Excellence Monsieur le Président de la Conférence des chefs d’états de la CEDEAO
Excellence Madame et Messieurs les chefs d’état et de gouvernement
Monsieur le Président de la Commission de la CEDEAO
Monsieur le Représentant Spécial de l’Union Africaine, Président de la MISMA
Mesdames, Messieurs, les ministres
Excellence Mesdames, Messieurs les membres du corps diplomatique
Distingués invités, mesdames, messieurs
Il y a un peu plus d’un an, le 17 février 2012, lors de son 40eme Sommet ordinaire, placé sous le signe de la consolidation de la paix, de la sécurité et de la culture de la démocratie, la CEDEAO portait à sa présidence, le Président Alassane OUATTARA qui nous reçoit aujourd’hui avec la chaleur de l’hospitalité ivoirienne, dans cette ville – symbole de Yamoussoukro, au cœur du pays Baoulé qui a donné au monde la formule partout connue : AKWABA. Chez le regretté Félix Houphouet Boigny, l’homme de la Paix, l’avocat du dialogue, notre père à tous. A l’anniversaire de ce mandat salutaire pour mon pays c’est à la fois un devoir et un plaisir pour moi de m’adresser à vous, Président Alassane OUATTARA.
Vous vous êtes dépensé sans compter pour redynamiser notre organisation sous régionale mais aussi et surtout pour que le Mali puisse recouvrer son intégrité territoriale, vous qui aviez déjà tant à faire sur le front de la réconciliation et de la reconstruction en Côte d’Ivoire. Grace à vous, la Côte d’Ivoire est entrain de réintégrer le cercle vertueux du progrès et le Mali est en voie, grâce à vous, de sortir du cercle vicieux de la plus grave crise de son histoire.
Merci donc Président OUATTARA et permettez qu’en cette occasion, solennelle en tant que Président d’un pays profondément ému par l’élan unanime de solidarité dont il a bénéficié, je réitère l’expression de la gratitude de tout le Mali à tous ses frères et amis.
Je voudrais saluer l’accompagnement combien décisif et bienveillant de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest en particulier, de l’Union Africaine et également des Nations Unies et de l’Union Européenne avant et pendant notre crise.
Je voudrais saluer tous les chefs d’état de notre organisation sous régionale dont les troupes se battent et meurent aujourd’hui sur le sol Malien.
Présidents Yayi Boni, Blaise Campaoré, Macky Sall, Faure Gnassingbe, Jonathan Goodluck, Alpha Condé, John Mahma, Mahamadu Issoufou, merci à mon nom personnel, au nom du Peuple du Mali qui se souviendra toujours.
Chers frères et sœurs de la CEDEAO, de l’Afrique et du monde, je voudrais également vous demander de vous joindre une fois de plus à vos frères et sœurs du Mali pour saluer le Président Idris Deby Itno ainsi que le Peuple Tchadien pour l’engagement massif et qualitatif de la vaillante armée Tchadienne au Nord du Mali.
Elle a hélas enregistré ses premiers martyrs. 24 valeureux fils du Tchad ont fait don de leur vie pour la paix, pour la liberté et la dignité de l’homme. Nous nous inclinons pieusement devant leur mémoire.
Ces douloureuses et injustes pertes en vies humaines ne font que renforcer notre détermination commune à ne laisser aucun répit aux terroristes et aux narcotrafiquants que nous combattrons de toutes nos forces.
Je voudrais souligner ici que la présence de cette armée aguerrie est une présence structurante.
L’autre présence structurante dont je me réjouis est celle de l’Armée Française à Bamako, Mopti, Gao, Tombouctou, Kidal et plus au Nord encore.
C’est l’illustration la plus éloquente de la fraternité, de la solidarité entre les hommes et de la fidélité du pays de la révolution de 1789 aux valeurs de liberté, de fraternité et de dignité de l’homme.
Sans François Hollande et sans l’armée française la face du Mali et peut être celle de bien des états de notre sous-région eussent été bien différentes à l’heure où je vous parle.
Excellence Mesdames et Messieurs
L’armée Malienne et ses alliées françaises et africaines sont engagées sur plusieurs fronts pour pourchasser et détruire complètement les repaires des terroristes et des narco-djihadistes.
La donne est en train de changer dans le sens souhaité et il est permis de regarder l’avenir avec plus d’espoir qu’il y a deux mois où les ⅔ de notre territoire étaient occupés.
Toutes les grandes villes du Septentrion sont sous le contrôle des forces alliées et de l’Etat Malien : Konna, Douentza, Djabaly, Gao, Bourem, Toumbouctou sont libérés et la traque des terroristes se poursuit dans l’Adrar des Ifoghas.
Affaiblis et déstructurés par les frappes de l’aviation française, pourchassés par les militaires Maliens et alliés déployés au sol, les narco-djihadistes en déroute entreprennent une guerre asymétrique caractérisée par le harcèlement des troupes, les attentats suicides et les attentats à la voiture piégée.
Les terroristes d’AQMI, du MUJAO, d’Ancar-Dine, du MNLA et leurs alliés cherchent à créer la psychose chez les populations déjà éprouvées par près d’un an d’occupation. C’est pourquoi nous devons rester particulièrement vigilants car l’ennemi conserve encore une forte capacité de nuisance.
Néanmoins, l’administration réoccupe progressivement ses positions.
La Feuille de route du Gouvernement adoptée par l’Assemblée nationale prévoit le rapatriement de près de trois cent mille de nos compatriotes réfugiés dans les pays voisins.
Le processus du dialogue inter-malien qui sera mené en collaboration avec la médiation de la CEDEAO est en train d’être organisé.
La Commission Nationale pour le Dialogue et la Réconciliation sera créée dans moins d’une semaine et sera constituée de représentants de l’ensemble des Communautés du Nord et du Sud, toutes couches sociales et toutes ethnies confondues.
Excellences Mesdames et Messieurs,
Quant à l’organisation des élections générales, comme vous le savez, nous avons fixé le 31 juillet 2013 comme date limite de leur tenue. Il s’agit là d’un véritable challenge que nous nous efforcerons de gagner.
Le Gouvernement s’est attelé dès le début de la Transition à leur préparation. Nos spécialistes des questions électorales travaillent d’arrache-pied à produire un fichier électoral crédible avec à la clef l’élaboration d’une carte assortie d’un identifiant unique pour chaque malien et chaque malienne. Cette carte produite à partir des données du Recensement Administratif à Vocation d’Etat Civil (RAVEC) permettra de diminuer les risques de fraude.
Le budget prévisionnel pour l’organisation de ces élections est de 60 milliards de francs CFA et c’est le lieu pour moi de lancer un appel à la Communauté internationale afin de nous aider pour une parfaite organisation de ces scrutins.
L’organisation d’élections présidentielle et législatives transparentes et crédibles telles que recommandées par la résolution 2085 du 20 décembre 2012 sera le meilleur test de notre capacité et de notre volonté de tourner la page de la plus grave crise institutionnelle et sécuritaire que notre pays ait jamais connue.
Excellences Mesdames et Messieurs,
La mise en œuvre des actions inscrites dans la Feuille de route permettra de relever les différents défis qui se posent au Mali en matière de sécurité, de restauration de la démocratie et de relance des activités socio-économiques.
Pour atteindre ces objectifs, en plus des ressources prévues dans le budget d’Etat 2013, le Mali compte sur l’assistance des pays amis et des partenaires techniques et financiers traditionnels.
Il y a lieu de se féliciter des résultats de la Conférence des Donateurs sur le Mali du 29 janvier 2013 à Addis-Abeba, de la décision de l’Union Européenne, du Fonds Monétaire International, de la Banque Mondiale et de nombreux partenaires de reprendre la coopération avec le Mali dans le cadre de la lutte contre l’insécurité, la reconstruction post-conflit, la relance de la croissance et le développement.
Par ailleurs, le concept stratégique, fondement de l’action de la MISMA, vient d’être révisé à Bamako. Cette mission ne demeurera pertinente que porteuse du mandat le plus approprié pour protéger l’intégrité de notre pays, ramener et maintenir la paix et la sécurité dans les régions en cours de libération, dans l’espace CEDEAO, en Afrique et dans le monde.
C’est pourquoi nous sommes fortement favorables à la transformation du mandat de la MISMA dès que les territoires occupés seront libérés, afin de faire de la MISMA une force de maintien de la Paix des Nations Unies.
Excellence Mesdames et Messieurs,
Comme nous l’avons toujours affirmé dans toutes nos déclarations, le Mali est entraîné dans une guerre qu’il n’a pas souhaitée et nous sommes toujours restés ouverts au dialogue, mais à un dialogue qui respecte l’intégrité de notre territoire et la laïcité de notre République.
Je suis venu vous dire encore une fois, chers frères, chères sœurs, chers amis, que nous aurions préféré ne jamais avoir à tirer un seul coup de feu, que le dialogue est ce que nous avons toujours souhaité et qu’obligés de faire la guerre, notre gouvernement n’acceptera pas, pour l’honneur de la République et de l’Armée que quiconque soit victime d’exaction ou de justice expéditive. Nous veillerons à ce que toute personne, militaire ou civile, qui se rendra coupable d’exactions réponde de ses actes devant les juridictions compétentes maliennes ou internationales.
Messager d’un pays qui a le sens de la fierté et de la justice et qui voit dans certaines informations diffusées avec insistance et énoncées toujours au conditionnel, la volonté de désinformer et de jeter de l’huile sur le feu, je suis là aussi pour réclamer le sens de la mesure, le sens de la justice. Pour demander aux avocats de l’indéfendable de ne pas continuer davantage leurs allégations que nous considérons comme autant d’injures contre une Nation déjà blessée.
Le Mali doit être accompagné et compris dans sa recherche de compromis pour que les communautés du Nord réapprennent à vivre ensemble, dans l’histoire assumée et purgée d’une crise dont il ne faut pas sous-estimer la profondeur.
On devrait plutôt diffuser et rediffuser le message délivré par ces jeunes officiers maliens aux populations de Tombouctou et Gao, leur demandant de ne pas faire d’amalgame et leur expliquant que l’action de l’Armée a pour objectif de les libérer de leurs tortionnaires mais, qu’en aucun cas, elle ne saurait poser d’action contre une communauté particulière ou entreprendre quelque action de représailles.
Le Mali n’a accusé personne. Mais que personne ne nous accuse à tort !
Qu’on ne lui jette pas la pierre quand ce sont des excuses qu’il mérite.
Qu’on ne vienne pas nous dire que ce sont des hommes de Dieu qui sont en train d’être combattus car ce sont eux qui ont déclaré la guerre à leurs frères en Islam ! Mais il est désormais établi, qu’en réalité, leur religion, c’est le narcodollars !!!
Oui, nous sommes ouverts au dialogue s’il permet de soustraire les masses crédules des agissements de doctrinaires fous qui n’accordent aucun prix à la vie humaine.
Et qu’on ne vienne pas nous dire que la communauté Touareg et encore moins l’ensemble des communautés du Nord, ce sont ces fauteurs de troubles habitués à l’argent facile, à la supercherie et à la manipulation.
Les communautés du Nord sont hélas celles qui vivent dans les camps depuis les premiers coups de feu en janvier 2012, après avoir laissé derrière elles leurs animaux et leurs terroirs par la faute de ceux qui ont aujourd’hui l’indécence de vouloir parler en leur nom.
Excellences Madame, Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
Mesdames, Messieurs,
Je ne serais pas là au 43ème sommet de la CEDEAO pour vous parler.
C’est mon souhait et je ferai tout pour que ce souhait soit réalisé et que ce soit un Président élu, fort de toute sa légitimité, qui prenne la parole devant vous dans quelques mois.
Aucun présent ne saurait être plus grand pour mon pays et aucun remerciement ne serait mieux souhaité par vous dont les troupes sont en train de risquer leur vie pour l’intégrité territoriale du Mali, mais aussi pour sa démocratie.
Je n’aimerais pas partir cependant sans partager avec vous une préoccupation profonde sur la situation du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest.
Car la crise malienne n’est qu’une préfiguration du schéma voulu pour tous nos Etats qui sont tous soit dans l’arc de la menace terroriste et narco-djihadiste soit dans l’arc du terrorisme maritime.
Il ne faudra pas non plus oublier qu’avant le « test de vérité », l’Armée malienne faisait figure d’une des grandes armées de la sous-région. Ce qui nous est arrivé est connu de tous.
Et la leçon qu’il faut en tirer est que le Mali ne pouvait s’en tirer tout seul. Il a fallu que vous accouriez tous, il a fallu que la France accoure avec le soutien de la communauté internationale dans le cadre d’une solidarité qui, je suis sûr, fera jurisprudence.
Ce cas du Mali nous rappelle brutalement l’impérieuse nécessité de disposer de forces sous-régionales en attente et immédiatement opérationnelles et l’urgence de mettre en place ce dispositif crucial pour notre architecture sous régionale voire continentale de paix et de sécurité.
C’est sans doute le seul moyen de faire en sorte que notre tragédie, à nous, ne se reproduise nulle part ailleurs dans notre région.
Nous devons rechercher constamment les causes de nos insécurités sans jamais mettre la tête dans le sable. Ainsi seulement, la crise malienne aura servi à toute la sous-région.
Excellences Madame, Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
Mesdames, Messieurs,
Je vous dis merci du fond du cœur.
Je vous redis la gratitude du peuple malien et avec lui nous vous disons que le Mali revient, que le Mali libre et démocratique reviendra prendre sa place parmi vous, plus fort des enseignements de sa crise et de sa volonté de ne plus sombrer.
Vive la CEDEAO !
Vive l’Intégration Régionale !
Vive l’Afrique !
Vive la Solidarité entre tous les peuples du monde !
Merci pour votre attention.