Les chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) ont finalement mis à exécution la menace de sanctions contre le Mali. Comme du berger à la bergère, quelque heures après la tombée de ces sanctions, le gouvernement de transition, par l’entremise de son ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Abdoulaye Maïga, a répondu et brandi sa part de sanctions
Rien ne marche entre la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) et les autorités de la transition malienne. Ce duel à distance a nécessité moult allées et revenues de l’émissaire de la Cedeao, Goodluck Jonathan. C’est un secret de polichinelle que la pomme de discorde entre les deux parties est l’organisation des élections à bonne date en l’occurrence, le 27 février 2022 pour la présidentielle. Ce sont les élections qui, en principe, doivent sanctionner la fin de la transition politique au Mali, en vertu du respect des dispositions de la Charte.
Ayant constaté donc que les autorités de la transition ne sont pas dans la dynamique de se plier à ses décisions, l’Organisation sous régionale a exécuté une avalanche de sanctions contre les militaires et civils qui dirigent le pays. La partie malienne n’a caché à personne que ce sont d’abord les réformes politiques et institutionnelles qui sont prioritaires sur les élections bâclées qui pourraient, selon elle, installer le Mali dans d’autres crises. Pour ce faire, Assimi et son gouvernement se sont mis à la tâche. La main à la pâte, ils ont tenu les Assisses nationales de la Refondation de l’Etat du Mali.
Au sortir de ces concertations, boudées par l’ancienne majorité présidentielle et ses alliés de circonstance, la recommandation de 5 ans de prorogation a été faite à la Cedeao à Accra au Ghana. Cela, par le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop. A l’annonce de ce chronogramme, le thermomètre a atteint les 100° entre la Cedeao et Bamako.
A la première gamme de sanctions ciblées, s’ajoutent un deuxième lot plus dur. En effet, pour amener la junte à accélérer le processus d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel, les pays ouest-africains, réunis en sommet extraordinaire à Accra, ont pris des sanctions économiques, financières et diplomatiques. Ainsi ils ont décidé de geler les avoirs du Mali au sein de la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’ouest (Bceao), de couper les aides financières, fermer les frontières entre le Mali et les États membres de l’organisation, suspendre les transactions avec Bamako, à l’exception des produits médicaux et ceux de première nécessité. En plus, elle a décidé de retirer les ambassadeurs de tous les pays membres au Mali.
S’étant mises au parfum de ces sanctions, les autorités de la transition du Mali n’ont pas caché leur stupéfaction. Le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, porte-parole du gouvernement, Abdoulaye Maïga, n’a pas pour le moment mâché ses mots. Sur le plateau de l’Ortm et le nerf à fleur de peau, il a fait savoir que ces mesures contrastent avec les efforts fournis par le gouvernement et sa disponibilité au dialogue en vue de trouver un compromis avec la Cedeao sur le chronogramme des élections. Le gouvernement du Mali rejette et déplore le caractère inhumain de ces mesures qui, selon lui, viennent affecter les populations. Le gouvernement décide, lui aussi, de fermer ses frontières et de rappeler tous ses ambassadeurs de la zone Cedeao. La France, ancien pays colonisateur, blessée dans son amour propre, entre dans la danse. Elle bloque à l’aéroport les Maliens qui décident de venir au bercail.
La Cedeao sanctionne, le Mali réagit avec sa part de sanctions, la France joue au trouble-fête. Jusqu’où ira ce duel à distance entre Bamako et la Cedeao ? Bien malin qui peut le dire.
Bazoumana KANE