Mais que font donc les conseillers à la communication de la présidence de la République ?
Cette question nous interpelle à double titre : la sortie présidentielle lors de la dernière rencontre avec la communauté malienne en Côte d’Ivoire en marge du dernier sommet de la Cédéao et celle plus récente et plus inquiétante lors du dernier congrès du Haut conseil islamique, jamais dans l’histoire de la République depuis l’indépendance, le pouvoir politique n’a paru aussi soumis à l’influence de la religion dominante.
Nous assistons à une obédience sans précédent du pouvoir donc de l’Etat à la religion et cela pose avec acuité et urgence la question de la laïcité, principe fondamental consacré par la Loi fondamentale qu’est la Constitution de la République aussi bien dans son préambule que dans le titre 2, de l’Etat et de la Souveraineté, Art 25 : “Le Mali est une République indépendante, souveraine, indivisible démocratique, laïque et sociale”.
Faut-il rappeler que la laïcité consacre la séparation de l’Etat et de la religion et donc l’impartialité de la puissance publique à l’égard des confessions religieuses ? Dès lors de principe fondamental affirmé, comment ne pas être interpellé lorsque le président de la République, garant de la Constitution, récite versets coraniques dans un discours officiel donc à l’endroit de la nation dans son ensemble ?
Loin de moi l’idée de remettre quoi que ce soit en question par rapport à la religion musulmane, car étant musulman et pratiquant, mais quand il s’agit des principes, la République ne doit pas se compromettre au point de créer un précédent fâcheux : autrement dit, le président de la République est-il le chef de l’Etat ou celui d’une confession religieuse ?
Bien sûr, il est conforté dans cette posture lorsque dans la salle du CICB, s’élèvent des Allah Akbar d’émotion et non d’adhésion et rien n’est pire dans la situation actuelle du Mali de paraître, de se trouver dans les nuages alors que la tension sociale monte, alors qu’on est assis sur un volcan !!!
Comment ne pas être interpellé lorsque la président de la République fait des jurons pour essayer de se justifier et d’ailleurs on ne sait pourquoi, alors qu’il nullement interpellé par une quelconque autorité ?
Comment ne pas être interpellé lorsque le président de la République brouille son propre discours en appelant au rassemblement et à l’unité pour ensuite brandir des menaces à peine voilées à propos des dossiers qu’il déteindrait ?
Nous attendons de l’autorité qu’il fixe le cap, qu’il parle de l’état de la nation, de la situation de Kidal qui échappe à la République.
Le chef de l’Etat donne l’impression d’une fébrilité et de ne pas du tout supporter la critique de sa présidence au bout de 7 mois d’exercice qui n’ont pas redonné l’espoir tant attendu au peuple malien au sortir d’une crise multidimensionnelle sans précédent, la plus grave de son histoire.
La riposte aux critiques doit être l’affaire de la majorité présidentielle et non du chef de l’Etat lui-même au risque d’affaiblir la parole présidentielle qui doit être solennelle et réservée aux grandes questions qui engagent la vie et l’intérieur supérieur de la nation.
Sory Ibarhim Sakho
Docteur en droit public, Paris France