Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du Processus d’Alger : Le MPR du Dr Choguel K. Maïga s’engage

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Choguel Kokalla Maïga
Choguel Kokalla Maïga

Le MPR, à l’instar des autres partis membres de la Convention de la Majorité Présidentielle(CMP), a adhéré au paraphe du document par le gouvernement. L’Accord suscite, à la vérité, des réserves, par endroits. L’heure n’est cependant plus au débat sur ce qu’il faut accepter ou non. Il s’agit plutôt de s’approprier le texte aux fins de comprendre et de pouvoir expliquer pourquoi sa teneur entraîne notre adhésion.

Le document paraphé est la troisième mouture que la Médiation soumet à l’appréciation des deux parties en conflit à propos du devenir du Nord : le gouvernement de la République du Mali et les mouvements qui lui sont favorables, d’une part, la Coordination des mouvements armés entrés en rébellion contre le pouvoir central, d’autre part.

En effet, au sein de la classe politique, comme de la société civile,  personne ne s’est déclaré satisfait du contenu des deux premières moutures intitulées respectivement, « Projet d’accord pour la paix et la réconciliation au Mali » et « Éléments pour un accord de  paix et de réconciliation au Mali ».

Le gouvernement prenant acte de ce double rejet, convie l’ensemble des forces vives de la Nation à des concertations afin que chacun puisse formuler ce qu’il a comme griefs. Un atelier est organisé à cet effet, les 17 et 18 novembre 2014 puis un forum des forces vives, le 14 février 2015 autours des deux documents respectifs.

Au sortir de ces concertations, le MPR, plutôt que d’organiser une conférence de presse ou de diffuser un communiqué, se fondant sur son appartenance à la mouvance présidentielle, a élaboré, sous la supervision du président du parti, Docteur Choguel Kokalla MAIGA, un document intitulé « Observations et propositions d’amendements du Mouvement Patriotique pour le Renouveau (MPR) » sur le document « Éléments pour un accord de paix et de réconciliation au Mali ».

Par la voie appropriée, le document est transmis aux autorités compétentes qui en accusent réception et font comprendre que bon usage en sera fait.

  1. Analyse du texte de l’Accord:

Quelques appréhensions

«L’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger » se présente sous la forme d’un texte comportant sept titres qui regroupent 67 articles précédés d’un préambule et augmentés de trois annexes.

Par sa structure, il ne diffère pas des deux textes précédents produits par la Médiation et qui avaient suscité un rejet unanime de la classe politique. Cependant, par son contenu, il représente une réelle avancée, non seulement par rapport aux deux précédents documents, mais également par rapports aux différents accords signés depuis 1992 : « le Pacte national », « les Accords d’Alger »

 

Certes, tout ne donne pas satisfaction dans ce texte. Et pour cause, c’est un accord de paix et comme tout accord de ce genre, il est le résultat d’un compromis.

Quatre points suscitent, à notre avis, les plus grandes appréhensions :

  • la référence à la dénomination « Azawad » ;
  • la création d’une Zone de développement spécifique et l’annexe 3 qui contraint à trouver des fonds pour financer un programme de développement au coût non chiffré mais qui se devine exorbitant pour un pays comme le nôtre ;
  • le mode de recrutement dans la fonction publique des collectivités ;
  • la réorganisation des forces armées et de sécurité et l’insertion des ex-combattants.

Cependant, une lecture attentive du document et des références à plus d’une réalité aident à dissiper ces appréhensions.

  1. A propos de l’appellation « Azawad», article 5 :

Elle est chargée d’une connotation négative. Cela peut se comprendre si l’on retient que c’est sous cette dénomination que les groupes armés entendent baptiser l’entité politique qu’ils comptent créer après s’être détachés de la République du Mali. Cela, ils l’ont affirmé dès 1987 lors d’un congrès tenu à Tripoli, dans une Charte qui retenait, parmi ses dispositions, « la libération totale de la région communément appelée Azawad. »

Voilà qui incite à être circonspect avec cette dénomination. Cependant, le texte actuel contient deux indications qui lèvent toute équivoque à propos de la perception du terme.

En premier lieu, il ne présente pas l’Azawad comme une entité géographique, politique et juridique avec un droit à l’autodétermination et à l’indépendance, ce que souhaitent les séparatistes, mais comme « une réalité socioculturelle, mémorielle et symbolique… » ;

En second lieu, il incite à un dialogue entre Maliens afin d’aboutir à un consensus sur le contenu à attribuer à la dénomination : « Une Conférence d’Entente Nationale sera organisée durant la période intermédiaire, avec le soutien du Comité de Suivi et sur la base d’une représentation équitable des parties, en vue de permettre un débat approfondi entre les composantes de la Nation malienne sur les causes profondes du conflit. Ce débat aura à prendre en charge, entre autre, la problématique de l’Azawad. » (article 5) ;

Dès lors, une focalisation sur un mot, fût-il un nom chargé de connotation négative, ne peut être un motif valable pour rejeter tout un document surtout si toutes les garanties sont fournies concernant l’emploi qui en sera fait ultérieurement.

  1. A propos de la création de la « Zone de développement des Régions du Nord» :

Il est question (article 5) « de mettre en place une architecture institutionnelle permettant aux populations du nord, dans un esprit de pleine citoyenneté participative, de gérer leurs propres affaires, sur la base du principe de la libre administration, assurer une franche représentation de ces populations au sein des institutions nationales. » D’aucuns pourraient parler de discrimination. En fait il n’en est rien.

Il est dit (article 6) que la Zone de Développement sera « dotée d’un Conseil consultatif interrégional et d’une Stratégie Spécifique de développement adaptée aux réalités socioculturelles et géographiques ainsi qu’aux conditions climatiques.» L’article 33 précise que ce Conseil est chargé exclusivement de la coordination des efforts de mutualisation des moyens en vue d’accélérer le développement socio-économique local. Il ne s’agit donc pas d’une entité territoriale mais d’un cadre d’échange et de coordination.

Du reste à partir du chapitre 4 du document, « collectivités territoriales » et « les régions » se substituent aux expressions « régions du nord », « populations du nord ». L’argumentation est donc plus en faveur de la décentralisation que de la discrimination au profit du Nord.

Ainsi donc, si on y regarde de près, l’on constate que la gestion qui est préconisée, est une disposition valable pour l’ensemble des régions du Mali.

Il faut y voir plutôt la mise en pratique du nouvel ordre institutionnel reposant sur la régionalisation et adopté par les Etats Généraux sur la décentralisation.

D’ailleurs, dans l’histoire contemporaine, le recours à la création d’une zone de développement n’est en rien discriminatoire. D’autres États, et pas des moindres, y ont eu recours. Ainsi, pour tirer l’URSS du rang de pays sous-développé et le hisser au rang de puissance mondiale, le Gouvernement central soviétique a initié, entre autres, la création des « combinats industriels » tels « l’Oural-Kouzbass », « l’Oural-Karaganda ».

De même, avec l’intention de sortir les États-Unis de la crise économique des années 1920-1930, le Gouvernement central des Etats Unis d’Amérique a pris entre autre mesures, la création de  la « Tennessee Valley Authority ».

  1. En ce qui concerne le recrutement dans la Fonction publique de Collectivités :

Le document préconise de « favoriser le recrutement dans la fonction publique des collectivités territoriales, dont les effectifs seront majoritairement réservées aux ressortissants des régions du Nord » (article 16).

Il reste évident qu’une région, quelle qu’elle soit, après avoir élaboré et adopté son programme de développement, accordera la priorité aux agents et cadres du territoire de son ressort en cas de recrutement local pour pourvoir les postes créés.

 

  1. S’agissant enfin de la réorganisation des forces armées et de sécurité, la grande appréhension vient surtout de la réinsertion des ex-combattants:

A ce propos, l’article 23 précise que les parties conviendront de «la nécessité d’entreprendre, en profondeur, une réforme du secteur de la sécurité, en tirant les leçons des expériences passées » alors que l’article 46 réaffirme le caractère imprescriptible des crimes de guerre et crimes contre l’humanité ainsi que la non amnistie pour leurs auteurs.

  1. Pourquoi faut-il alors adhérer à l’Accord?

Ainsi donc, outre les précisions ci-dessus énoncées, l’on ne peut ignorer que l’Accord est un texte issu de négociations. Or toute négociation intègre un certain nombre de paramètres pour aboutir à un accord qui concilie. L’État malien s’est présenté à ces négociations dans une position pas des plus confortables. Il n’empêche, il s’y est présenté avec la ferme volonté de ne négocier que ce qui est négociable.

Pour cette raison, l’objectif ne souffrait d’aucune équivoque : quoi qu’il arrive, quelles que soient les circonstances, il s’agissait de ne pas transiger sur un certain nombre de points, ceux-là mêmes qui fondent notre existence en tant que Nation, État souverain aux frontières reconnues par des traités internationaux.

La stratégie a consisté à présenter la décentralisation comme moyen le plus sûr pour associer les populations à la gestion de leurs affaires.

A l’analyse, il ne serait pas excessif de soutenir que la stratégie du Gouvernement a été efficace et l’objectif atteint.

  1. L’Accord précise, dès le chapitre premier, ce qui ne saurait être négocié : le « respect de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’État du Mali ainsi que de sa forme républicaine et de son caractère laïc »

Et dans la suite du document, aucune contradiction ne se note entre cette affirmation de départ et les autres dispositions.

  1. « L’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali issu du processus d’Alger » écarte toute référence à l’autonomie et au fédéralisme.

Il ne retient, pour le devenir de la Nation, ni le fédéralisme, ni l’autonomie d’une partie du pays par rapport au pouvoir central. Par là, il préserve les intérêts supérieurs de la Nation, attestation que l’objectif a été atteint. Le Mali reste un et indivisible avec des institutions valables pour l’ensemble des citoyens.

Il consacre le succès de la stratégie adoptée par l’État consistant à proposer la décentralisation comme solution non plus aux seuls problèmes des régions de Gao, Kidal et Tombouctou, mais aux problèmes que connaissent l’ensemble des régions du Mali ;

  1. L’Accord ne consacre pas l’existence d’un statut particulier pour une région : Contrairement au « Pacte National » et aux « Accords d’Alger », il ne consacre pas l’existence d’un statut particulier pour une région que d’aucuns seraient libres d’appeler Azawad.
  2. L’Accord autorise des négociations ultérieures exclusivement entre Maliens pour se consolider :

Il ne se présente pas comme un texte figé, définitif, mais plutôt, comme un Accord-cadre, nonobstant son volume. A ce titre, il sert de socle aux indispensables débats ultérieurs pour la réconciliation nationale et le renforcement des liens de solidarité.

CONCLUSION 

Au vu de tout ce qui précède, que faut-il retenir ?

  1. En premier lieu, nous rappeler la ligne rouge tracée par le Président de la République, Son Excellence, Monsieur Ibrahim Boubacar KEITA, à savoir que tout est négociable hormis l’unité, l’intégrité territoriale, la forme républicaine de l’Etat et son caractère laïc.
  2. En second lieu, reconnaître que toute négociation peut déboucher sur l’un des quatre résultats suivants : la rupture qui se matérialise de deux manières, le constat aimable d’échec ou le report de la négociation à une date ultérieure ; la décision imposée par le plus fort ; le compromis et le consensus total.

Le constat aimable d’échec serait la manifestation d’un manque de sérieux évident, une forme de ponce-pilatisme qu’aucun Malien ne saurait approuver, et pour lequel les générations futures nous condamneraient. N’est-ce pas, du reste ce que souhaitent les séparatistes ?

Le report à une date ultérieure équivaudrait à prolonger les souffrances des populations du Mali et particulièrement celles du Nord. Il est temps que prennent fin la précarité, l’insécurité, le non accès aux services sociaux de base.

  1. Notre souhait est que tout prenne fin sur la base d’un consensus. Mais, à défaut de consensus, le compromis reste possible.

Pour les raisons ci-dessus évoquées, le document, déjà paraphé par l’État, doit susciter l’adhésion des forces vives du pays. Son rejet aurait comporté plus d’inconvénients que d’avantages et aurait surtout profité à ceux qui ne se préoccupent nullement de sécurité et de développement.

Il possède des insuffisances, certes. Mais, un débat franc entre fils du même pays peut aider à corriger. La paix qu’il autorise à signer comporte plus d’un avantage dont, entre autres, la fin des souffrances de nos compatriotes réfugiés dans d’autres pays ou déplacés sur le territoire national, la sécurisation des populations du Nord et leur accès aux services sociaux de base, le renforcement de l’État et la sortie d’une crise qui perdure depuis janvier 2012.

Unité et Défense de la Patrie Malienne!

Fait à Bamako, le 14 mars 2015

Le Bureau Exécutif Central

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