Suite à la volonté des autorités de la transition de prolonger de 5 ans la période transitoire, une pluie de sanctions s’abat sur Bamako. Face à ces sanctions jugées illégitimes et disproportionnées, la résistance s’organise et la colère au sein de l’opinion nationale ne cesse de monter. Ce regain de patriotisme est-il le début de la reconquête d’une souveraineté longtemps bafouée ?
Déterminés à afficher son refus du diktat extérieur sur les choix de sa politique intérieure, les Maliens sont sortis massivement à l’appel des autorités pour dénoncer les lourdes sanctions infligées au pays par la Cedeao. Méga meeting, manifestation de solidarité individuelle, promesse de soutien, conseil extraordinaire de sécurité nationale pour préparer la riposte, suspension de mot d’ordre de grèves… les gestes de patriotisme se multiplient depuis l’annonce des sanctions de l’organisation sous régionale.
Jugées illégitimes et disproportionnées, les sanctions ont, semble-t-il, reçu là où la crise multifonctionnelle a échoué à savoir : unir les Maliens autour d’un idéal commun. Confronté à une crise multidimensionnelle depuis près d’une décennie malgré le soutien et l’assistance massive de la communauté internationale. La légitimité de colère du peuple Malien ne souffre de l’ombre d’aucun doute au regard de la lourde tribu qu’il a payée et qu’il continue de payer. Villages dévastés, récoltes brûlées, enlèvement de bétails, déplacement massif de population sur fond d’instabilité sociopolitique.
La détérioration continue du climat sécuritaire et l’amoncellement des défis liés à la gouvernance justifient amplement la « révolte ». Avec autant de morts et de dégâts matériels, quel peuple s’accommode-t-il indéfiniment des politiques improductives des partenaires qui donnent l’impression d’avoir un autre agenda ? Pour les observateurs avertis, la « révolte » en cours était prévisible, les sanctions de l’organisation sous régionale n’auront été que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.
La colère actuelle qui n’épargne personne, est à n’en pas douter l’expression d’une frustration longtemps contenue. Dans sa majorité, l’opinion nationale malienne est, depuis le coup d’État du 18 août, réticente à toute voix susceptible de remettre dans un bref délai la classe politique en selle considérée comme seule responsable de la détérioration du pays. L’opposition à l’exigence de la Cédéao et de la communauté internationale relative au respect du délai de la transition tient plus d’une divergence de vue qu’une volonté d’isolement du pays.
Après les démonstrations de forces, les parties doivent retrouver la lucidité nécessaire pour aller de l’avant et trouver un compromis acceptable par tous. Car à y regarder de près, la sauvegarde de la démocratie demeure la préoccupation des uns et des autres. La dissension se situe seulement dans la démarche ! Malgré la noblesse de ses aspirations et la légitimité de sa colère, la partie malienne doit trouver les mots pour rallier les partenaires à sa cause, et de leur part ceux-ci doivent faire un effort supplémentaire pour écouter et entendre l’appel du peuple Malien qui n’aspire qu’à fonder son État afin de le hisser au rang des nations respectables.
Bouba Sankaré