Depuis la création de la création de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) en 1975, l’idée de réalisation d’une zone monétaire pointait en filigrane comme une des finalités de ce regroupement. Mais c’est en 1983 que les chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao s’engagent résolument dans ce processus. La stratégie consiste, dans une première phase, à mettre en place une seconde zone monétaire au sein de la Cedeao, dénommée Zone Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (Zmao) – à côté de l’Union économique et monétaire ouest africaine – avec une monnaie baptisée Eco. Dans une seconde phase, procéder à la fusion des deux zones (Uemoa et Zmao) en une seule dans l’espace Cedeao. Une greffe facile à projeter, mais en réalité très difficile à concrétiser.
Le 20 avril 2000 à Accra (Ghana) cette stratégie va connaître un début d’exécution. En effet, six pays ouest-africains (Gambie, Ghana, Guinée, Libéria, Nigéria et Sierra Leone) annoncent leur réelle intention de créer cette deuxième union monétaire. Ainsi fut publiée la Déclaration d’Accra du 20 avril 2000, associée à des critères de convergence relatifs aux finances publiques, aux réserves de change et à l’inflation. L’Institut monétaire de l’Afrique de l’ouest (Imao) est né. Il s’agit de la nouvelle banque centrale devant s’occuper de la surveillance multilatérale et aussi de préparer la nouvelle union monétaire. Chacun des six pays signataires de la Déclaration d’Accra s’était engagé à maintenir son taux de change à l’intérieur d’un intervalle de fluctuations de 15% par rapport au dollar. Tout était donc parti si vite !
Mais deux ans plus tard, en décembre 2002 exactement, la réalisation de l’Union monétaire est reportée au 1er juillet 2005, faute de convergences. Il y avait un écart entre les objectifs initiaux en matière de respect des critères de convergence, indispensables au lancement de l’Eco, et les performances réalisées par les Etats. Retour à la case départ : les critères furent actualisés.
Depuis lors, le projet piétine et le déficit de convergences des économies est pointé du doigt. En effet, au plan macroéconomique, la Cedeao est un ensemble d’économies hétérogènes et qui convergent lentement.
Mais n’y aurait-il pas d’autres causes profondes comme l’absence de volonté politique ? En effet, sans la volonté politique, il n’y aura jamais de convergence, condition sine qua none pour la réalisation de l’objectif monnaie unique.
Retenons bien que ce projet appelait l’Uemoa à abandonner le franc Cfa au profit de l’Eco, la nouvelle monnaie unique de la Cedeao dont le régime de change vis-à-vis de l’Euro et du dollar devait ensuite être précisé. Ce qui pose un problème pour l’Uemoa dont la monnaie, le franc Cfa, reste arrimé à l’Euro, sur la base d’un mécanisme de garantie de la France. Le maintien ou non de ce mécanisme suscite de nos jours une vive polémique et nous aurons l’occasion d’y revenir.
Toujours est-il que le fantôme de la monnaie unique ne cesse de hanter les rencontres de la Cedeao, jusqu’à la cime de cette organisation. En effet, même lors du 45è sommet des chefs d’Etat tenu les 11 et 12 juillet 2014 à Accra (Ghana) la monnaie unique figurait (encore !) au menu des discussions. Le communiqué diffusé à la fin des travaux révèle qu’à propos de la monnaie unique de la Cedeao, les dirigeants se sont accordés sur «les recommandations portant sur les critères de convergence, la rationalisation des institutions et une feuille de route révisée avec une directive spécifique pour les institutions chargées de sa mise en œuvre ».
A la fin du 47è sommet des chefs d’Etat tenu à Accra au mois de mai 2015, on laisse entendre qu’à l’image du passeport de la Cedeao, les pays membres de la Cedeao veulent, dans les prochaines années, mettre en circulation une monnaie commune, après avoir annoncé le démantèlement des barrières tarifaires. Et le président de la Commission de la Cedeao, le Burkinabé Kadré Désiré Ouédraogo, de préciser : «Les chefs d’Etat et de gouvernement réaffirment leur volonté politique pour la création d’une monnaie unique en Afrique de l’Ouest, ainsi que leur attachement au programme monétaire et à la feuille de route adoptée à cet effet». Rassurant, il ajoutait que pour accélérer la mise en place de cette monnaie, la Bceao et l’Imao accompagneront les efforts des chefs d’Etat à assurer la feuille de route dudit programme. Mais au finish, aucune date n’a été avancée pour la mise en circulation des billets. On parle de 2020, mais attendons de voir pour y croire.
D’ores et déjà nous posons le débat et il sera question, dans notre prochaine édition, des contraintes et avantages de la zone monétaire unique de la Cedeao et aussi du franc CFA. Toutes les contributions pouvant enrichir ce débat sont les bienvenues dans nos colonnes.
Amadou Bamba NIANG
Bel article Mr NIANG !
Cependant ,force est de comprendre que nos dirigeants ne bougeront jamais pour ce projet tant qu’ils ne sentiront pas une réelle ménace de leurs bases .Chacun de son côté voit midi devant sa porte car la maitresse de cérémonie ne lachera pas prise à cause de ses intérêts sordides.Tous les jours l’occident nous donne des exemples pour qu’on puisse nous en inspirer et nous affranchir.
Mais tant que les dirigeants qui nous gouvernent trembleront devant cette maîtresse,rien n’y fera.
Alors ,au peuple de la CEDEAO,de bouger et de faire bouger les lignes.
Laurent Gbabo et Abdoulaye Wade en ont fait les frais : le premier voulait abandonner le franc cfa,le second avait demander des comptes à la Maîtresse pour sa gestion unilatérale et singulière de ce meme franc cfa dépuis sa création.Questions :pourquoi nos éminences grise en finances et économies se taisent-ils ?
Sommes nous incapables de nous gérer nous mêmes ?
Pauvres de Nous.
Monsieur Amadou Bamba Niang, vous évoquez à juste raison le manqué de volonté politique qui fait que Durant 33 ans, l’Afrique de l’Ouest ou du moins la CEDEAO n’a pas sa monnaie unique. Cependant, ce manqué de volonté politique des Etats n,est que l’effet apparent de la colonisation de nos pays et de la volonté de la France et du Royaume Uni de preserver leur précarré en Afrique!
La creation d’une monnaie unique a un coût. J’ai toujours pensé que le Nigeria est un géant économique qui pourrait être une chance pour les pays de la CEDEAO. Mais à condition que le Nigeria arrive à metre de l’ordre chez lui d’abord. Les autres pays de la CEDEAO devront de leur coté soutenir les efforts du Nigeria. En effet, le Nigeria seul peut supporter le cout de la creation de cette monnaie unique, comme l’Allemagne fédérale en son temps a supporté les coûts de l’unifcation ou encore la creation et l’avènement de l’euro.
Toutefois, actualité international aidant, la crise grecque est un cas d’école pour la creation de toute zone monétaire en Afrique. Il faut au préalable s’assurer que les mécanismes de surveillance multilatérale fonctionnent correctement et qu’aucun pays ne puisse camoufler réellement ses principaux agrégats économiques.
Les pays de la CEDEAO doivent savoir aujourd’hui que la liberté n,est jamais offerte mais elle s’arrache au prix des sacrifices. Et l’arrimage du FCFA à l’euro reste aujourd’hui la plus grosse autoflagellation encore en cours au monde. Que chacun s,en avise, la France ou le Royaume Uni ne va jamais accepter de gré de perdre des vaches laitières.
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