64 eme Sommet à Abuja : La CEDEAO lâche du lest

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Fortement attendu et annoncé comme un rendez-vous décisif, le sommet ordinaire de la CEDEAO a finalement vécu hier dimanche 10 décembre au Nigeria dont le président, Bola Ahmed Bola, assure la présidence de la conférence des chefs d’Etat. L’ensemble des conclusions n’était pas disponible au moment où nous mettions sous presse mais on note un clin au strict minimum dans le sens d’une normalisation avec les autorités maliennes, tandis que la fermeté reste de rigueur pour le Niger avec un dégel conditionné au sort du président renversé Mohamed Bazoum.

La Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO, au lendemain de velléités marginalistes des trois pays en transition de la zone CFA, était sans doute l’occasion de mettre sur la table le cas de l’internationale putschiste désormais constituée en Alliance des États du Sahel AES. Face à ce contexte crucial, les dirigeants de sous-région – ou du moins la majorité encore épargnée par la vague des renversements – a abordé les sujets brûlants avec un semblant de stand-by. Pour le Mali où un pacte électoral a encore cours avec la CEDEAO, il semble que la Conférence n’ait pas pris en compte la décision unilatérale des autorités de Transition chambouler le calendrier électoral. Ainsi, alors qu’un durcissement des sanctions était redouté par l’opinion, les chefs d’Etat se sont plutôt prononcés dans le sens de la conciliation avec la levée des restrictions de voyage précédemment infligées au président et au Premier ministre de transition. Autant dire, en définitive, que l’atmosphère de la prochaine CAN en Côte d’Ivoire ne sera pas affectée outre mesure par les hostilités avec ce pays voisin dont l’équipe nationale y participe.

L’attitude de la CEDEAO est différente avec le Niger. En plus du maintien des sanctions contre le régime de Niamey, l’institution sous-régionale maintient également suspendu le glaive d’une possible intervention armée. Pour Niamey, l’ouverture d’une fenêtre de normalisation reste conditionnée au sort de Mohamed Bazoum que la junte au pouvoir rechigne à libérer depuis sa destitution. Pour l’amener à bouger les lignes sur la question les sanctions et les menaces d’intervention armée sont désormais combinées avec une nouvelle démarche diplomatique. Le sommet a ainsi décidé de recourir aux services d’une troïka présidentielle constituée des présidents du Bénin, Patrice Talon, du Togo, Faure Gnassingbé, ainsi que de Guinée-Bissau, Umaro Sissoko Embalo. Il leur est assignée la tâche de reprendre langue avec Abderrahmane Tiani pour envisager avec la junte qu’il dirige les modalités d’élargissement du président renversé ainsi que celles d’un retour à l’ordre constitutionnel par une Transition aussi courte que possible. C’est dire que le retour du président Bazoum aux affaires ne pèse plus dans la balance.
Cette posture moins rigide s’annonçait en filigrane dans les conclusions d’une certaine commission de médiation à l’échelle ministérielle, dont le rapport respire une atmosphère moins hostile avec les pays en Transition, en dépit de leur tendance à se soustraire de leurs engagements politiques vis-à-vis de la CEDEAO. Les mêmes relents se dégageaient de l’allocution du président de la Conférence des chefs d’Etat, Bola Ahmed Tinubu, à l’ouverture des travaux du 64 eme Sommet. Tout en insistant sur l’intégration des systèmes démocratiques et de gouvernance comme fondent la construction et l’épanouissement de l’espace communautaire, le président nigérian n’a pas fermé totalement la porte au dialogue. Il a notamment concédé la disponibilité de l’institution sous-régionale à engager des négociations avec les régimes militaires des schémas de sauvegarde de démocratie à travers des transitions réalistes et courts. Dans la foulée, Bola Ahmed Tinubu n’a pas omis d’évoquer l’avènement de l’AES qu’il a qualifié d’initiative fantôme destinée à détourner la sous-région de sa quête de démocratie et de bonne gouvernance. C’est peut-être pourquoi l’initiative du trio Mali-Niger-Burkina est apparue comme un non-événement dans les conclusions du sommet.

A. KEÏTA

 

 

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