Communication gouvernementale en ces temps de crise : Quand l’amateurisme côtoie l’exhibitionnisme

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Comment communique l’équipe gouvernementale du Premier ministre Cheick Modibo Diarra ? Cette communication doit-elle se résumer aux interventions du ministre porte-parole du Gouvernement Hamadoun Touré ? Quid des différents chargés de communication des départements ministériels ? Après trois, l’équipe gouvernementale dirigée par l’ex-navigateur interplanétaire n’aurait pas encore son plan de communication !

La semaine passée, j’ai suivi au journal télévisé de l’ORTM, l’intervention du  ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, à l’ouverture d’un séminaire organisé à Selingué aux frais du pauvre contribuable malien, sur la nécessité d’élaborer un plan de communication sur la double crise que nous vivons.

Ce séminaire était organisé à l’intention des chargés de communication des départements ministériels. J’ai cru rêver ! Ainsi, après plus de trois mois de ” gestion ” de la crise, notre gouvernement n’a pas un plan de sortie de crise ! Qui l’aurait cru ? On comprend mieux à présent le silence radio de toutes nos institutions, sauf une qui avait une longueur d’avance sur les autres!

La Cellule de communication de la présidence de la République, depuis la chute d’ATT, est restée muette. Et le silence assourdissant qu’elle observait est resté plus pesant, même après l’investiture du président de la République par intérim, le Pr Dioncounda Traoré. Apparemment, les deux évènements vécus en direct à savoir la chute du président ATT et l’agression de Dioncounda ont eu raison du professionnalisme des Diarra Diakité, Issa Sacré et autres Kader Maïga. Les chargés de communication des anciens ministres ont, dans la débandade générale, cherché  plutôt à sauver leurs têtes. Ne parlons pas des Chargés de Communication des autres institutions : Conseil Economique Social et Culturel, le Haut Conseil des Collectivités. La question que l’on se pose aujourd’hui est de savoir s’ils ont d’ailleurs existé un jour.

Avec la nomination du Premier ministre Cheick Modibo Diarra et de son Gouvernement, flanqué d’un porte-parole, nous venant tout droit de l’ONUCI, on avait pensé qu’on allait assister à un réveil tonitruant de la communication gouvernementale, mais hélas, trois fois hélas ! Alors que le pays est occupé aux deux tiers et que Bamako compte ses arrestations et ses interpellations en tout genre, on apprend que notre Gouvernement n’a pas de plan de Communication. Pauvre de nous ! Qu’a annoncé le Gouvernement par rapport aux arrestations des personnalités, à l’affaire des bérets rouges, les lois votées dont celle portant indemnisation des victimes du mouvement insurrectionnel du 22 mars ayant entraîné la démission du président de la République? Absolument rien !

La communication aura été véritablement le talon d’Achille de l’équipe du Dr Cheick Modibo Diarra, et on ne retient comme ” fait d’armes “ du gouvernement que l’affaire de la relève de l’excellent Bally Sissoko.

S’il y’a une institution qui a survolé haut la main, en matière de communication, les périodes que nous vivons, c’est bien l’Assemblée nationale.  En réalité depuis le 22 mars, l’Assemblée nationale a occupé le devant de la scène,  articulé par une communication volontariste, bien élaborée et bien articulée. Tout ce que le parlement a eu à faire et à entreprendre ici et ailleurs a été automatiquement médiatisé tant au niveau national qu’international. On sent qu’ici, il y a un plan de communication élaboré bien avant, le carnet d’adresses du responsable de la Communication du Parlement a fait le reste.

Je  peux témoigner, pour l’histoire, que lors des évènements des 1 et 2 février dernier, j’étais à Kayes avec des journalistes pour couvrir un forum avec le Chargé de Communication de l’Assemblée nationale  , nos chambres étant côte à côte, j’ai dormi vers 2h du matin alors qu’il était  sur sa machine et le matin au restaurant, pendant qu’on prenait le petit déjeuner, il était encore accroché à son ordinateur portable et saisissait un texte. Je ne comprenais pas comment on peut être aussi occupé sitôt le matin, et tard le soir. Profitant d’un moment où il s’était levé pour prendre un énième appel téléphonique, je ne puis m’empêcher de jeter un coup d’œil sur le  texte qui l’occupait tant, je vous  donne ce que j’ai lu:

Note technique à l’attention du président de l’Assemblée nationale

La situation que nous vivons depuis le 1er février s’apparente au début d’une grave crise qui peut avoir des conséquences sur la vie des Institutions. Je voudrais vous proposer un plan de communication de crise  modelable selon les variantes que la crise prendra….

Pendant tout le retour, ma tête bouillonnait de mille choses : comment peut-on prévoir qu’une marche de femmes, aussi violente  soit-elle, peut aboutir à une crise institutionnelle ?

A présent je comprends mieux que c’est parce que lui, il s’était préparé à cela que notre Parlement occupe le haut du pavé en matière de communication depuis le début de la crise. Que valent ses résolutions, ses déclarations et ses multiples interpellations, s’il n’y’avait pas un chef d’orchestre pour assurer la mise en boîte et le dispatching.

Si, au lieu d’aller à Sélingué, on avait simplement accepté d’aller dans la Salle Aoua Kéita pour un échange d’expériences avec le grand frère ? Le bien est souvent juste à côté. En attendant, koro, que votre modestie n’en souffre pas trop !

      Abdoulaye SIDIBE

 Ecrivain, Bamako

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