Un an après leur exit annoncé de la Cédéao, les trois pays qui composent l’Alliance des Etats du Sahel ont quitté officiellement l’organisation sous-régionale ce mercredi 29 janvier 2025. Toutefois, la période de transition instaurée par les dirigeants de la Cédéao jusqu’au 29 juillet vient de s’ouvrir.
Au terme d’un an de bras de fer rude entre l’AES et la Cédéao, on peut dire sans hésiter que la fracture est consommée à jamais. In fine, en Afrique de l’Ouest, nous avons désormais deux blocs (AES et Cédéao), comme la configuration de la carte géopolitique actuelle du monde (blocs Est et Ouest) qui cohabitent dans un contexte régional marqué par des suspicions et des méfiances totales entre les organisations.
Ce mercredi 29 janvier, les trois Etats de la Confédération des Etats du Sahel ont cessé d’être membres de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest comme l’avaient fixé les chefs d’Etat de la communauté ouest-africaine, lors de leur dernier sommet en décembre dernier à Abuja.
Pour célébrer ce retrait officiel, mardi 28 janvier 2025 à Niamey, capitale du Niger, des manifestants brandissaient des drapeaux des trois pays membres de l’AES et celui de la Russie. Certains manifestants transportaient même un faux cadavre drapé dans une sorte de catafalque aux couleurs de la Cédéao, symbolisant la fin de l’organisation ouest-africaine.
Au Burkina Faso, le même jour, des scènes similaires ont été observées. A Ouagadougou, la place de la Révolution était bondée de monde. Les manifestants arboraient des slogans comme “Nous voulons la paix, vive l’AES” et “Adieu la Cédéao”.
Ces mobilisations, marquées par une forte ferveur patriotique, montrent le soutien populaire et indéfectible à la décision des autorités militaires des trois pays.
Bien que les autorités militaires de ces trois pays ne cessent de le répéter à satiété et à qui veut l’entendre que leur décision de retrait de la Cédéao est irréversible, néanmoins le processus de transition de six mois se met déjà en place. Durant cette période, ces pays continueront à bénéficier des avantages de l’organisation comme l’indique le communiqué laconique de la Commission de la Cédéao publié ce mercredi.
Le point d’orgue de cette transition, c’est aussi de maintenir les négociations avec ces trois pays sous l’égide des médiateurs du Sénégal et du Togo et probablement le Ghana, qui vient de nommer Larry Gbevlo-Lartey, un militaire à la retraite et ancien coordonnateur de la sécurité nationale du Ghana auprès de l’AES afin d’amener les dirigeants de l’Alliance des Etats du Sahel à renoncer à leur décision.
Quelles conséquences pour les 72 millions d’habitants de l’Alliance des Etats du Sahel ? Quel sera l’avenir de la Cédéao après leur retrait effectif ? C’est l’une des questions qui revient en boucle ces dernières semaines.
Pour un ancien diplomate malien auprès de la Cédéao qui a requis l’anonymat, ce retrait des trois pays de l’Alliance est un véritable camouflet politique, économique voire diplomatique de par le poids économique de ces trois Etats, estimant que le Burkina Faso, le Mali, le Niger étaient effectivement des pays dont le poids économique est indéniable au sein de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest.
Pour d’autres observateurs, le retrait des trois pays permettra indubitablement à la Cédéao de s’actualiser et de retrouver la cohérence entre les principes qui énoncent son projet et la réalité à laquelle elle veut faire face efficacement.
Ousmane Mahamane