Comment sortir de la Transition ? Le Mali en quête d’une gouvernance de pays en guerre !

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  1. Examen des pistes de solutions de ce qu’il y a à faire (1ère partie de 2)

 

Il est important de savoir ce qui nous arrive pour savoir comment bien arriver. Les maliens ont dû rêver que la Transition leur rendrait la dignité d’antan et doivent se convaincre que le Mali sera par la prise en main de son destin par ses enfants qui ne peuvent se complaire éternellement d’une médiocrité imposée qu’ils n’ont ni héritée ni tétée. Des dérives ou atouts multiples dont on peut se servir comme grille de lecture pour identifier les pistes de solutions valables à suivre pour nous en sortir, suffisent d’évoquer trois points saillants de l’actualité de notre pays qui mérite mieux et qui a mieux. Il s’agit de l’examen de la gouvernance pour l’effort de guerre pour la sécurité et les réformes politiques et institutionnelles, de l’actualité politique de revirement de la confrontation conçue à la conciliation constatée et, enfin de l’inspiration à la jeunesse civile et militaire pour bannir la confusion et ne pas perdre leur pays.

 

Un mot de méthode préalable. L’objectif de cette série étant d’appuyer résolument l’action des maliens décidés et sincères, son langage est le messager qui ménage sa monture pour aller loin dans le théâtre d’ombres et les dédales des réseaux sociaux vers les mots d’ordre que l’élite pourra faire. Au lecteur, du jugement et de l’allant pour préserver ce messager de toute subversion et en avoir les messages. Cette situation avait jadis conduit nos ancêtres à nous léguer le dicton que la conversation révèle ce que la confidence ne peut dévoiler.

 

Nous avons d’abord un pays en guerre que ses pays amis et alliés ont “abandonné en plein vol”, que ses pays frères et voisins ont sanctionné illégalement au mépris des conventions internationales dont celle qui les unit, lui coupant vivres, fournitures, services et commerce extérieur… Avec de tels pays amis, qui a besoin d’ennemis ? Avec de tels pays frères, qui a besoin de traîtres ? Nous disons bien au Mali que si ton ami fréquente ton ennemi, alors tu as deux ennemis ! Ce qui nous impose par conséquent d’évaluer sans complaisance notre gouvernance actuelle. Que dire d’une complainte d’abandon qui est un regret à contrecœur et non un bon débarras sans regret ? Que dire de rompre avec un ennemi désigné et frayer avec ses avatars africains, régionaux, multilatéraux, européens et bilatéraux voire en faire des sources de légitimité ? Que dire des manœuvres en trompe-l’œil au Conseil de Sécurité quand le but était le renouvellement annoncé et dûment préparé du mandat de la Minusma ? Pourquoi tout ce bruit pour reconduire les termes de l’occupation et du surplace ? Doit-on conduire dans le dilatoire un pays en guerre et gouverner sans direction et sans principe ?

 

Les réponses à ces questions constituent l’indication de la première chose à faire pour nous en sortir, c’est précisément de sortir du flou qui confine au double jeu et exiger une direction claire par principe et non par dépit sur nos politiques de survie. Savoir décider sur les principes et à temps est essentiel car il s’agit d’entraîner tout un pays. Mais la clarté ressort de la compétence et de la probité qui ne s’improvisent pas, surtout pas des acteurs et politiques faillis qui ont mis le Mali dans l’impasse ! L’armée n’a pas vocation à diriger un pays mais à le défendre y compris quand elle dirige par force majeure. La justification au pouvoir d’un corps constitué sans avantage comparatif réside à trancher le nœud gordien de la crise, c’est-à-dire barrer la route aux milliardaires qui ont mis le pays en agonie et gagner la victoire de la paix et gouvernance civiles dans l’indépendance et la souveraineté et non sous dictée.

 

La levée de l’embargo est tout comme un leurre qui ne fera pas cesser les difficultés du quotidien, au contraire les accroitra par la perte de l’effort de sacrifice et par la mise à niveau des difficultés régionales et d’ailleurs. Pire, la marche forcée sous les auspices de la Cedeao qui renvoie en écho les injonctions au Mali pour la conduite à tenir avec la Minusma et “l’Accord d’Alger”. On est ainsi sans égard aux aspirations populaires et on affûte contre les Famas des “droits de l’homme”, pas ceux du malien mais ceux du combattant qui le tue et en accumule des droits. C’est dire que la logique de supplier la Cedeao au lieu de revendiquer son droit a approfondi l’impasse. Attendons voir la suite des diktats en échange d’une levée vide pour le malien lambda et même nocive par la propagande qu’on en fera. Prions que des périls en suspens ne vont pas nous enseigner encore la leçon non apprise d’une certaine lettre de secours de 2013 ! Couper l’oreille à quelqu’un est un avertissement pour la tête…

 

Le message suivant est qu’on ne peut longtemps confier un pays à ses spoliateurs, que ce soient de faux alliés et chefs ou des institutions inadaptées et scélérates. On ne peut confier le troupeau de bovins à son prédateur qui connaît la vache et pas sa valeur mais à celui qui connait la vache et sa valeur. Un pays ne doit être confié qu’à ceux qui sont proches de ses valeurs pour être ses bâtisseurs, pas à ceux qui en parodient l’apparence. De même un échafaudage institutionnel et ses dérivés, que ce soit un accord ou un vote, condamnant la viabilité du pays doivent être bannis au nom de la rectification. Idem pour les entités administratives factices créées et l’absence d’État qui récompensent les mercenaires de la guerre par procuration et délégitiment toute élection au Mali et servant comme des takoubas d’Iforas ou lances poullos sur les têtes maliennes en plus d’enclaves de narco-trafiquants.

 

Le troisième message est que notre première ligne de défense reste la solidarité africaine de voisinage fraternel. C’est par la dure leçon de la Cedeao qu’il faut dénoncer l’Ua et les organisations régionales contrôlées par les pays étrangers qui perpétuent la balkanisation de l’Afrique. Il faut leur enlever la peau de brebis qui recouvre l’hyène pour l’enlever du troupeau avant qu’il ne le décime. La mise en calebasse récente du Mali indique suffisamment le vrai contenu des politiques d’“intégration régionale” ou de “décentralisation” au service non des peuples mais des bailleurs ou bourreaux de fonds et leurs champions nationaux qui vendent leur pays. Ce sont des institutions d’ingérence et non d’intégration pour la mainmise étrangère pour le contrôle des ressources. Il faut revenir à l’idéal initial de l’unité africaine qui construit la solidarité avant que le rêve ne fût ralenti par la sanctuarisation des frontières héritées de la colonisation avec les sucettes du libre échange ou du passeport biométrique.

 

Deux principales leçons à tirer sont d’un côté la nécessaire trame africaine déjà évoquée à toute solution durable de la guerre par procuration qu’on appelle terrorisme et de l’autre côté le suicide inconscient par l’usage des concepts des autres telle en l’occurrence la démocratie. Pourquoi ne pas penser à une guerre qui fait fi des vies africaines et les détruisent entre elles, pour des raisons éminemment non africaines ? S’unir ou périr est le maître mot, mais en attendant la montée en puissance du panafricanisme, la plupart des élites ne résistent pas aux privilèges d’asservissement de leurs frères et sœurs dans leur enclos existant et ainsi la géographie actuelle des satrapies que nos chefs d’État aiment gouverner. Les bambaras ne disent-ils pas qu’on n’introduit pas sans raison un bœuf dans un enclos ? À quand la fin pour nos chefs d’Enclos de la légitimité honteuse du dehors au lieu de celle digne du dedans ?

 

Aussi l’usage manipulateur de l’ingérence “humanitaire” et “démocratique” pour subvertir le processus politique réparateur du coup d’État doit-il nous faire penser à l’usage suicidaire des concepts des autres que nous ingurgitons par délectation des langues dites modernes. Ces concepts qui nous fragilisent voire nous marquent pour l’autodestruction, ou selon le mot d’un camarade de lutte, ce sont les concepts de la langue de ceux qui nous violent. C’était l’objet entre autres d’une lettre du 12 juillet 2002 à deux aînés, pères des indépendances et paix à leurs âmes, qui demandaient mon sentiment sur leur livre de la contribution d’un ancien parti malien à l’instauration de la démocratie pluraliste chez nous. Nous devrions réfléchir plus d’une fois à l’énoncé d’une démocratie qui réponde aux besoins de libération des absolutismes et dictatures des autres et ne pas nous fourvoyer dans la quête de valeurs universelles ailleurs dont nous sommes pourtant les premiers dépositaires !

 

Les bonnes solutions pour un peuple lui viennent de son élite, mais comme rappelé plus tôt dans la série, il n’y a pas plus nocif que leur mauvaise utilisation. Quand le mur de la fraternité est lézardé et les margouillats incrustés, notre mur de défense réside dans les alliances de contrepoids. Ainsi en est-il de la bonne solution mais mise à mal de l’alliance russe pour faire face à la guerre par procuration au Mali. Quand elle est mal exécutée comme dénoncée plus tôt ici, dans le discours malien à Moscou, à Bamako et à New York et paradée en ce moment ad nauseam dans les médias, cela ne rassure que les ingénus et lui enlève son tranchant par défaut de compétence et de sincérité de l’appliquer dans toute sa logique. Il faut jouer à fond la carte des alliances qui sauvent sans la distraire de jeu comme fait récemment à dissuader ceux pouvant bloquer les résolutions qui pourront nous hanter plus tard ! Puisqu’on y est, tout déficit de compétence et de sincérité diminue la crédibilité perçue par l’allié russe y inclus dans ses autres politiques nous affectant telles avec l’Algérie ou l’Otan.

 

La mauvaise application des principes rend aussi possible la traîtrise des leaders sans les exposer à juste punition. Manquer de volonté et de savoir-faire ou simplement jouer avec un accord ou une politique de survie d’un peuple est une trahison voilée qui met tous en danger. Maliens et africains ont bien perçu que la racine de la mauvaise gouvernance est la trahison des leaders des valeurs des peuples avec des concepts ou des mobiles étrangers, mais n’ont que peu factorisé la manipulation des idéaux par le populisme comme au Mali de mars 1991 et depuis mai 2021 où il a été fait grand usage des aspirations du peuple. D’ailleurs, la qualité de la gouvernance peut s’apprécier autant au mutisme dissolvant et trompeur qu’au bavardage voluptueux mais vide et nocif pour combler le manque de direction, sans oublier les scandales et écarts au sommet tels des logements sociaux, de la Canam, du concours de la police, etc. Un dirigeant ou leader ne doit traîner ni casserole ni avoir de marmite trouée.

 

Nos autorités actuelles ont tout intérêt à convaincre qu’à laisser croire. Les changements de personne à la tête de l’État sans la gouvernance souhaitée, soit par vertu légitime comme dans le rêve du Malikoura ou s’émanciper de l’extérieur comme de la dictée de la Cedeao, sont au mieux des distractions. Utiliser un fils du pays pour susciter la sympathie du peuple puis le remplacer par un autre pour éconduire ce même peuple est comme ne pas voir de poils sur les crânes des enfants de ce pays. Passer du plaidoyer d’accords à prôner leur application reformée ou intelligente ou aider une résolution et ensuite s’en plaindre relève de la gesticulation, surtout quand la nouvelle parole est dans la bouche des anciens sponsors des accords. Manipuler ainsi l’ambition individuelle pour acter une politique collectivement décriée est une infamie. Les bambaras disent que le sorcier ignore ce qu’est ne pas faire le mal. Cette même sorcellerie traquée par Ante Abana et M5-RFP qui affirmèrent qu’un accord ne peut réviser mais s’adapter à la Constitution qui ne pourra changer qu’à la fin de la guerre !

(à suivre)

Mr. Amadou Cisse

Abscisse1@gmail.com

Washington, D.C., U.S.A

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