Notre espace communautaire est aujourd’hui confronté à plusieurs menaces comme le terrorisme, la prolifération des armes, la criminalité organisée
«Protection des droits de l’homme, facteur d’instauration de la paix en Afrique de l’Ouest», tel est le thème de la Conférence internationale de la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), ouverte, hier, dans notre capitale. La cérémonie d’ouverture a été présidée, en fin d’après-midi, au siège de la Cour suprême, par le Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga. C’était en présence de certains chefs d’institutions de la République, des membres du gouvernement, des représentants du corps diplomatiques. Les membres de la grande famille judicaire ouest africaine et de nombreux autres personnalités étaient aussi présents. Lors de l’ouverture des travaux, la longue séquence des interventions a été précédée par l’exécution de l’hymne national et de celui de la CEDEAO.
Souhaitant la bienvenue à ses hôtes, le président de la Cour suprême, Nouhoum Tapily a déclaré qu’en choisissant notre pays pour abriter les travaux de la Conférence internationale et de l’audience hors siège, la Cour de justice de la CEDEAO apporte au peuple malien et aux plus hautes autorités du Mali le témoignage de sa très grande solidarité et de paix dans notre sous-région. Le thème de cette conférence, a-t-il ajouté, atteste fortement de ce soutien.
«Notre espace communautaire a besoin de sérénité, de paix pour réaliser les objectifs de développement et pour promouvoir les droits de l’homme, facteur d’intégration», a indiqué Nouhoum Tapily. Le président de la Cour de justice de la CEDEAO, Jerôme Traoré a souligné que le thème de la rencontre a été retenu au regard de l’actualité dans notre sous-région, marquée par une remise en cause de la paix, de la sécurité mais aussi des droits de l’homme. «La paix et la sécurité en Afrique de l’Ouest sont aujourd’hui menacées par divers groupes terroristes qui sèment la terreur et la désolation dans nos familles avec le lot de victimes civiles et militaires qu’ils provoquent. Ils tuent, violent et pillent nos populations, détruisent nos économies», a-t-il déploré. Le patron des juges ouest-africains a aussi réitéré le soutien de la Cour aux autorités de la sous-région dans cette lutte. Le président du Parlement de la CEDEAO, Moustapha Cissé Lo et la représentante du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), Mme Angèle Djohoussou abonderont également dans ce sens en insistant sur la pertinence du thème choisi.
Procédant à l’ouverture des travaux, le Premier ministre a assuré que la Cour de justice de la CEDEAO restait une réalisation unique honorant l’Afrique de l’Ouest, au moins à deux titres. Parce que le mandat relatif aux droits de l’homme constitue le pilier des fonctions judiciaires de la Cour de justice de la CEDEAO, a d’abord développé Soumeylou Boubèye Maïga avant d’expliquer que la caractéristique la plus distinctive du mandat de cette organisation est qu’il n’y a pas d’exigences d’épuisement des recours internes par les victimes de violations des droits de l’homme avant la saisie de la Cour.
«Ce qui rend votre fonction unique, mesdames et messieurs les juges, c’est que vous travaillez avec passion au service de 350 millions de citoyens vivant en Afrique de l’Ouest, appartenant aux nations ayant ratifié la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et les instruments juridiques fondamentaux relatifs aux droits de l’homme», a affirmé le chef du gouvernement. Avant d’assurer que l’attachement du Mali aux principes que prônent ces instruments juridiques est inaltérable. Les menaces d’aujourd’hui, à savoir le terrorisme, la prolifération des armes, la criminalité organisée, ignorent les frontières, a affirmé le Premier ministre ajoutant que les droits de l’homme sont ainsi bafoués au quotidien. Soumeylou B. Maïga a ensuite indiqué que l’accroissement du nombre de réfugiés et de personnes déplacées internes du fait des guerres civiles, des insurrections et des conflits intra et intercommunautaires nécessite l’instauration d’un cadre de collaboration entre les Etats et la Cour de justice de la CEDEAO. «La Cour de justice de la CEDEAO est et demeure un repère majeur pour les citoyens ouest-africains. Cette situation ne doit pas masquer cependant les nombreux défis qui restent à relever», a-t-il averti. Le premier de ces défis, en s’en tenant au point de vue du Mali, est celui de la relation entre la souveraineté juridique des Etats et l’indépendance de la Cour dont les décisions sont exécutoires sur le territoire des Etats membres, a soutenu M. Maïga. Le deuxième défi, selon lui, est celui des menaces croissantes auxquelles nous confronte notre époque et qui nous obligent à inventer les équilibres légaux et politiques pour que soit garanti le respect des droits de l’homme. Le troisième défi, a-t-il indiqué, est celui d’un monde qui nous bouscule. Selon M. Maïga, c’est l’émergence de certaines remises en cause, de phénomènes contemporains dont nous n’avons pas pris toute la mesure, mais qui demain viendront percuter notre ordre juridique, estimant que c’est aujourd’hui qu’il faut les (NDLR: ces phénomènes) appréhender.
Pour terminer, le Premier ministre a rappelé que les conférences internationales que la Cour de justice organise périodiquement sur des thèmes juridiques, aussi importants que variés, participent des efforts communs pour promouvoir et encourager la jouissance pleine et entière par toutes les populations des droits fondamentaux inhérents à la dignité de la personne humaine.
«L’espoir qui nous anime est de retrouver une assemblée communautaire plus à l’écoute des droits fondamentaux des citoyens, plus solidaire des Etats pour le développement, plus ouverte à l’esprit de partage et convaincue de nos nécessaires interdépendances», a souhaité le Premier ministre.
Massa SIDIBÉ