Il est difficile d’admettre un seul instant et de pouvoir expliquer raisonnablement aux Sénégalais, le pourquoi de cette décision si inopportune, de réfection du Building administratif. Surtout au moment où les urgences et priorités de toutes sortes et tous azimuts se bousculent devant les portes du Gouvernement. Comment alors, comme si de rien n’était, l’on a pu se permettre de s’atteler dans une période de récession, à la réfection de ce vieux Building amorti, et symbole de la concentration administrative, fonction qu’il ne retrouvera plus jamais. Ceci paradoxalement, à l’heure où il est justement question de décentralisation plus rationnelle et efficiente qui rapprocherait davantage l’Administration des administrés et citoyens. En vue d’une émergence ou croissance accélérée que l’on nous crie sur tous les toits. Cette somme exorbitante peut en lieu et place créer des pôles administratifs pour abriter certains ministères en fonction de leur spécificité et particularité. Ceci est plus rationnel et moins coûteux que de tenter de restaurer le passé. Dans ce cas d’espèce, on peut bien se demander objectivement, si nos autorités ont réellement le sens de l’ordre prioritaire et des urgences ? Sinon, comment le président a-t-il pu, objectivement, autoriser 17 milliards de FCFA pour la réfection du Building administratif, face à toutes ces urgences et priorités de l’heure ?
Au-delà de l’inopportunité évidente de la décision de réfection, du coût exorbitant de celle-ci, du non respect des règles d’attribution du marché, etc., mais n’avons-nous pas réellement plus urgent, utile et mieux à faire en direction de nos populations, plutôt que de vouloir concentrer encore les activités du gouvernement dans ce building qui, certes est un symbole, mais, est quand même devenu un objet de musée maintenant. Comment ne pas s’offusquer et s’inquiéter de cette décision devant les urgences et priorités telles que : la crise de l’Education nationale qui perdue, le chômage croissant et surtout en milieu jeune, l’agriculture qui stagne et se sclérose, l’insécurité galopante, l’émergence et la croissance qui tardent à se matérialiser, la santé publique qui ne couvre pas le pays et souffre d’une modernisation de son plateau technique et j’en passe. Déjà à (en) mi-mandat, un bilan non exhaustif devrait pouvoir être fait sur vos engagements accomplis et ce qui reste à faire. Il se fait tard monsieur le Président !
Et comme le dit si bien l’adage : « qui trop embrasse mal étreint ». Ainsi, au lieu d’avoir des ambitions démesurées hors de la portée de nos moyens propres, il faut savoir raison garder, en s’attaquant en priorité aux étapes possibles et immédiatement réalisables notamment, celles en faveur des larges couches déshéritées, pour alléger leurs souffrances, plutôt que de vouloir soulever des montagnes avec des moyens dérisoires et rudimentaires. Ou bien, de jeter le peu des maigres ressources dont nous disposons, dans des dépenses de prestige, l’entretien d’un train de vie dispendieux de l’Etat et d’un personnel politique et administratif improductif et budgétivore, ou des projets chimériques pour lesquels, l’échec est d’avance certain.
Quand nous examinons attentivement les actions du gouvernement depuis l’avènement de la 2e alternance, nous nous rendons bien compte parfois, d’une absence de lucidité, de rationalité et de cohérence dans les actions, comme aussi dans le choix des objectifs prioritaires et des urgences du moment, pour notre pays. Et ceci nous rappelle fort bien, les pratiques d’une époque et gestion estampillée informelle du régime précédent. Autrement dit, l’absence de rupture avec les méthodes et pratiques gouvernementales dénuées de bon sens. Eh bien, apparemment, tout ou presque tout, se fait encore au pied levé. L’absence de plans directeurs crédibles pour la bonne gouvernance et la marche du pays, les conduit au tâtonnement et à l’abandon de projets conçus à la va-vite et entamés dans la précipitation avec beaucoup d’argent, qui y sont engloutis inutilement. Ce qui nous renvoie à Wade avec ses éléphants blancs et autres projets de folie des grandeurs, ou de ceux de Karim Wade, avec ses nombreux travaux inachevés dans le cadre la préparation de l’OCI, qu’il nous a laissés. Apparemment, on peut affirmer que Macky n’a pas tiré toutes les leçons des déboires de Wade. C’est vraiment dommage !
C’est triste et dramatique, mais c’est bien ainsi que notre pays est malheureusement géré, en tout cas par tous les régimes qui se sont succédé jusqu’à présent. En effet, c’est un fait récurrent, que nos hommes politiques qui convoitent le pouvoir, ne prennent presque jamais la peine de faire en toute objectivité, un diagnostic correct, sérieux et sans complaisance, des maux les plus tenaces dont leur peuple souffre, et ses préoccupations majeures les plus pressantes, qu’ils devront résoudre en priorité une fois arrivés au Pouvoir. Voilà ce qui devrait être réellement, l’objet de leur programme politique, à traduire dans les faits, sur la base d’un plan directeur précis de mise en œuvre une fois au Pouvoir, et non, de simples slogans creux de campagne électorale, afin d’arnaquer les citoyens pour que ces derniers votent pour eux.
Nous notons au sujet de l’application des conclusions des assises nationales et de la CNRI, bien des tergiversations et des pieds qui trainent depuis lors, au lieu d’une prompte et ferme décision, pour en finir une bonne fois pour toutes. Comme ceci l’est dans le cas du Building, où tout est allé très vite. Nous remarquons également, qu’en matière de salaires pour son personnel, ses alliés, les anciens présidents et autres membres d’institution, il y va à la vitesse supersonique, sans consultation ni référence à la législation du travail en la matière, et moins encore, tenir compte de la réalité critique de nos finances publiques. Alors qu’ailleurs, certains pays beaucoup plus nantis que nous financièrement, et économiquement plus solides voient leurs autorités s’atteler plutôt à la réduction des dépenses publiques et au nivellement des salaires au milieu, par la baisse des hauts salaires et la réduction du train de vie de l’Etat, à plus forte raison, dans un pays comme le nôtre, membre du club PPTE et de celui du PMA. Ainsi ces pays-là, travaillent à maitriser et limiter la masse salariale à un niveau raisonnable et acceptable conformément à leurs ressources propres. Et dans le même ordre d’idées, ces autorités-là procèdent par réalisme et souci d’économie, à la compression de certaines régions peu viables, pour plus de cohérence dans la décentralisation des collectivités locales.
Objectivement, Abdoulaye Wade et Macky Sall sont les véritables fossoyeurs de la fonction publique et parapublique sénégalaises, dans le domaine salarial. Ils l’ont fortement marquée par un parti pris manifeste, et déstabilisée par des inégalités indécentes dans le traitement inéquitable des uns par rapport aux autres, tout cela, sur le dos des larges couches déshéritées. C’est injuste ! Ils ont dérégulé totalement, la base du système de rémunération au sein de l’Etat. Base qui se fondait sur des lois et règlements établis, transparents, équitables, nets et clairs. En lieu et place aujourd’hui de ces principes, ils se sont érigés en véritables tailleurs sur mesure, en confectionnant des salaires faramineux et discriminatoires à qui ils veulent, sans aucune base légale ou règlementaire, au détriment de l’emploi de la jeunesse au chômage et de nombreux autres demandeurs d’emploi.
Avec la ferme volonté qui était proclamée au départ sur la traque des biens mal acquis, la majorité des honnêtes citoyens était acquise à cette juste cause et avait applaudi des deux mains, cette juste mesure hautement patriotique. Ils se disaient, enfin Macky Sall va mettre de l’ordre dans l’Administration, par le frein de l’hémorragie financière de nos ressources dans le public, mais également, par la traque des voleurs à restituer nos biens volés. Nous saluons tout même l’existence de la CREI et ce qui se fait et doit se poursuivre jusqu’à son terme. Mais, au vu du relâchement de la rigueur et des interventions en faveur de certains, et par rapport à ce qui devait être accompli aujourd’hui, nous sommes inquiets et le scepticisme commence à gagner certains. Surtout au vu des privilèges inacceptables accordés encore à des intouchables ainsi que de l’impunité partielle, dont certains bénéficient.
« Je suis le président, je fais ce que je veux et ce qui me plait » Une telle attitude transparait parfois dans certaines décisions du président. Or, ceci est justement le pire ennemi de tout chef. D’ailleurs, Me Wade l’a appris à ses dépens. Alors, il est utile de noter et de retenir, que les gens aiment ou plutôt adorent les dirigeants humbles, modestes et qui économisent leurs deniers à des fins utiles de développement. Et, c’est d’autant aussi, qu’ils sont frustrés d’avoir des dirigeants hautains, suffisants, imbus de leur personne et irrespectueux à l’égard du citoyen. Les peuples sont souvent remontés contre les dirigeants qui dilapident leurs deniers à des fins personnelles, de prestige ou dans des dépenses improductives qui n’ont rien à voir avec le développement du pays.
Il est dommage alors, d’être élu démocratiquement et massivement par un suffrage aussi large de 65%, donc porteur de réels espoirs, et puis d’oublier par la suite, que la souveraineté n’appartient exclusivement qu’au seul peuple, que c’est lui qui donne le Pouvoir à qui il veut avec l’aide de Dieu, et non à personne d’autre. A cet effet, tous les hommes politiques sans exception doivent se convaincre une bonne fois pour toutes, qu’aucun marabout ne peut ni donner, ni assurer ou garantir à quiconque le Pouvoir. La seule garantie sure, c’est d’être près et au service exclusif de son peuple, pour la résolution de ses préoccupations majeures. Il est profondément regrettable de constater, que certains hommes politiques deviennent amnésiques, jouent à la comédie ou jettent leurs promesses aux oubliettes, une fois qu’ils s’installent confortablement au Pouvoir. C’est sans doute la raison qui fait dire à l’autre que : « Tout Pouvoir sans contrôle rend fou » et « le Pouvoir rend fou et le Pouvoir absolu rend absolument fou »
Voilà pourquoi nous notons avec beaucoup de regret, le fait que le président n’est pas souvent à l’écoute des populations et ne prête pas une oreille attentive à leurs plaintes et revendications, comme du reste aussi, à certaines voix qui s’élèvent dans son parti, sa coalition ou de simples citoyens mus par des soucis patriotiques soulèvent des questions importantes qui l’interpellent directement à des moments et situations graves du pays, qu’il devrait examiner attentivement et sérieusement. Malheureusement, il reste sourd à ces interpellations citoyennes et préfère agir seul, ou écouter alors ses laudateurs, qui ne lui disent que ce qu’il voudrait entendre ou alors lui racontent des histoires ou de folles rumeurs. Pourtant l’adage nous dit si bien : « Qui pense seul, agit seul, se trompe seul » C’est évident !
Mandiaye Gaye
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