Le président de la Commission de la CEDEAO s’est livré hier à Ouagadougou à un diagnostic sans complaisance de la situation globale de la libre circulation des personnes et des biens dans la région, relevant les différentes entraves à la mise en œuvre correcte de cet élément fondamental dans le processus d’intégration régionale.
Dans son allocution à l’ouverture d’un forum régional citoyen de trois jours regroupant plus d’une centaine d’acteurs venus des différents Etats de la CEDEAO, Kadré Désiré Ouédraogo a rappelé que la libre circulation des personnes et des marchandises constituait «le ciment et l’étape principale de tout processus d’intégration régionale».
Il a ainsi expliqué que la zone de libre-échange, dont le projet a été lancé en 1979 et achevé en 2003, peine à fonctionner de manière satisfaisante. Pourtant, selon le Schéma de libéralisation des échanges (SLE), les produits du cru, du règne animal et végétal ainsi que les produits de l’artisanat doivent circuler librement dans l’espace communautaire et être exemptés de droits de douane et de contingentement. Le commerce intracommunautaire qui résulte du SLE est estimé en moyenne à 15 milliards de dollars par an, soit 11% à 12% des échanges globaux de la Communauté selon les années, a précisé le président de la Commission de la CEDEAO.
En dépit des insuffisances, note Kadré Désiré Ouédraogo, sur le plan institutionnel, les succès enregistrés par la CEDEAO sont visibles et palpables, notamment dans l’application des dispositions du Protocole sur la libre circulation avec un droit de résidence et d’établissement qui a connu des avancées significatives dans la mesure où les citoyens de la CEDEAO peuvent maintenant voyager sans visa dans notre région.
Mais, a-t-il reconnu, de nombreuses entraves existent aujourd’hui dans tous les Etats membres sur les axes routiers et aux frontières terrestres et les citoyens de la Communauté sont quotidiennement confrontés au racket, à l’intimidation et au harcèlement des agents de police, de gendarmerie, des douanes et de l’administration en poste aux frontières et le long des corridors. A cet égard, une récente étude établit que 36% des personnes traversant les frontières sont victimes de rackets et prélèvements illicites opérés tout comme 77% de ces migrants paient des pots-de-vin aux agents chargés du contrôle à chaque passage de frontière.
Ces méfaits ont été confirmés par le ministre d’Etat aux Affaires étrangères et à l’Intégration régionale du Burkina Faso, Yipénè Djibrill Bassolé, qui a souhaité que « dans un élan patriotique, l’ensemble des agents de sécurité aux frontières refusent désormais d’exiger et de recevoir des pots-de-vin et que les transporteurs se mettent en règle tout en refusant de verser des pots-de-vin en vue de faciliter leur passage».
Djibrill Bassolé a regretté à ce propos l’absence d’une forte implication des organisations de la société civile dans la gestion des politiques migratoires et le manque d’une synergie d’actions entre les acteurs communautaires et nationaux agissant dans le domaine de la libre circulation des personnes et des biens.
En dehors des personnes-ressources, le forum de Ouagadougou regroupe des participants venus des structures impliquées dans la question, tels les services de douane, d’immigration et d’intégration, les chambres de commerce et d’industrie, le secteur privé, la société civile, les associations professionnelles régionales ainsi que les institutions régionales comme la l’UEMOA et le CILSS. Elle émettra des propositions de solutions immédiates et à court, moyen et long termes pour une mise en œuvre effective des textes communautaires. Elle formulera aussi des recommandations destinées aux instances statutaires de la CEDEAO pour la mise en œuvre efficace et efficiente des textes.
(Source CEDEAO)