront proclamés de la manière la plus soviétique: c’est-à-dire la plus douteuse! En effet, les résultats furent proclamés par une cour constitutionnelle loin d’être fiable comme le rappelait dans sa parution du 12 janvier 2012, l’éditorialiste vedette du journal «le Républicain». Il analysait clairement la méthode d’annulation des voix du premier tour de la présidentielle et les résultats finaux des législatives comme une méthode controversée en utilisant l’expression ”arbitrage curieux”.
De fait, ATT remporte l’élection présidentielle au grand dam des partis politiques qui simultanément se laissent récupérer montrant, par la même occasion, qu’ils ne sont pas dignes de la confiance du peuple malien en cautionnant ce qu’on appelle le mensonge orchestré contre la population. Tous les partis politiques feront parti de l’exécutif qu’ATT va nommer, tous les partis politiques seront dans le gouvernement.
Personne ne veut aller du côté du peuple, synonyme de misère à leurs yeux. Depuis ce temps, tous les gouvernements sous ATT ont respecté le ”genre” 30% de militaire ou force de l’ordre dans le gouvernement, jusqu’à ce que l’un des «responsables» quitte son corps pour tenter la même aventure qu’ATT (la course pour Koulouba), comme s’il croyait que le peuple malien a la nostalgie des tristes moments de la dictature militaire. C’est vrai que les hommes politiques ont prouvé aux maliens qu’ils sont les premiers ”namis” ‘‘clients” en bamanankan de la république. Sans vanter les mérites du pouvoir socialiste, personne n’a oublié que la dictature a largement permis le développement de la corruption dans les sphères de l’État.
Et pourtant aujourd’hui ni ces hommes politiques, ni ce porteur d’uniforme n’ont honte de clamer qu’ils sont du côté du peuple.
ATT au pouvoir, bonjour la démesure!
De là tradition orale au storytelling!
Pour faire oublier le tribun, héritier de l’éloquent orateur socialiste Modibo Keita, le nouveau président n’hésitera pas pour combler la différence à s’inspirer de la comédie. Il a bien appris ses leçons de «storytelling» à l’américaine, il n’hésite pas à raconter des histoires qui ne tiennent pas debout. Au cours d’un de ses shows politiques dénommés ”Baro” organisés annuellement pour se moquer un peu de son peuple sur la radio et la télévision nationale malienne, il nous raconte que sa fille, après des études au Canada, est au chômage. ATT a donc affirmé à la télévision nationale malienne, que sa fille est au chômage, pour faire croire aux parents des chômeurs, que bien que diplômée et socialement sur-qualifiée, la fille du président est dans la même situation que leurs enfants.
Un président qui n’a pas pu avoir un emploi pour sa fille dans un pays aussi clientéliste et corrompu comme le Mali?
Mais sans surprise, comme pour dire que son père connaissait moins sa situation professionnelle qu’il ne le prétendait, la chômeuse de2003 aeu la gentillesse de dévoiler sa richesse en décembre 2011 en fêtant son milliard dans un prestigieux hôtel de Bamako, sans qu’aucun des médias publiques s’indignent.
Le président ATT a encore raconté à son audience, le grand Mali, qu’il payait lui-même sa facture d’électricité et d’eau, tellement il compte sur notre naïveté pour tout accepter à moins qu’il ne surestime ses capacités de persuasion en qualité de conteur.
En tout cas, Alpha Oumar Konaré a reconnu qu’il a échoué dans le domaine de l’éducation contrairement à son successeur ATT qui n’aura pas le courage de reconnaître le même échec, bien qu’il ait crée un psychodrame en décrétant une année perdue au niveau de l’enseignement supérieur afin de remettre les pendules à l’heure.
Parallèlement, ATT reste lui même insensible à la situation des universités fictives qu’il vient de créer et dont la réouverture n’a eu lieu que la semaine dernière après un semestre de fermeture.
L’enseignement primaire, qui a toujours été partiellement préservé, a pour sa part connu plusieurs semaines de grève depuis décembre jusqu’en ce début de mois de février. Hélas, comme ce sont les enfants des maliens qui sont spoliés de leur droit de penser, personne n’a soulevé le petit doigt. On a connu la plus grande humiliation de notre histoire lorsque le système éducatif du Mali a été noté parmi les plus bas d’Afrique par le PASEC (Programme d’Analyse des Systèmes Éducatifs des gouvernements membres du CONFEMEN). C’est pourquoi, par la suite, le Mali a quitté cette organisation pour montrer son mécontentement. Oui, c’est bien là que réside tout le problème de notre pays.
Serait-il utile d’égrener les nombreuses réalisations accomplies au cours des 20 dernières années? Construction des routes, des hôpitaux, des stades de football et d’autres salles de spectacles; mais ce qui nous concerne et nous préoccupe tant, c’est le déni de justice sociale.
Le déni de justice sociale
Le clientélisme et la corruption sont devenus une marque de fabrique de la démocratie malienne pour liquider ses produits qui sont les deniers publics. Les bonnes mœurs ont été sciemment torpillées dans les 10 voire les 15 dernières années. L’un des derniers bastions, pour la garantie des valeurs morales qu’est l’école, est devenu depuis longtemps un lieu de harcèlement sexuel à l’encontre des filles (certains enseignants ont carrément oublié le sens de leur métier).
Beaucoup de nos sœurs ont été obligées d’abandonner leur cursus parce qu’elles ont osé dire non à certaines enseignants ou responsables d’éducation qui avaient le pouvoir de les importuner dans l’impunité totale et au détriment de toutes les réglementations en vigueur. Ceci dénote d’ailleurs la manière dont nos lois sont bafouées à tous les niveaux de la république : du premier magistrat aux magistrats en exercice dans leur noble fonction jusqu’aux écoliers qui sont les actifs de demain. Où est l’avenir?
Chercher des femmes bien qu’étant un homme marié est devenu une ”vertu” surtout qu’un ”mauvais” adage selon lequel «muso ko te tchè son ye» (avoir du penchant pour les femmes n’est pas une mauvaise réputation pour un homme) est souvent cité pour minimiser les attentats à la pudeur et aux valeurs morales séculaires. Certains hauts responsables s’adonnent à la débauche, d’autres ont des enfants d’unions officialisées ou non, sans se soucier de l’image que cela peut donner à la république. Ils ont donné une autre image aux femmes dans notre société. Ils ont voulu les traiter d’objet, comme des objets sexuels, ce qui relève et révèle une autre forme d’injustice sociale comparable à l’esclavage.
Maintenues dans le besoin, beaucoup de filles restent soumises au bon vouloir de ces hommes corrompus qui se servent de leur argent, de leur position, bref de leur pouvoir pour séduire ces belles dames désemparées. Il est courant de voir des responsables de 60 ans et plus qui font la cour aux jeunes filles de moins de vingt ans, comme si le mariage n’avait plus de sens. Les vrais défenseurs des droits et de la cause des femmes, qui sont les mamans de demain, se sont évaporés dans la nature. Non on ne va pas oublier!
Ceux qui ont détenu le pouvoir n’ont pas voulu accorder d’avantages sociaux aux concitoyens tel que le droit à la pension pour toute personne ayant contribué d’une manière ou d’une autre à la construction du pays pendant sa jeunesse: aux agriculteurs, aux commerçants détaillants, aux maçons, aux pêcheurs, aux conducteurs, aux transporteurs, jusqu’aux bricoleurs. Cela fait parti des gages pour promouvoir toute possibilité de liberté. Car tous les citoyens d’une manière où d’une autre, ont contribué à la construction de notre pays avec son énergie.
Il est aussi urgent de chercher un garde-fou qui protégerait certaines de nos sœurs des harcèlements sexuels, traitées comme des prostituées pour minimiser la gravité du comportement des hommes instigateurs.
Si les enfants allaient normalement à l’école, ils penseraient activement et ces gouvernants et surtout ce pouvoir l’ont bien compris. En poursuivant la maltraitance de l’éducation, domaine primordial pour toute nation pour forger les futures générations, les politiques s’assurent le contrôle de la situation. Les historiens en sciences de l’éducation le savent, la suprématie des États-Unis est passée par leur avance prématurée dans les domaines de l’éducation et de la formation.
Depuis les années 1820, les États-Unis avaient déjà plus d’une centaine d’universités tandis que toute l’Europe en avait moins de la centaine. Ces données expliquent le fait que malgré les difficultés de l’économie américaine, ses agences de notation continuent à effrayer d’autres nations dites puissantes commela France, qui a vu sa dette dégradée par Standard & and Poor’s. Qui peut ignorer que les Etats-Unis militent activement pour imposer la pensée unique dans presque tous les domaines au monde entier.
Ces explications visent à éclairer les mobiles de notre président qui devient agent d’un système. Certains pourraient même l’envisager comme une marionnette qui s’active pour empêcher les peuples de penser par eux mêmes, d’où le tripatouillage du système éducatif dans tous les sens.
A suivre !
Sidy Lamine Bagayoko
Université des Lettres et des Sciences Humaines de Bamako
Courriel: sidylamagayoko@yahoo.com