Après avoir rencontré les différentes délégations sur la crise malienne, l’ancien président du Nigeria, Goodluck Jonathan, en mission de médiation de la Cédéao à Bamako, a fait des propositions de sortie de crise. Pour lui, ces mesures ont eu « l’adhésion de toutes les délégations à l’exception du Comité Stratégique du MS-RFP ».
Après une première mission qui a séjourné à Bamako le 18 juin 2020, la Cédéao a jugé nécessaire de dépêcher une Mission de médiation au Mali. La Mission était conduite par l’ancien président nigérian, Goodluck Jonathan.
Durant 5 jours, c’est-à-dire du 15 au 19 juillet 2020, la Mission a rencontré la délégation du mouvement de contestation, l’Iman Mahmoud Dicko, la société civile, les partis membres de la majorité présidentielle, les religieux, la Minusma, la Misahel, les Ambassadeurs de l’Union Européenne, la France, les Etats-Unis, la Chine, la Russie,
La Mission a aussi rencontré, entre autres, les membres du cadre d’actions, de médiation et de veille des confessions religieuses, des organisations de.la société civile, le Conseil national de la société civile, le Conseil national de la jeunesse, le réseau des femmes parlementaires, la plateforme des femmes leaders du Mali et la Coordination des Mouvements de I’AZAWAD (CMA).
La Mission a aussi rencontré le ministre de l’Administration Territoriale, le chef du gouvernement ainsi que le Président de la République, Ibrahim Boubacar Keita.
C’est avec les contestataires que les échanges avec Goodluck Jonathan ont été houleux. Après plusieurs séances d’échanges, en vue de trouver des pistes de solutions de sortie de crise, la délégation du M5 a catégoriquement refusé d’aller dans les débats de fonds. Pour eux, si discussion il doit y avoir, c’est autour des « conditions de départ du président IBK et de son régime du pouvoir ». Malgré ses moments de divergences, la Médiation a multiplié les rencontres avec la délégation du M5 qui est resté camper sur sa position de démission du président IBK du pouvoir.
Après 5 jours de pourparlers et après avoir écouté toutes les sensibilités du pays et les représentants des Institutions internationales au Mali, la Mission de médiation est parvenu à faire une Résolution.
Sur les tueries des événements, la Mission a présenté ses condoléances au peuple et au Gouvernement malien pour les pertes en vies humaines et souhaite un Prompt rétablissement aux blessés.
Ouverture d’enquêtes sur les décès survenus et les destructions des biens
La Mission condamne avec fermeté toutes les violences et invite toutes les parties à la retenue. Elle recommande aux autorités de finaliser toutes les enquêtes sur les décès survenus lors des événements des 10, 11 et 12 juillet 2020. Ces enquêtes doivent s’étendre également à toutes les violences et destruction de biens publics tel que l’Assemblée Nationale, I L’Office de la Radio et Télévision du Mali (ORTM) et le Haut Conseil des Collectivités territoriales ainsi que de biens privés afin de situer toutes les responsabilités en vue de sanctions appropriés.
A l’issue des différentes consultations avec toutes les parties prenantes la Mission a noté que les, problèmes de la crise socio-politique s’articulent autour des questions de gouvernance ainsi que des points déjà soulevés par la Mission ministérielle de la CEDEAO du 18 au 20 juin 2020, notamment : la reconstitution de la Cour Constitutionnelle après l’’abrogation du décret de nomination de ses membres ; la résolution du litige concernant les 31 sièges contestés au Parlement ; et la formation d’un gouvernement d’union nationale.
A ces points s’ajoutent les préoccupations liées aux événements tragiques des 10, 11 et 12 juillet 2020,
Réexaminer les résultats des élections législatives
A cet égard et suite aux différentes consultations, la Mission de médiation a formulé les propositions suivantes de sortie de crise :
En ce qui concerne la reconstitution de la Cour constitutionnelle, la mission recommande le règlement des différends sur les élections législatives que la Présidence de la République et le
Conseil Supérieur nomment chacun trois membres de la Cour Constitutionnelle. Les nominations, relevant du Président de la République se feront sur en associant toutes les parties prenantes, en conformité avec l’article 91 de la Constitution de la République du Mali de 1992.
Les six membres de la Cour nommés satisfont ainsi l’exigence du quorum. La Cour ainsi reconstituée devra délibérer et réexaminer les résultats des élections législatives concernant les 31 députés en question.
Après la résolution du litige sur les 31 sièges de l’Assemblée Nationale par la Cour constitutionnelle, l’Assemblée nationale reconstituée pourra, sur une base consensuelle, former ses trois membres pour compléter la formation de la Cour constitutionnelle.
Un gouvernement d’union nationale
La Mission dit qu’il est nécessaire de mettre en place de toute urgence un gouvernement d’union nationale, sur la base du consensus et tenant compte des recommandations du Dialogue National Inclusif et des propositions de répartitions suivantes :
50% des membres du gouvernement proviendront de la coalition au pouvoir, 30% des membres du gouvernement proviendront de l’opposition ; et 20% des membres du gouvernement proviendront de la société civile.
Pour la Mission, suite à sa formation, le nouveau Gouvernement accordera une priorité à l’amélioration de la gouvernance, aux réformes prévues dans les conclusions du Dialogue National Inclusif et à l’accélération de la mise en œuvre de l’accord d’Alger.
La mise en œuvre des mesures ci-dessus devrait être effective au plus tard le 31 juillet 2020.
La Mission rappelle également l’importance et la nécessité du respect des Institutions de la République, notamment les voies constitutionnelles pour l’accession au pouvoir et ce, conformément au Protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance de la
CEDEAO. Et d’ajouter qu’ « aucune forme de changement non constitutionnel d’accession au pouvoir ne sera acceptée par la Cédéao.
Adhésions de toutes les parties excepté le comité stratégique du M5
En outre, la Mission encourage toutes les parties prenantes à recourir au dialogue et aux négociations pour résoudre cette crise socio-politique, dans la bonne foi et la confiance mutuelle, pour le maintien de la paix et de la sécurité dans le pays.
Pour le chef de la Mission, la CEDEAO va immédiatement mettre en place un comité technique pour assurer le suivi de la mise en œuvre des recommandations. Ce comité dit-il sera composé des Représentants du Gouvernement, du Parlement, de la Société Civile, de la Magistrature, des représentants des femmes et des jeunes et de la Représentation de la CEDEAO au Mali.
« La Mission de Médiation se félicite de l’adhésion de toutes les délégations rencontrées aux mesures proposées à l’exception du Comité Stratégique du MS-RFP. La CEDEAO mettra tout en œuvre pour la réalisation effective des mesures proposées et demeurera saisie de la question. Un rapport sera soumis à un prochain Sommet de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la
CEDEAO.
Sur la disparition de Soumaila Cissé, la Mission réitère la solidarité de la CEDEAO au Gouvernement du Mali et à la famille de I’Honorable Soumaila CISSE, Chef de file de l’Opposition, enlevé depuis le mois de mars 2020. Sur cette disparition, elle invite le Gouvernement malien à intensifier les efforts pour obtenir, sans délai, sa libération.
Mohamed Keita