Un loup ne mange point l’autre. Les chefs d’Etat africains seraient-ils alors des loups qui ne se mangent jamais entre eux ? Quoi qu’il en soit, le constat est qu’ils semblent avoir appris à développer entre eux, ce qu’il convient d’appeler une solidarité de clan. Bien que ces Chefs d’Etat prétendent agir en leur nom, en général les braves peuples africains ne se sentent aucunement concernés par leurs agitations. C’est dans cet esprit qu’il faut comprendre la mission dite de bons offices de la CEDEAO qui a séjourné dans notre pays du 18 au 20 juin 2020. Une visite qui s’inscrit dans le cadre de la crise politique consécutive à l’exercice démocratique par le peuple malien, de son droit constitutionnel de demander la démission de son Président de la République. En vérité, la mission dite de bons offices de la CEDEAO n’a rien à envier d’une opération commando de sauvetage par ses pairs d’un Président de la République en échec cuisant de gouvernance.
Comment peut-on prétendre résoudre un problème qu’on ne comprend pas ? Soit la mission de bons offices souffre de déficit d’appréhension de la crise politique malienne, soit elle est de mauvaise foi. Dans les deux cas, la CEDEAO ne s’en sort qu’au prix de quelques plumes perdues. Selon la Mission, « la crispation de la situation socio-politique a été principalement créée par l’Arrêt de la Cour constitutionnelle sur les résultats des élections législatives de mars et avril 2020 ». La Mission de la CEDEAO au regard quelque peu voilé, ne retient donc de la crise actuelle que sa dimension du scrutin législatif de mars et avril 2020.Vouloir ainsi circonscrire aux seules législatives de 2020 cette grave crise politique multidimensionnelle qui couve dans le pays depuis si longtemps, relève simplement du mépris pour les Maliens et pour la noblesse de la cause qu’ils défendent. Les racines de la grave crise politique actuelle sont à rechercher plutôt dans les profondeurs de la gestion politique chaotique imposée au pays par le Président IBK qui, depuis son premier mandat, a battu tous les records de la mal gouvernance.
Un faux diagnostic et des bricolages et colmatages contraires au Protocole de la CEDEAO et à la Constitution du Mali
Il faut craindre que le principe actif de la thérapie administrée à la crise malienne par la Mission de la CEDEAO ne finisse par emporter le patient. Les faux diagnostics n’ont jamais conduit qu’à des vraies fausses solutions. Par son aveuglement volontaire ou non à ne percevoir dans la crise politique que les remous de l’Arrêt de proclamation des résultats définitifs des législatives de 2020, la Mission de la CEDEAO s’est embourbée dans le bricolage juridique et le colmatage institutionnel d’autant plus adulés par l’organisation communautaire que la plupart de ses chefs d’Etat souffrent de déficit chronique de vertu démocratique. C’est ainsi que la Mission lâche sans rire : « Elle invite le gouvernement de la République du Mali à reconsidérer les résultats de toutes les circonscriptions ayant fait l’objet de révision par l’Arrêt de la Cour constitutionnelle. De nouvelles élections partielles pour les circonscriptions concernées devraient être organisées dans les meilleurs délais ». Les aberrations de ce bricolage juridique accompagné de colmatage institutionnel qui n’honorent pas la CEDAO, sont évidentes et sautent à l’œil. Elles trouvent leur fondement dans un principe que la Mission elle-même rappelle dans son communiqué de presse, à savoir « le respect des institutions de la République ».
Au regard de ce principe, la Mission elle-même se considère-t-elle respectueuse de la souveraineté et des institutions du Mali, lorsqu’elle propose simplement de piétiner l’alinéa 1er de l’article 94 de sa Constitution qui dispose ainsi qu’il suit : « Les décisions de la Cour Constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics, à toutes les autorités administratives et juridictionnelles et à toutes les personnes physiques et morales ». En invitant le gouvernement de la République du Mali à « reconsidérer les résultats de toutes les circonscriptions ayant fait l’objet de révision par l’Arrêt de la Cour constitutionnelle », la CEDEAO se disqualifie totalement en bafouant l’Arrêt n°2020-04/CC-EL du 30 avril 2020 portant proclamation des résultats définitifs du second tour des législatives de 2020 et la Délibération n°2020-02/CC-EL du 6 mai 2020 portant sur les demandes de sa rectification, deux décisions judiciaires ayant définitivement acquis l’autorité de la chose jugée.
Comment, dans le respect de la Constitution du Mali dont la Mission se prétend garante au nom du Protocole de la CEDEAO, le gouvernement va-t-il pouvoir revenir sur des élections acquises du fait de l’autorité des arrêts de la Cour constitutionnelle ? Comment va-t-il s’y prendre sinon qu’à travers la violation de la Constitution maquillée par exemple en créant artificiellement des vacances de sièges au niveau des circonscriptions électorales concernées ? Une autre aberration du bricolage juridique proposée est que les élections partielles qui devraient en résulter « dans les meilleurs délais » vont devoir se dérouler dans le même cadre juridique justement décrié par tous.
Une lecture édulcorée et sélective du Protocole de la CEDEAO
En définitive, on peut légitimement se demander si les bricolages juridiques et les colmatages institutionnels proposées par la Mission de la CEDEAO ne procèdent pas du double pêché de sa lecture édulcorée et sélective du Protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance du 21 décembre 2001.
Au regard de la démarche politique du M5-RFP, l’interprétation faite de la part de la Mission de la CEDEAO, du point (c) de l’article 1er– Section I du Protocole paraît pour le moins fort douteuse, surtout lorsqu’elle se met à brandir « l’importance du respect des institutions de la République » qu’elle propose elle-même de piétiner pourtant et « notamment des voies constitutionnelles pour l’accession au pouvoir ». Il est évident cependant que le M5-RFP inscrit sa démarche dans le cadre de l’exercice d’un droit constitutionnel qui fait en même temps partie intégrante du principe démocratique général de la souveraineté du peuple. Cette expression populaire n’est nullement en contradiction avec le point (c) de l’article 1er du Protocole qui stipule que « tout changement anticonstitutionnel est interdit de même que tout mode non démocratique d’accession ou de maintien au pouvoir ». De manière insidieuse, la Mission de la CEDEAO semble assimiler le mouvement patriotique d’expression par le M5-RFP d’un droit constitutionnellement protégé, à un coup d’Etat ou une manipulation de la Constitution au sens du point (c) de l’article 1er du Protocole. Ce faisant, elle se fourvoie en fait dans de l’imposture juridique primaire. L’interdiction visée au point (c) de l’article 1er du Protocole concerne plutôt les coups d’Etat et les manipulations de la Constitution de la part des chefs d’Etats voulant se maintenir au pouvoir par des voies pouvant être qualifiées de non démocratiques. Elle ne vise nullement les peuples naturellement fondés, au nom du principe de leur souveraineté, à se débarrasser à l’occasion, des chefs d’Etat dictateurs qui ne respectent pas la constitution et les principes républicains comme le cas du Président IBK. Au demeurant, la CEDEAO ne sort pas grandie non plus de la lecture sélective du Protocole additionnel du 21 décembre 2001. Cette lecture sélective a comme conséquence que les complaintes des Maliens, ainsi que d’autres citoyens communautaires d’ailleurs, consécutives aux brimades de toutes sortes qu’ils subissent du fait d’entorses avérées de la part de chefs d’Etats aux principes de convergence constitutionnelle du Protocole, n’ont jamais retenu l’attention des missions démagogiques qu’ils manipulent.
Ces principes de convergence renvoyant à la responsabilité des chefs d’Etat qui s’en moquent éperdument sont les suivants : la séparation des pouvoirs ; l’indépendance de la justice ; des élections libres, honnêtes et transparentes ; la liberté de réunion et de manifestation pacifique ; l’organisation des élections aux dates ou périodes fixées par la constitution ou les lois électorales ; l’indépendance et/ou la neutralité des organes chargés des élections ; un contentieux électoral crédible.
Sur leurs décombres, les Missions de la CEDEAO relevant du Protocole du 21 décembre 2001 se suivent et se ressemblent : toujours aussi sélectives quant aux dispositions du Protocole ; toujours aussi commando à la rescousse des chefs d’Etat dictateurs, toujours aussi méprisantes pour les citoyens communautaires.
Dr Brahima FOMBA, Université des Sciences
Juridiques et Politiques de Bamako (USJP)
Mission de la CEDEAO au Mali
Voici le communiqué de presse final
Bamako, du 18 au 20 juin 2020
PROJET DE COMMUNIQUE DE PRESSE
Sur instructions du Président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), une délégation Ministérielle s’est rendue au Mali, du 18 au 20 juin 2020 pour une mission de bons offices dans le cadre de la situation socio politique du pays. Cette Mission s’inscrit dans le cadre des dispositions du Protocole Additionnel de la CEDEAO sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance.
La Mission ministérielle a été conduite par S.E.M. Kalla ANKOURAO, Ministre des Affaires Etrangères, de la Coopération, de l’Intégration Africaine et des Nigériens à l’Extérieur de la République du Niger, Président du Conseil des Ministres de la CEDEAO et comprenait S.E.M. Ally COULIBALY, Ministre des Affaires Etrangères de la République de Côte d’Ivoire et S.E.M. Geoffrey ONYEAMA, Ministre des Affaires Etrangères de la République Fédérale du Nigeria. S.E.M. Jean Claude Kassi BROU, Président de la Commission de la CEDEAO et le Commissaire Affaires Politiques, Paix et Sécurité, Monsieur Francis BEHANZIN, ont également participé à cette mission.
La Mission a bénéficié du soutien du Haut Représentant de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel, S.E.M. Pierre BUYOYA et du Représentant spécial du Secrétaire Général des Nations Unies au Mali, S.E.M. Mahamat Saleh ANNADIF.
La mission intervient dans un contexte marqué essentiellement par la persistance de l’insécurité qui se manifeste par la récurrence des attaques terroristes et la crispation de la situation sociopolitique. Celle-ci a été principalement créée par l’Arrêt de la Cour Constitutionnelle sur les résultats des élections législatives de mars et avril 2020.
La CEDEAO voudrait d’abord présenter ses condoléances aux Autorités de la République du Mali et aux familles des soldats des Forces Armées et de Sécurité du Mali, décédés lors de l’attaque terroriste perpétré le 14 juin à Bouki-wèrè, dans le secteur de Diabali. La CEDEAO souhaite un prompt rétablissement aux blessés et s’incline devant la mémoire de toutes les victimes que connait le pays depuis quelques années.
La Mission réitère également le soutien et la solidarité de la CEDEAO au Gouvernement du Mali et à la famille de l’Honorable Soumaïla CISSE, Président de l’Union pour la République et de la Démocratie, Chef de file de l’Opposition, enlevé depuis le mois de mars 2020. Elle invite le Gouvernement malien à poursuivre les efforts pour obtenir, sans délai, sa libération.
Au cours de son séjour, la délégation ministérielle a été reçue en audience par le Président de la République du Mali, S.E.M. Ibrahim Boubacar KEITA et le Premier Ministre, Dr Boubou CISSE. Elle a aussi rencontré les représentants des organisations suivantes :
– le Mouvement du 5 juin – Rassemblement des Forces patriotiques ;
– l’Imam Mahamoud DICKO et sa délégation ;
– la Majorité présidentielle au Parlement (EPM) ;
– le Cadre d’actions, de médiation et de veille des confessions religieuses et des organisations de la société civile ;
– le Réseau des Femmes parlementaires ;
– la Convergence des Forces Républicaines.
En outre, la Mission a rencontré une délégation d’Ambassadeurs accrédités à Bamako (Union Européenne, France, Etats Unis d’Amérique).
La mission a noté la convergence de vues de tous les acteurs maliens sur les nombreux défis auxquels le Mali est confronté, notamment le défi sécuritaire, sanitaire (Covid-19) et économique et la nécessité d’œuvrer, de toute urgence, à sortir le pays de la situation actuelle. La mission a rappelé qu’il est donc important d’éviter une autre crise qui engendrerait des complications additionnelles.
Tout en rappelant les dispositions pertinentes du Protocole ci-dessus mentionné de la CEDEAO, la Mission invite toutes les parties prenantes à privilégier le dialogue et la concertation comme mode de règlement des différends. La CEDEAO est disposée à se porter garant du respect des décisions et recommandations précisées aux paragraphes 10 et 11 ci-dessous afin de trouver une issue à la crise qui préserve la paix et la stabilité du Mali et de la sous-région.
Dans ce contexte, la Mission rappelle l’importance du respect des Institutions de la République, fondement de la stabilité du pays.La Mission note que l’Arrêt rendu par la Cour Constitutionnelle dans le cadre du contentieux des dernières élections législatives est à la base de la crispation socio –politique actuelle. Elle invite donc le Gouvernement de la République du Mali à reconsidérer les résultats de toutes les circonscriptions ayant fait l’objet de révision par l’Arrêt de la Cour Constitutionnelle. De nouvelles élections partielles pour les circonscriptions concernées devraient être organisées dans les meilleurs délais.
.En outre, la Mission insiste spécifiquement sur la nécessité de :
a) œuvrer pour le rétablissement d’un climat de confiance renouvelée entre les parties maliennes ;b) éviter la violence comme moyen de règlement de crise et privilégier le dialogue ;c) préserver les Institutions de la République afin de maintenir la stabilité du pays et d’éviter le chaos institutionnel aux conséquences imprévisibles et désastreuses pour la paix et la stabilité du Mali et de la sous-région ;
d) mettre en place un Gouvernement consensuel d’union nationale tenant compte des recommandations du Dialogue National Inclusif ;
e) accélérer la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger ;
f) poursuivre résolument la mise en œuvre des conclusions du Dialogue National Inclusif ;
g) mettre en œuvre les réformes prévues concernant la Constitution et le Code électoral ; et
h) envisager une relecture des textes régissant la Cour Constitutionnelle.
Un mécanisme de suivi de la mise en œuvre des décisions et recommandations ci-dessus sera mis en place avec la participation de la Commission de la CEDEAO.
La délégation ministérielle exprime sa profonde gratitude aux Autorités et au Peuple Maliens pour l’accueil chaleureux réservé à la mission. Elle associe à ces remerciements et reconnaissance la Représentation de l’Union Africaine à Bamako et la Mission des Nations Unies au Mali (MINUSMA) pour l’appui et toutes les facilités accordées à la Mission.
Fait à Bamako, le 19 juin 2020
S.E.M. Kalla ANKOURAO,
Président du Conseil des Ministres
MERCI, MR Brahima FOMBA…!!
Bjr Dr Fomba
Malgré ton niveau en droit, j’ ai été déçu par ton analyse lors de l’émission Politik débat de la chaine Africable, d’hier soi, face à Me Tapo. Mes excuses, vous avez nul, en cours d’arguments. Tu voue une colère noire contre la personne à tel point, tu oublies tes notions de droit.
Encore, désolé, si, ce sont les constitutionnalistes qui doivent pourfendre, profaner, fouler au sol, chiffonner , que sais je encore. Pour la seule et l’unique raison, la raison d’IBK. Vous devez arrêter d’enseigner le droit, sinon, le produit ne sera pas bon. Un président, qui a un mandat constitutionnel, vous voulez le faire démissionner de force, et tu refuses de voir la réalité, en cachant derrière un pseudo de légitimités. Vous avez (M5-RFP) quel élément pour dire que tout le Mali est avec vous.?.
Encore , une fois, sachons , raison gardée, vous n’avez pas de mandat.
Vous voulez conduire le pays dans une crise d’instabilité criarde en cherchant vos propres intérêts sordides. Le peuple silencieux est là, il vous observe minutieusement.
Wa salam
MAFIATLANTI$T€_MAFI€UR0PÉ€N
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