A Monsieur le Premier ministre : Appel de cœur simple à cœur plus vaillant

4

 Excellence Mr le Premier Ministre

Djigui Bagayoko

Qu’il plaise à vous d’accepter que le simple citoyen que je suis,  sorte de L’inconnu pour vous adresser un appel au cœur brave et déterminé  que votre Silhouette a symbolisé  dans l’imagerie de  nos compatriotes,  depuis des années qu’il a été permis  de vous révéler à la mère patrie.

Cet appel s’adresse d’abord au héros mondial de la science  dont l’apparition et  l’annonce  qu’il est Malien, arrosent de baume le cœur de tous ceux qui  aspirent  le souffle  patriotique. J’ai eu plusieurs occasions de vous croiser dans les salons de l’aéroport de Lomé, et  je me pressais  chaque fois  de vous montrer  à mes entourages tant j’étais fier de prouver aux autres que mon pays a mis au monde des grands hommes. Je perdais le temps parce  que ceux-là que je croyais chatouiller semblaient  plus avertis. Mais je demeure encore aujourd’hui à l’ancre avec cette  fièvre  de l’honneur. Et c’est pour cela que je ne voudrais point tolérer que vous essuyiez des revers sur « une autre planète »  où vous venez d’atterrir.

Mon appel d’aujourd’hui s’adresse en particulier au responsable national, au citoyen issu d’une des familles les plus glorieuses du pays. Loin de moi le reflexe ou la volonté  du panégyriste vulgaire pressé de vendre du verbe et  de la verve à des fins de prébendes matérielles ou promotionnelles.

Je suis un simple citoyen. Dès lors,  que ceux  qui liront ces lettres veuillent bien m’en excuser, c’est parce que le silence m’aura porté trop de préjudice morale au point que la rigide angoisse  qui m’étreint la gorge,  ne se dissipe  qu’au bout de ma plume et de ma voix accentuée. Aujourd’hui je n’userai point de ma voix, vous êtes loin de moi. Je viens d’adresser une manifestation de joie au Président de la République, et sans aucune hypocrisie, j’ai admiré et félicité l’homme. Que cela ne vous émeuve,  vous demeurez un des hommes dont la patrie aura toujours besoin et il n’est pas opportun d’énumérer toutes les œuvres utiles que vous avez déjà rendues au pays et au monde, avant même votre arrivée à la Primature. Dans le fait, vous êtes passé de citoyen au service du monde à celui de simple citoyen  malien. Cela seul  suffit pour magnifier symboliquement le sacrifice que vous avez supporté en acceptant les lourdes charges actuelles. C’est la preuve que votre intérêt personnel passe en second devant les immenses défis de la nation dont des éminences  plus averties  ont décidé de vous confier la gestion.  Mais voila que la donne change au fil des jours,  que le contraste se solidifie sur  l’arène de la décision,  que les chances de sortie de crise se compromettent au rythme des définitions et redéfinitions des  compétences des  institutions de la République. Une République qui ne l’est plus que de nom, la constitution élaborée en 1991 sur la base du copier-coller,  n’ayant prévu le cas de figure actuel.

Excellence Mr le Premier Ministre, nous vivons dans la semaine de tous les dangers pour le Mali,  et ce n’est pas parce que la lapidation atroce opérée  par les criminels s’est faite à plus de 1000 kilomètres de Bamako (une première au Mali) qu’il ne faille l’interpréter comme le signal des jours tristes. La tension est au comble et tous les regards se tournent  vers deux personnes qui donnent tout l’air de se préparer à la bataille rangée. Les petites phrases et leurs interprétations multiformes échangées à travers  les médias  ne sont point de nature à nous voiler la face. Et le danger est que tous les acteurs de la scène politique,  de la société civile, de la presse,  etc. sont  devenus  ce qu’il convient d’accepter avec moi, des « ANTIPROS ».  Même certains parmi ceux qui ont la mission sacrée de rapprocher et de concilier,  semblent lassés de poursuivre leur  devoir,  semant le doute sur la sincérité de leur impartialité. A moins qu’ils me fassent croire à l’adage qui dit   que « sous la pluie, on ne reconnait pas la sueur ».   Et le suspens actuel réside dans le questionnement : entre vous deux QUI VA FINIR PAR L’EMPORTER. C’est en tout cas le « Choux Gras de la presse » du jour. C’est dire qu’à coté des « Antipros » il y a des spectateurs professionnels éloignés auxquels le contexte offre la source idéale d’inspiration à une scène théâtrale pleine d’ironie, mais…mais  qui se joue pourtant à l’entrée d’un cimetière.

Le citoyen lambda, qui n’a accès à aucun moyen  de communication et qui souffre dans sa chère et dans son âme, suit impuissant et ignore à quel saint se vouer, ignore de quoi demain sera fait.

Excellence Mr le Premier Ministre, « Qui va l’Emporter » n’a de sens que dans une  castagne des vieux temps comme celle de  « Bilissi et Bakaridian ». Alors qu’une bataille de deux éléphants ne fait de victimes qu’au sol : les herbes et les arbustes.  Dans votre cas, il n’y aura aucun gagnant, mais un très GRAND PERDANT : l’honneur du Mali.  Son image reculera à plusieurs siècles jusqu’en  deçà de la grande assemblée de Kurukan Fuga (1236).  Subhanal’Ahi. Que le Tout-Puissant en ce mois béni de Ramadhan nous en garde.

Mr le Premier, ne m’en voulez  pas que je veuille vous interpeler de cette manière. Mais c’est parce vous êtes à mes yeux et à ceux de beaucoup d’autres citoyens, le seul à disposer de la Clé  de sortie de la crise institutionnelle qui risque d’exposer davantage la nation à l’humiliante risée  mondiale.

Aussi  voudrais-je  en appeler à votre sagesse, afin que vous choisissiez élégamment de préserver et votre dignité, et votre honneur  en ouvrant le boulevard à l’épilogue d’une tension que nul, y compris vos supporteurs, ne souhaite exploser avec des conséquences difficiles à  maîtriser.

Et pour cela je loue de votre excellence, le souci de préserver  les règles de courtoisie et le caractère sacré des liens de sang que nous ont légués  nos ancêtres de Kurukan  Fuga.

Je suis sûr que vous n’avez pas envie d’offrir une autre caractéristique emblématique aux relations de cousinage entre les Diarra et les Traoré et qui risque de s’inscrire éternellement  en contre vérité. Puisque vous n’aimez point que la postérité retienne de vous des actes historiquement dommageables au « sanankouya » sacré.  Le ridicule abattra les maliens si l’on ne réussit pas à anéantir les risques actuels. Nulle fierté après,  d’avoir inventé le cousinage à plaisanterie, le meilleur cadre de facilitation que nos ancêtres ont offert à l’humanité toute entière.

Je suis également sûr que vous n’avez jamais dérogé au respect de la hiérarchie familiale qui impose que le cadet  cède à  l’ainé. Oui, ça,  vous l’avez toujours honoré et même  en dehors du cadre familial, le ségovien que vous êtes demeurez ancré à nos valeurs traditionnelles.

Alors pourquoi   ces principes et valeurs ne peuvent pas être transposés dans les affaires publiques d’une nation. N’en serait-il pas la meilleure équation sinon la plus authentique aux normes de la gloire de nos ancêtres,  au moment où  les médiations  extérieures, faute de solution consensuelle, paraissent choisir leur camp.  Et que direz-vous du respect de la hiérarchie institutionnelle dans un régime présidentiel  (une nation de chef) où les circonstances ont forgé un attelage qui n’a de légitimité que dans les stratégies de certains acteurs de la communauté internationale. Stratégies en continuelle variation.  Quel citoyen, fut-il de la haute hiérarchie,   peut  tirer gloire de  la défaite d’un  Président de la  République sur l’arène du conflit des compétences dans un régime présidentiel. Est-il opportun de tester la faisabilité d’une nouvelle configuration institutionnelle dans un pays atrophié aux deux tiers avec en plus des centaines de milliers de personnes déplacées.  En quoi réside la motivation d’une confrontation des tenanciers du pouvoir au moment où  la reconquête de l’intégrité territoriale exige la communion de  foi et la solidarité nationale à tous les niveaux.

C’est pourtant l’anatomie de toutes ces  questions qui m’autorise à affirmer sans risque de me leurrer que votre Excellence sait tirer la meilleure résolution qu’exigent  les défis de l’heure.

Oui, je ne me trompe point en affirmant que vous savez mieux que quiconque, que la fondation d’une posture d’homme d’Etat incarnant l’espoir  des futures générations,  se balise dès maintenant mais au sacrifice d’empoignades (inutiles d’ailleurs)  pour conserver contre vents et marées des positions acquises dans un contexte de non légitimité.  

Il y a tout à gagner et rien à perdre,  si vous choisissez  la porte de l’honneur par anticipation.  

 Avant vous, il y en a qui n’ont pas hésité à renoncer aux revendications légitimes et légalement fondées,  au profit d’un Mali paisible et réconcilié. Ceux-là jouissent encore de cette notoriété,  de cette célébrité, pour avoir su renoncer quand il le fallait.  Mais l’histoire récente donne la leçon et surtout l’avertissement que : le pouvoir gagné par la voie de l’usurpation s’installe  orgueilleusement dans l’illusion,  s’enfile  un réseau fidèle d’opportunistes, gouverne sur les fondements de la corruption et du népotisme,  mais… Mais,  finit toujours dans le drame et la grande humiliation.  Soyons  fiers  de n’avoir pas collaboré dans un tel contexte.

Oui, je ne me trompe point Mr le Premier Ministre, que vous le savez, lorsque la hiérarchie institutionnelle se conjugue en plus au droit d’ainesse, le cadet selon nos traditions est prié de céder le fauteuil.

Je sais également, Excellence, que vous êtes plus soucieux que quiconque de l’image positive  que vous devrez laisser  à la génération actuelle, et qui vous offrira plus de chance dans les combats futurs.

Je sais enfin, que vous savez, que toutes pressions sur votre personne, visant à vous maintenir contre votre propre gré, ne trouvent leur fondement que dans la validation du principe : « LE OUVOIR S’ACQUIERT SEULEMENT PAR LA FORCE ».  Non ! Vous n’y croyez point. Ne vous sacrifiez pas pour eux, car sans vous ils ne savent comment y arriver. Mais je vous souhaite quand même beaucoup de courage et d’abnégation pour gagner cette première bataille des partisans.

Sachez tout de même que la reprise de la coopération internationale, l’emploi de milliers de nos compatriotes, la reprise des activités économiques dépendent de votre courage, de votre choix du sursaut d’orgueil, de votre choix du SALUT.

En priant votre Excellence de croire en l’assurance de ma haute considération, je formule le vœu que ce mois béni de carême,  vous offre  plus de sagesse, de  courage et d’audace  pour offrir à nos concitoyens inquiets et attristés, la chance de préparer et de célébrer l’Aïd El Fitr dans l’allégresse, la joie, et  surtout le SOUVENIR GLORIEUX D’UN GRAND HOMME DE PLUS.

Djigui BAGAYOKO

Lomé

E-mail : bdjigui@yahoo.fr

Commentaires via Facebook :

4 COMMENTAIRES

  1. Merci Mr. Bagayoko pour votre contribution noble.Vous faites la fierté des patriotes maliens.Le PM commet la grosse erreur en se basant sur les extrémistes pour lancer un bras de fer contre le peuple malien.Ce pays compte 16 millions d’habitants et non 50 milles.La situation difficile que vit le Mali impose la sagesse de la part du pm non élu,mais cmd est aveuglé par le pouvoir.
    Vive un Mali fort,juste et libre!

  2. Il aurait dû lire cette lettre avant sa reconduction. Sûr qu’il aurait choisi d’abandonner la bataille rangée. Mais il peut se rattraper encore.

Comments are closed.