Amadou Djicoroni Traoré à propos du paraphe du texte le 1er mars dernier : «Cet accord d’Alger 2015 est inacceptable !»

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Amadou Djicorini
Amadou Djicorini

«Il faut rendre à César ce qui est à César». Donc, hisser les Tamasheqs, selon l’avis du Mnla, au-dessus des autres Maliens et reconstruire l’édifice national sur cette base. Il n’est même pas besoin de réfléchir pour comprendre que c’est le rejet pur et simple de la devise «Un Peuple, un But, une Foi». Or, en adoptant cette devise à la veille de la proclamation de l’indépendance de la Fédération du Mali, les pères fondateurs avaient tiré la leçon des conflits raciaux et surtout ethniques qui avaient ravagé plusieurs pays dès leur libération du régime colonial. Voilà pourquoi le Code de la nationalité malienne a prescrit que sur les pièces d’identité (passeports, cartes d’identité…) il est interdit de faire figurer les mentions ethnie et religion comme cela se faisait sous le régime colonial. Et, depuis le 22 septembre 1960, le Malien est Malien. Il n’est ni Malien Bamanan, ni Malien Bobo, ni Malien Tamasheq, ni Malien musulman, ni Malien protestant… Il est tout simplement Malien. C’est ce que signifie Un Peuple. Toute évocation, même voilée, des notions de religion ou d’ethnie concernant un Malien, est une violation de la Constitution et de la Devise. Donc, la base qu’on propose dans cet accord d’Alger est inacceptable.

«Quelques mots pour tromper ceux qui ne demandent que ça»

Le seul objectif retenu par ce prétendu accord, c’est «la nécessité d’accélérer le développement économique, social et culturel du Nord du Mali» et cela, à travers «un système adapté». Cela signifie en clair que le seul problème dont on doit s’occuper, c’est le développement du Nord, comme s’il n’y a ni Sud, ni Est, ni Ouest. Comment peut-on accepter que la condition de la paix soit le développement du Nord uniquement ? Et on ajoute que cela doit se faire à travers un autre système que le système démocratique indiqué par la Constitution malienne. Il s’agit donc de substituer au système démocratique un système basé sur la supériorité de l’ethnie Tamasheq. On ose, en plein 21ème siècle, nous proposer le régime féodal et esclavagiste qui a la faveur de certains Ifoghas retardataires, indécrotablement réactionnaires ! Évidemment, le fameux «système adapté» nie la Constitution de 1992 et donc, toutes les notions qu’elle contient. Voilà pourquoi les mentions de «respect de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale…» formulées à l’article 1 de cet accord sont une annonce pour les naïfs, de la vraie moquerie. C’est d’ailleurs une des caractéristiques générales de ce texte : quelques mots pour tromper ceux qui ne demandent que ça et le fond des choses bien détaillé dans l’ordre et dans le désordre comme au tiercé.

Le prétendu accord met en cause la Constitution en parlant de «traduire dans la réalité les règles de bonne gouvernance» (préambule). Ce qui est explicitement dit dans le chapitre 1 article 3 (l’Etat malien prendra les dispositions requises pour l’adoption des mesures réglementaires, législatives, voire constitutionnelles nécessaires…) et surtout dans le titre II chapitre 3, article 6 (mettre en place une architecture institutionnelle). Dans une œuvre d’édification, s’agissant de bâtiment ou de construction étatique, parler de travaux d’architecture, c’est dire qu’on remonte à la conception, c’est-à-dire avant de placer même les premiers repaires des fondations.

En langage clair, il est question de concevoir une autre Constitution. N’est-ce pas se moquer du monde d’écrire cela pendant qu’on dit respecter tel ou tel principe de la Constitution ? Surtout quand on ajoute que dans la nouvelle conception, il faut «assurer une plus grande représentation des populations [du Nord] au sein des institutions nationales» (Chap. 3 art. 6). Est-ce à dire que désormais, c’est par un système de quotas avec priorité aux populations du Nord que seront désignés les responsables au niveau des institutions nationales (au niveau de la Présidence de la République, à l’Assemblée nationale, au Haut conseil des collectivités, à la Cour Constitutionnelle, à la Cour suprême, au Gouvernement…?  Dans cette dérive institutionnelle, on va jusqu’à prôner l’ouverture du Haut conseil des collectivités et du futur Sénat aux notabilités traditionnelles (du Nord, évidemment). Pourquoi n’y accueillera-t-on les chefs féticheurs, les gnèguans, les sorciers, les jeteurs de cauris, les korodiougas et autres tenants de traditions ? On se demande jusqu’où va la foutaise.

On fait de l’appellation Azawad un principe sacré inscrit en tête du chapitre 2 art 5 des «Fondements pour un règlement durable du conflit». Pour des raisons visiblement d’arrogance et de provocation, on qualifie l’Azawad de «réalité socio-culturelle, mémorielle et symbolique». On ajoute même que c’est une «réalité humaine» aux fins de la rattacher à ce qui est souligné dans le préambule et qui renvoie à la notion de race et d’ethnie. On pousse la provocation jusqu’à exiger du gouvernement une Conférence qualifiée «d’entente nationale» sur la problématique de l’Azawad et «les causes profondes de la crise» afin d’aboutir à l’adoption d’une Charte nationale incluant «les dimensions mémorielle, symbolique, identitaire et historique» de l’Azawad. Donc, on fait de l’adoption de l’appellation Azawad une condition sine-qua-non de la paix. Or, c’est la première République qui a institué la décentralisation et la déconcentration administrative en créant dès 1961 les 6 premières régions, 42 cercles et plus de 380 arrondissements en lieu et place des 27 cercles du Soudan colonial au sein duquel Kidal n’était même pas une subdivision. C’est en poursuivant cette politique de décentralisation que Kidal est devenu d’abord une subdivision, puis un cercle et maintenant, une région. Pour une région de si faible densité de population, n’est-ce pas suffisant ? Mais, dès le départ, il a été retenu le principe de désigner les régions, cercles et arrondissements du Mali par le nom de leurs chefs-lieux. Cela, pour des raisons de stratégie d’unité. En effet, si pour désigner la région de Kayes, on avait pris le nom Khasso ou pour la région de Sikasso le nom Kénédougou, que de frustrations on aurait créées ? En effet, dans la région de Kayes, il y a le Kidimaka, le Khaarta, le Kingui, le Bafing et dans la Région de Sikasso, il y a le Wassoulou, le Miangala, le Banan, le Ganadougou, le Banimonotiè… Ces raisons, ajoutées à celles évoquées dans le mémorandum du gouvernement, sont plus que suffisantes pour que la rébellion renonce à l’appellation Azawad. Il n’est prévu, pour représenter l’Etat dans les régions conçues dans ce texte, qu’un rôle de «contrôle à posteriori», alors que toute initiative de l’Etat devra être soumise à un examen préalable des autorités régionales. Ce qui traduit bien la volonté d’indépendance, car la région décide sans se référer et l’Etat est condamné à se soumettre à la volonté de la région. Le document parle de «diligenter la mise en place d’un Sénat». On sait que ce sera un changement complet de l’architecture institutionnelle du Mali. Personne n’a oublié que parmi les causes de la chute de Compaoré au Burkina Faso, figure en bonne place cette histoire de Sénat.

Une violation flagrante de la laïcité

Le prétendu accord inclut le droit pour les régions de «promouvoir des projets de coopération transfrontalière» (art. 43). Donc, bien au-delà de l’autonomie, la région a des droits diplomatiques à caractère de souveraineté internationale. Sans commentaire ! Ce prétendu accord inclut la volonté de donner aux «cadis un rôle dans la distribution de la justice». (Art. 39). C’est une violation flagrante de la laïcité. À partir de là, pourquoi les responsables des bois sacrés ainsi que les officiants des komos et les serviteurs des fétiches ne participeraient-ils pas à la distribution de la justice ?

Concernant les questions de défense et de sécurité, on envisage la création dans les régions d’une «police territoriale» n’obéissant qu’à la région. En réalité, c’est le droit de créer une armée de région. Ainsi, au Mali, il y aura autant d’armées que de régions. C’est la même situation qui a été créée dans certaines régions de la RD Congo où la guerre contre le pouvoir central dure depuis plus d’un demi-siècle.

L’accord paraphé crée des régions dotées d’Assemblées élues au suffrage universel direct, de présidents élus au suffrage universel direct, lesquels sont également chefs des exécutifs et de l’administration. Ces structures seront créées en priorité au Nord du Mali dès la signature de l’accord, mais elles ne sont «qu’applicables» dans les autres régions. En clair, dans les régions du Nord du Mali, il y aura des Etats ayant leurs pleins pouvoirs (législatif, juridique et exécutif) dès la signature de l’accord. Il ne faut pas se laisser tromper par le mot «exécutif». L’exécutif dans un Etat, c’est le gouvernement. Si un tel Etat a le droit d’adopter le nom de son choix, alors qu’il a déjà son drapeau, n’est-il pas un Etat indépendant ?

On prévoit d’adopter comme principes d’introduire dans l’armée la notion de «représentation des ethnies» (titre III art. 17). Dans quel pays a-t-on vu une armée constituée de cette manière ? On parle aussi de «progressivité du redéploiement des forces armées nationales reconstituées sur cette base». Et on évite de dire le rythme de cette progression. Ainsi, on pourrait facilement dire, comme cela est proclamé aujourd’hui à Kidal, qu’il faut que les Tamasheq soient les 60 ou 80% des effectifs avant toute progression. Le redéploiement pourrait ainsi être rejeté à l’éternité.

Le prétendu accord codifie l’impunité des rebelles, et en plus, offre à tous ceux qui se réclament de la rébellion une garantie illimitée de vie opulente «soit par intégration dans les corps constitués de l’État, soit dans l’armée et les forces de sécurité, soit dans la réinsertion dans la vie civile». Évidemment, on marque quelques lignes après la lutte contre l’impunité, mais ce sera alors qu’on aura fini de donner à tous les rebelles ce qu’ils veulent. (Chap. 8 art.18 à 21). On prévoit la mise en place d’un Conseil national de réorganisation des forces armées et de sécurité basé, lui aussi, sur «la représentation des ethnies» (art. 25). Les nominations aux grands commandements et services devraient être faites sur la même base.

Le texte donne naissance à ce qui est désigné sous le nom de «zone de développement prioritaire» et qui est limitée aux régions du Nord (art. 31 à 49). Et les résultats devront être atteints «dans un délai n’excédant pas 10 ou 15 ans». Pour son succès, l’Etat s’engage à y consacrer les fonds nationaux et toutes les aides extérieures obtenues par le Mali. Il est précisé que (art.38): «Le gouvernement soumettra, dès les premières sessions du Comité de suivi, un document précisant ses engagements en la matière, les moyens propres qu’il envisage de mobiliser ainsi que le calendrier de mise en œuvre». Financement : ressources publiques nationales et contributions internationales (chap. 2 art. 5).

Le prétendu accord donne aux supposées régions du Nord le droit à la libre disposition des «ressources naturelles, notamment minières» (chap. 5 art.12). Ce qui est une flagrante violation du Code minier du Mali dont les articles 3 et 4 stipulent clairement que les ressources minières du Mali sont propriétés de l’Etat qui en concède l’accès selon des règles de droit. Ce prétendu accord impose au Mali un Comité de suivi qui n’est autre que la tutelle internationale pour gouverner le Mali, selon la volonté de la rébellion. C’est ce Comité qui fait tout désormais au Mali (Chap. 19 art. 57 à 62) : assurer le suivi, la supervision, la coordination de l’application ; élaborer un chronogramme détaillé ; interpréter les dispositions ; concilier les points de vue ; amener le gouvernement à mettre en place les services publics ; adopter les textes constitutionnels, législatifs et réglementaires ; transférer les ressources et les moyens requis… Il ne reste au gouvernement que d’exécuter sans hésitation, ni murmure la volonté de ce Directoire international placé sous la conduite de l’Algérie avec le Burkina, le Niger, la Mauritanie et le Tchad comme vice-présidents. Que reste-t-il de la souveraineté du Mali ? Si la médiation a réussi, que viennent chercher les médiateurs après la signature d’un accord en bonne et due forme ? Que signifie cette pérennisation des médiateurs jusqu’à installer des démembrements du Comité de suivi dans les régions ?

Il est imposé également au Mali, le recrutement et la rétribution d’un «Observateur indépendant…chargé d’évaluer de manière objective l’état de la mise en œuvre du prétendu accord et qui publie tous les quatre mois, un rapport exhaustif..».

Les rebelles ne sont munis d’aucun mandat de qui que ce soit

Jeune Afrique (N° 2822 du 8 au 14 février 2015) parle «d’impasse» et évoque même le «mythe de Sisyphe» à propos de ce que vit le Mali depuis 2012. En effet, à Ouagadougou, il a été signé un préaccord basé sur le constat que le Mali n’est pas un interlocuteur valable en face de la rébellion. Quelle injure ! Impossible de ne pas comparer cette attitude de la rébellion à celle de Babemba qui a refusé de recevoir le capitaine Quiquandon, avant que celui-ci ne se fasse circoncire, car un homme non circoncis est un «bilakoro», selon la culture sénoufo, bamanan, malinké… Il ne peut être l’interlocuteur d’un notable.

Mais le comble, c’est que les rebelles qui nous ont envoyé cette injure par l’intermédiaire de Compaoré ne sont jusqu’à ce jour munis d’aucun mandat de qui que ce soit. Il n’y a jamais eu d’élections pour désigner aucun d’entre eux pour parler au nom des populations du Nord du Mali. Et personne parmi les médiateurs (africains comme occidentaux) ne s’embarrasse du fait qu’ils n’ont ni légalité, ni légitimité. Au contraire, le président français Hollande s’est empressé de leur donner raison en ajoutant même qu’il serait intraitable par rapport aux élections de 2013. Nos autorités avaient commencé par dire qu’elles ne discuteraient pas avec des hommes en armes. Puis après quelques mois de tergiversations et sans rien expliquer au Peuple, elles ont accepté le dialogue sous surveillance des instances africaines et onusiennes avec les hommes en armes.

Nos autorités avaient martelé que les discussions sur le Mali ne se passeront nulle part ailleurs qu’au Mali. Et là encore, sans explication, elles sont allées à Alger et pas qu’une fois. Elles ont tracé des lignes rouges à ne pas dépasser. Voilà que toutes ces limites sont franchies et on tente de nous dire le contraire.

On a présenté les pourparlers comme un débat entre compatriotes maliens, «nos frères», a-t-on dit. Et après quelques semaines, bien que la délégation gouvernementale soit conduite par «Un Haut représentant du chef de l’État», on parachute le ministre des Affaires étrangères à Alger pour coiffer l’ensemble, donnant le signe inquiétant que les choses ont changé et qu’il s’agit désormais d’une question entre le Mali et des étrangers. C’était un signal indiquant aux rebelles que le Mali était prêt à accueillir les solutions de partition du territoire, la division du pays, les concessions devant les prétentions des bandits.

On parle de déployer une stratégie «destinée à hisser les régions du Nord au même niveau de développement que le reste du pays» (chap. 12 art 35) et cela, en 10 ou 15 ans. Ici, il y a un non-dit qui tend à culpabiliser le Mali. Les autorités de notre pays ne sont nullement responsables du retard historique des zones nomades. Il s’agit là d’une notion pernicieuse historiquement et socialement fausse. Les régions du Nord, Kidal notamment, n’ont jamais connu un quelconque développement avant l’indépendance du Mali. Pendant les 70 ans de colonisation, Kidal n’a connu qu’une seule école, celle d’Intadeinit que Moussa Traoré a transformée en prison à partir de 1968 pour enfermer les dirigeants de la première République. C’est grâce à l’attention toute particulière de la première République que l’on a vu partout à travers le cercle de Kidal des écoles dotées de cantines pour nourrir les élèves, des dispensaires, des bureaux d’arrondissements, des maternités, des magasins de ravitaillements qui vendaient les produits de première nécessité au même prix qu’à Bamako, des puits aménagés, des campagnes de vaccination des animaux, des aires de maraîchage, au point qu’il y avait été organisé des Foires annuelles du Sahara (artisanales, maraîchères et animales) auxquelles participaient l’Algérie, le Niger… Si aujourd’hui il y a des Premiers ministres, des ministres, des députés, des ambassadeurs, des officiers de tous grades et des milliers de soldats, de gendarmes, de douaniers, d’administrateurs, des professeurs, des docteurs, des ingénieurs, d’opérateurs économiques tamasheqs, c’est parce que la République du Mali a résolument et puissamment œuvré pour qu’il en soit ainsi. Les enseignants des années de l’indépendance suivaient les familles nomades dans leurs déplacements quotidiens pour instruire leurs enfants dans des conditions très pénibles. Maintenant, en zone nomade, on voit des bâtiments alors que jusqu’au départ des Français, nul ne songeait à sédentariser les Touaregs. Le niveau économique, social et culturel de Kidal et de sa population n’a changé que depuis la naissance de la République du Mali et l’attention qui lui a été accordée. Auparavant, les populations vivaient comme au Moyen-âge. Reconnaître cela est une simple preuve d’honnêteté. Et d’ailleurs, qui a détruit les infrastructures péniblement érigées au Nord ; qui a tué les agents de développement ; qui a provoqué l’exode massif des populations ; qui a créé la situation d’où résulte la destruction du cheptel ; qui enfin empêche que se poursuive dans la quiétude le travail de développement au Nord ?

Depuis plus d’un demi-siècle, les rebelles ont commis des crimes contre les populations civiles et l’administration malienne en 1963, en 1989, en 1996, en 2006, en 2012 et 2013. L’initiative de prendre des armes et de déclencher la guerre à plusieurs reprises, causant de nombreuses pertes en vies humaines et des dégâts matériels importants dans un pays, n’est-elle pas en soi un crime contre l’humanité ? Ce sont les rebelles qui attentent aux droits des hommes, des femmes et des enfants, ainsi qu’au droit du Peuple du Mali de vivre en paix et dans l’unité sur son territoire hérité de ses ancêtres. Au Mali, il y a de nombreuses ethnies: Khasonké, Kakolo, Bellah, Bozo, Somono, Samogo, Gana, Peuhl, Sonrhaï, Dogon, Toucouleur, Touareg, Dafihng, Bamanan, Minianka, Arabe, Senoufo, Bwa, Maures, Shèmu, Mossi, Diakanke, Soninké, Mandenka… Ils ont toujours vécu ensemble dans la paix, l’harmonie la plus totale, l’amitié et la fraternité.

Quelle ethnie ou tribu noire a pris les armes contre les autres ?

Depuis 1960, quelle ethnie ou tribu noire a pris les armes contre les autres pour quelque revendication que ce soit ? C’est seulement parmi les Touaregs que se sont formés des groupes qui ont osé prendre les armes contre le pays entier. Et pas qu’une fois. Une fois en 1963, une autre fois en 1989, une troisième fois en 1996, encore en 2006 et cette fois-ci en 2012 et ça dure. Chaque fois, tout le reste du Mali ne fait que les subir, alors qu’ils sont minoritaires même au sein de leur communauté qui, elle-même, est entièrement prise en charge par le travail des autres Maliens. Comment s’étonner alors que le peuple souverain, y compris les Touaregs patriotes qui sont la majorité, réagisse fermement ? À l’égard de celui qui pointe son arme contre le drapeau, le pays et le peuple en formulant des exigences outrancières, quoi faire d’autre que d’appliquer l’injonction de l’Hymne national qui dit «Si l’ennemi découvre son front, Au-dedans ou au dehors, Debout sur les remparts, Nous sommes résolus de mourir !». Il n’y a pas d’autre alternative. Quel pouvoir légitime accepte que des groupuscules terroristes sévissent librement sur son territoire et au nom de quel principe de droit de l’homme ? Comment se passent les choses en France avec les séparatistes Corses, en Espagne avec les Basques, en Colombie avec les Farc ? Le Mali se défend et défend les mêmes valeurs que les pays où résident les donneurs de leçons au mépris de la dignité et de la souveraineté de notre peuple.

À propos du récent préaccord et de l’accord paraphé le 1er mars, le gouvernement a déployé une communication toujours biaisée. Dans un premier temps, on a voulu cacher la mauvaise marchandise en disant que certains aspects étant secrets on ne pouvait pas donner le texte aux journalistes. C’est ce que d’aucuns ont qualifié de «caca de chat» car c’est une habitude chez le chat, d’enterrer ses défécations. Il a fallu le professionnalisme de certains journalistes pour que le texte soit disponible et que se déclenche un mouvement d’opposition à son adoption. Ce qui a obligé le pouvoir à organiser dans la précipitation quelques rencontres à la veille du départ pour dernier round des négociations. Et maintenant, avec l’accord que la délégation gouvernementale a paraphé avant de consulter le Peuple, on tente de convaincre l’opinion par une communication où on évite systématiquement toute évocation de quelque article de l’accord. Comme s’il s’agissait d’un sacrifice rituel sur un scorpion vivant. En effet, quand il vous est prescrit de faire des gestes rituels au-dessus d’un scorpion vivant, vous baladez vos mains suffisamment loin de l’insecte, car vous savez que si vous le touchez, le sacrifice risque de vous coûter cher.

Cet accord est mauvais en tous ses aspects

Les défenseurs patentés de l’accord agissent de même. Ils en parlent sans jamais y toucher. Ils vous font la morale en vous disant les vertus de la paix. Ils vous bercent d’illusions en vous jurant leur espoir d’une suite heureuse avec de faux «Inch Allah». Ils vous cassent le moral en ressassant que le Mali a perdu la guerre, que l’armée est incapable, que Dieu même en a ainsi décidé ; que refuser l’accord, c’est être va-t-en guerre ; que les gens sont fatigués… Mais, ils ne peuvent pas montrer un seul article de l’accord qui soit totalement positif pour le Mali et pour la paix.

Il y a plus Malien que les Maliens, des gens qui aiment le Mali plus que les Maliens. Ce sont l’Usaid, la Minusma et d’autres officines qui déploient une campagne forcenée dans les Universités, les écoles et parmi les associations de jeunes, de femmes…pour faire accepter l’accord. Ils en ont imprimé des milliers d’exemplaires en 9 (neuf) langues et ils les distribuent en tenant des discours lénifiants. Pourquoi ? On dit chez nous que «celui qui affiche pour un bébé un amour plus intense que celui de la maman elle-même, court le risque d’être soupçonné de mauvaises intentions».

Les gesticulations des rebelles à Kidal après le paraphe indiquent deux choses. C’est de la moquerie à l’adresse du gouvernement en même temps qu’un coup médiatique à l’adresse de l’opinion internationale pour montrer qu’eux, rebelles, ils ont un peuple derrière eux ; qu’ils respectent et qui est mobilisé. Ensuite, c’est le désir de monter les enchères pour amener Bamako à vite procéder à la signature officielle, de crainte de se voir imposer d’autres sacrifices et d’autres humiliations. En réalité, c’est de la poudre aux yeux pour amuser la galerie.

En conclusion, cet accord est mauvais en tous ses aspects. C’est un accord de partition du Mali ; un accord raciste, injurieux, ethnocentriste ; un accord de démantèlement de l’édifice national ; un accord de démission nationale ; un accord humiliant ; un accord de trahison nationale. Il faut le dénoncer sans ambages. Tout patriote malien et tout ami sincère du Mali ont le devoir de le combattre.

Nous sommes Sonrhaï, Dogon, Toucouleur, Touareg, Dafihng, Bamanan, Minianka, Arabe, Sénoufo, Bwa, Maure, Shemu, Mossi, Diakanké, Soninké, Mandenka, Khasonké, Kakolo, Bellah, Bozo, Somono, Samogo, Gana, Peuhl… Nous sommes et resterons Maliens !!!

 

Bamako, le 18 mars 2015

Amadou Seydou Traoré dit Amadou Djicoroni

Tél: +22376057667 BP 3243

Email: aslaruche@yahoo.fr

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5 COMMENTAIRES

  1. CET ARTICLE EST UNE ÉCOLE POUR TOUS LES MALIENS. IL REPLACE LE MALI DEVANT LE CHOIX ENTRE SA SOUVERAINETE REELLE ET L ‘ AVENTURE QUI PROCEDERA À L’ ÉCLATEMENT DE LA NATION EN RESTANT SUR CE PREACCORD BRICOLE. JE SALUE L’ÉRUDITION ET L’EXPERIENCE DU DOYEN QUI JOUE ICI SON RÔLE NOBLE ET INESTIMABLE. A LA LUMIÈRE DE CETTE ANALYSE ET DE CES CRITIQUES IL Y A DU PAIN BENI POUR NOS DIRIGEANTS ACTUELS POUR UN MALI FORT ET UNI.

  2. Il est difficile à une nation comme le Mali de dire qu’il faut se débarrasser d’une partie de son pays; mais dans le cadre de Kidal, le Mali devrait essayer avec leur comportement machiavélique depuis la nuit des temps. Kidal vit pratiquement des ressources des autres partie du Mali depuis la création de ce pays; il ne produit rien pour les autres partie de la République et il se met à se rebeller toujours avec la complicité du colonisateur français. Si la France et les touareg rebelles croient qu’il peuvent avoir plus que la République leur donne, qu’ils prennent Kidal et qu’il laissent les autres maliens tranquilles. Mais force est de reconnaître que Kidal appartient plus aux négroïdes qu’aux blancs à cause de leur nombre, amis il faut retenir que ces négroïdes refusent de rentrer dans la lutte armée pour défendre leur Kidal. Le jours où ils se rendront compte que les rebelles touareg et la France les auront pris Kidal la lutte armée prendra d’autres formes plus graves.

  3. EXCELLENT ARTICLE POUR NOUS ECLAIRER ET NOUS OUVRIR LES YEUX SUR LE SOI DISANT PRE-ACCORD D’ALGER MERCI BCP ET BONNE CONTINUATION DANS TES DEMARCHES NOBLES ET SALUTAIRES.MON CHER PAPA SACHE QUE LES VALEURS MORALES QUI ONT FAIT VOTRE FIERTE HIER,ONT DESERTE LE FORUM AUJOURD’HUI.LA CACOPHONIE DES AMBITIONS,RIME BIEN AVEC L’ABSCENCE DE CONVICTION ET DE VISION.IL S’EN SUIT UNE CLASSE DE POLITICIENS MALIENS PLUS MAFIEUX QUE PATRIOTE AVEC DES INTERETS ETRANGERS AUX PREOCUPATIONS MAJEURS DU PEUPLE.PARLER DE LIBERTE N’A DE SENS QU’A CONDITION QUE CE SOIT LA LIBERTE DE DIRE AUX CE QU’ILS N’ONT PAS ENVIE D’ENTENDRE.EN AFRIQUE ET SURTOUT AU MALI LES POLITIQUES ONT GOUVERNES DANS LE MENSONGE ET POUT LE MENSONGE.

  4. Entièrement d’accord avec l’analyse de tonton Amadou Djicoroni. Sommes fiers de savoir qu’il existe encore des gens comme vous au Mali

  5. Article long et ennuyeux mais très instructif. Le redacteur aurait pu en faire des épisodes pour faciliter l’assimilation chez le lecteur.
    Merci Amadou Djokoroni pour cette contribution qui ouvre un véritable débat sur la nation et la République.
    En effet le concept du droit constitutionnel, le desir de vivre ensemble des peuples constotue un element essentiel dans la formation d’une nationt (Une République). Il appartient aux maliens de bien definir cette notion de volonté de vivre ensemble.
    Ceux qui ont servi l’Etat dans ses régions septentrionnales, savent bien que le droit coutumier prime sur le droit objectif. Le peuple tamachèq et arabe du nord ne se refère qu’aux cadis pour toutes les célébrations matrimoniales et même la gestion des conflits non juridictionnels. La pratique a son essence dans la culture orientale (arabe). Pour la petite histoire, tous ceux qui sont ont la peau noire ou brune venant du sud est appélé “bambara” par le tamachèq. Allez demander à Mojamed Ag Souha de Menaka. Lui qui est fondateur du premier parti politique de l’ère de la démocratie après le 26 mars 1991. Il a voulu à travers la création de son parti, affranchir la communauté noire de Menaka. Mal lui en pris car, il sera forcé à l’exil au Niger. Il y a des réalités qu’il ne faut pas ignorées.
    Avec un peu plus de sagesse et de tolérance, la République se retrouvera.
    VIVE LA REPUBLIQUE

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