Accord de paix et de réconciliation : S’organiser pour l’appliquer au mieux

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Le Premier ministre Moussa Mara : « La riposte du Mali sera à la hauteur de l’agression »
Le Premier ministre Moussa Mara

L’Etat en premier. Ayant la charge de nous orienter, de canaliser nos énergies, d’apaiser nos craintes, de gérer nos passions, de nous informer, de nous sensibiliser, de nous organiser, de limiter nos débordements…L’Etat se trouve en première ligne dans l’application de cet Accord. Cette responsabilité historique est à gérer avec opiniâtreté, animé de l’esprit de sacrifice qui sied à une action historique tout en gardant une lucidité et un sens de la mesure à toutes épreuves. Elle portera au préalable à assurer une mobilisation de tous les instants des maliens dans la direction de l’application la plus exhaustive du contenu du document pour lever toute ambigüité quant à notre volonté d’aller de l’avant et de conduire les réformes majeures nécessaires à la refondation de notre vivre ensemble. Elle doit concerner également la mise en place d’un dispositif particulier pour appliquer l’Accord et assurer que nous avons pris la pleine mesure de toutes nos responsabilités. Elle doit enfin se traduire par la conception d’un plan de marché cadencé qui assurera à l’Etat malien un avantage permanent dans la prise d’initiative et dans la proposition d’idées d’amélioration du processus d’application de l’Accord.

 

Mobiliser par une communication régulière, exhaustive et sans exclusive, toutes les composantes de la société

La communication à engager pour que nos compatriotes aient une juste perception de l’Accord de paix et soit suffisamment engagé dans le suivi de l’application, doit être massive, toucher toutes les composantes de la société malienne et surtout régulière pour maintenir en haleine la communauté nationale. L’importance du processus doit justifier l’ampleur de la stratégie à concevoir et à mettre en œuvre avec des moyens conséquents.

Il convient de concevoir les messages, les argumentaires sur les questions sensibles, identifier les messagers et les vecteurs de communication appropriés, élaborer les stratégies de communication pour ensuite préparer chacune des activités et évaluer les coûts et allouer les moyens nécessaires. La mise en œuvre de la stratégie doit engager l’ensemble de l’Etat et se faire sur toute la période intérimaire avec plus ou moins d’intensité en fonction des différentes phases du processus.

La communication institutionnelle qui a d’ailleurs été déjà engagée par l’Etat est à poursuivre vers les Institutions, les collectivités locales, la société civile, les corps constitués. Chaque département ministériel doit constituer un cadre d’échanges et de mobilisation de ses agents pour la cause de la paix et de la réconciliation nationale. Des rencontres au niveau des cabinets, des services centraux et déconcentrés, pour réunir l’ensemble des agents afin d’évoquer l’Accord, ses avancées et présenter les perspectives en identifiant, le cas échéant, le rôle du département,  peuvent être envisagées.

La communication vers le grand public à travers la télévision, les radios, la presse écrite aussi bien en français que dans les langues locales, sous forme de magazines de présentation, de débats, de conférences…est à organiser. Elle est difficile et coûteuse mais impérieuse pour diffuser la saine information dans le corps social. Le monde de la presse peut être un puissant vecteur vers le grand public. Des messages appropriés à reprendre dans nos langues nationales pour évoquer les sujets sensibles mais aussi les avancées et réformes à mettre en œuvre seront utiles. Les corps intermédiaires que sont les autorités traditionnelles et religieuses peuvent accompagner ce mouvement.

Il est souhaitable l’organisation des conférences des cadres dans les Régions, avec la participation des ministres et leurs équipes ayant participé aux négociations, d’engager les préfets et les élus,  d’organiser les mêmes conférences dans les cercles pour véhiculer les mêmes messages. Cela a été fait pendant la phase des discussions. Cette fois – ci, l’action aura l’avantage d’ouvrir des perspectives concrètes et de demander aux uns et aux autres des efforts précis à fournir.

En ce qui concerne les collectivités locales, l’organisation avec l’association des municipalités mais aussi avec l’organisation faîtière des cercles et des régions de conférences spécifiques à ces acteurs sera bienvenue. Cela permettra de faire outiller les élus du pays de capacités de compréhension et d’explications des avancées contenues dans l’accord. Ils seront d’autant plus enclins à vulgariser les bonnes informations et à susciter des bonnes réactions de leurs administrés. Un exercice similaire peut être tenté avec le Haut Conseil Islamique, les églises catholiques et protestantes, le réseau des chambres d’agriculture, des chambres de métiers, des chambres de commerce… pour ensuite leur demander de faire en sorte que les organisations locales relevant de leurs organisations fassent des efforts dans le même sens à destination des membres, des fidèles, dans les mosquées, zawiyas, diocèses, paroisses, villages, communes, cercles…

 

Ces actions au plus près des populations sont profitables et ont des effets positifs durables.

 

Le monde intellectuel, les organisations académiques, les universités et structures de formation supérieure, les creusets de l’intelligentsia, qui ont de l’influence dans plusieurs cercles et qui portent quelques fois la voix du Mali à l’extérieur du pays sont à associer au processus. Echanger avec eux, fournir des explications fouillées, écouter leurs suggestions et appréhensions participent d’une volonté constructive qu’il faut adopter. Ces milieux offrent l’occasion de débats, d’échanges, de contradictions toujours utiles à la bonne information et à la sensibilisation des populations. La transparence doit être le fil conducteur de la stratégie de communication autour de l’Accord de paix et de réconciliation. Dans cette veine, il faut ouvrir les possibilités de débats partout où cela est possible (antennes de télévision, plateaux de radios, conférences débats…) et permettre à ceux qui sont opposés à l’Accord de pouvoir intervenir, expliquer leurs positions, faire des contre propositions et offrir l’occasion aux maliens de se rendre compte des alternatives possibles sans populisme. C’est cette attitude qui rassurera car la censure alimente la rancœur et crée des suspicions propices au repli et à la contestation bruyante voir violente. En revanche, offrir la possibilité de s’exprimer permet de mettre souvent à nu l’absence de fondement de certaines positions extrêmes et donc de décrédibiliser leurs auteurs.

Nos autorités ne doivent pas dédaigner l’organisation des rassemblements populaires dans les grandes villes pour venir présenter et débattre avec les populations de ce document majeur pour l’avenir du pays. Dans une ville chef de lieu de région ou de cercle, dans une commune de Bamako, une place centrale peut être identifiée. Les partis politiques et les organisations de la société civile peuvent être mis  à contribution pour mobiliser, les débats publics permettant l’expression de tous pourront donner l’occasion d’expliquer et de convaincre de la pertinence de certaines notions théoriques compliquées. Dans cette veine, l’Etat doit envisager des voies et moyens permettant de toucher la population jeune, porteuse d’avenir, nombreuse et devant être concernée car l’Accord a une portée de moyen et long termes. L’utilisation des nouvelles technologies d’information et de communication, la mise à contribution du réseau du Conseil National de la Jeunesse et des nombreuses organisations de jeunes sont des opportunités à saisir. Il en est de même des femmes qui sont à toucher par des canaux existants.

 

S’organiser pour bien appliquer et rapidement l’Accord de paix

 

L’Etat doit se configurer pour appliquer totalement l’Accord, mettre en évidence son engagement univoque et démontrer ainsi que les difficultés sur le terrain ne peuvent lui être imputées, cela mettra encore davantage en lumière la mauvaise foi de certains acteurs du processus.

Ce qui figure dans l’Accord et dans les annexes n’est ni plus ni moins que l’occasion et le processus pour reformer en profondeur l’Etat malien afin de nous donner des chances de pouvoir enfin aborder les vraies questions : gouvernance, rapport Etat – populations, responsabilisation de ces derniers, lutte contre l’impunité et la corruption, efficacité des services publics et des agents publics…

Nous ne devons pas rater cette occasion historique pour engager ici et maintenant les réformes nécessaires,  d’une ampleur encore plus importante que celles de 1993 – 1995 et sans doute jamais atteinte dans l’histoire du Mali indépendant pour enfin faire entrer notre pays dans une période de renouveau, tourner définitivement le dos aux crises cycliques et redonner espoir à nos compatriotes. C’est un engagement historique que nous nous devons tous (pouvoir, société civile, citoyens) de répondre dans nos diversités et avec toute notre énergie. Cela suppose, concernant l’Etat, la prise de mesures institutionnelles particulières.

Il doit être donné à l’Accord une force juridique majeure, à l’aune d’un Traité international, en le faisant ratifier par l’Assemblée nationale, en faisant prendre par le Conseil économique, social et culturel, le Haut conseil des collectivités territoriales et chaque Conseil régional du Mali (les 8 régions et le district) des résolutions formelles de soutien. La société civile dans sa grande diversité (chambres consulaires, patronat, syndicats, presse, femmes, jeunes, leaders religieux, leaders traditionnels, associations professionnelles, etc.) et les partis politiques peuvent aussi être incités à prendre des résolutions de soutien et un engagement de participation à la mise en œuvre de l’Accord dans l’esprit de l’article 51.

Dans la pratique, la mise en place d’une administration de mise en œuvre de l’Accord au niveau de l’Etat peut être productive. Cette administration de mission relèvera de la primature avec une instance de coordination composée des Ministres et dirigée par le Premier ministre. C’est elle qui devra concevoir le plan d’action et réfléchir à sa mise en œuvre avec l’appui des administrations dans la conduite des réformes. L’instance de coordination et de suivi se réunira une fois par mois pour permettre l’exécution diligente des actions par l’Etat, accélérer le rythme de mise en œuvre des tâches et lever toute difficulté dans l’application de l’Accord par les différents segments de l’Etat.

Eu égard à l’importance du sujet, il peut être institué un compte rendu au Chef de l’Etat, à l’occasion de chaque Conseil des ministres, sous forme de synthèse par le Premier Ministre de l’état d’exécution de l’Accord sur rapport du responsable de l’administration de mission. Cela permettrait de recueillir des instructions appropriées en vue d’une application plus diligente de l’Accord. Le haut représentant du Chef de l’Etat pourrait poursuivre son rôle de conseil du chef de l’Etat, d’envoyé spécial auprès de la médiation, de missions sur le terrain, de facilitateur entre les parties maliennes, de soutien à une implication constante de la société civile, des autorités traditionnelles…dans la sensibilisation et l’application des termes de l’Accord de paix.

En mettant en place un dispositif institutionnel propre à l’application de l’Accord, l’Etat enverrait un message rassurant aux acteurs de l’Accord, susceptible d’améliorer les conditions de son application rapide au bénéfice de nous tous.

 

Une cadence élevée dans l’application de l’Accord

L’Accord de paix est rédigé en précisant à de nombreuses reprises, dans le corps du document comme dans les annexes, des délais très rapprochés pour engager son application (quelques fois en semaines, souvent en mois). Cela est positif car il donne des éléments objectifs pour apprécier la bonne foi des parties et surtout crée les conditions pour permettre aux populations de voir rapidement les retombées de son application sur le terrain, notamment dans le domaine de la sécurité.

La communication et l’organisation à mettre en œuvre pour une bonne application des dispositions de l’Accord sont nécessaires mais ont besoin qu’un plan d’action serré soit conçu et suivi de manière très méticuleuse par les premiers responsables de l’Etat. Ce plan d’action doit permettre à l’Etat d’anticiper sur tout ce qui lui est demandé et d’être constamment à l’avant-garde. Ce qui suppose au niveau de nos administrations l’engagement d’actions de manière encore plus précoce que les délais donnés dans l’Accord.

Dans un contexte où nos élites n’ont pas une grande habitude la gestion axée sur le résultat, de l’obligation de résultats dans les délais et du travail sous une grande pression, des efforts significatifs sont nécessaires pour mettre l’Etat en position favorable dans l’application de l’Accord. Les acteurs à proposer dans les nombreuses instances à créer, les réformes à conduire dans les domaines institutionnels, de défense et de sécurité, de financement du développement, les initiatives à prendre en matière de réconciliation, de justice et des questions humanitaires…sont toutes à inventorier avec exactitude, les délais à identifier et répercuter en interne des chronogrammes spécifiques pour les respecter, définir les responsabilités et informer tous les acteurs pour un traitement diligent des tâches confiées.

Ce dispositif est à engager au plus tôt, avant même la signature de l’Accord, pour que dès le lendemain de celle-ci, les initiatives à engager puissent l’être sans délai. Il nous est obligatoire de nous organiser pour que l’Etat malien ne soit jamais pris en défaut dans l’application de l’Accord et que cela soit su. C’est uniquement à ces conditions que nous pourrons garder l’initiative, dicter l’agenda et travailler à tirer le meilleur avantage de ce document au bénéfice de notre pays et des maliens.

 Moussa MARA

moussamara@moussamara.com

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2 COMMENTAIRES

  1. Ridicule celui qui a détruit notre armée, nous demande de nous organiser pour appliquer un accord bidon qui va aussi détruire ce qui reste du pays.

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